Marc

Chapitre 10

En chemin pour Jérusalem

(v. 1-16). — Jésus et ses disciples quittent la Galilée pour la dernière fois avant la crucifixion, moment bien solennel pour le peuple, s’il s’en était rendu compte, de même que pour les disciples.

Quand ils arrivent aux confins de la Judée, des foules se rassemblent autour de Jésus, et lui, continuant son service de prophète, « les enseignait encore, comme il avait accoutumé » (v. 1). Son amour ne se lassait pas, tant qu’il se trouvait en présence de besoins. Nous, nous aurions pu croire inutile d’enseigner ce peuple, puisqu’il ne voulait rien de lui; mais le Seigneur jetait une semence que le Saint Esprit ferait germer dans les cœurs et qui porterait du fruit, après sa mort, alors qu’ils comprendraient tous les enseignements de Jésus, ce qui eut lieu tout particulièrement pour les disciples.

Parmi ceux qui écoutaient le Seigneur, il y avait des raisonneurs, des gens religieux, tous remplis de leur propre justice, de ces hommes qui écoutent souvent ceux qui enseignent la vérité, plutôt pour les trouver en défaut que pour apprendre. Ici les pharisiens, attachés à la loi de Moïse, cherchaient à surprendre Jésus en opposition à cette loi. Ils lui demandent s’il est permis à un homme de répudier sa femme. Jésus reconnaît que Moïse avait permis le divorce, mais il ajoute que c’était à cause de la dureté de leur cœur. Le péché, entré dans le monde depuis que Dieu avait créé ces relations, les avait gâtées, et l’égoïsme de l’homme ne voulait pas supporter les conséquences de la chute lorsqu’elles se faisaient sentir dans ces rapports si intimes, car le péché endurcit le cœur. Voilà pourquoi Moïse avait permis cette mesure extrême. Cependant, malgré tout le désordre introduit dans ce que Dieu avait établi, il fallait remonter à l’origine pour avoir la pensée de Dieu, afin de s’y conformer, principe important à retenir pour connaître la vérité à l’égard d’une question quelconque; il faut revenir à « ce qui était dès le commencement » (1 Jean 1:1; 2:24; Jérémie 6:16). C’est ce que Jésus enseigne ici: « Mais au commencement de la création, Dieu les fît mâle et femelle: c’est pourquoi l’homme laissera son père et sa mère et sera uni à sa femme, et les deux seront une seule chair... Ce donc que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare pas » (v. 6-9). Cette déclaration du Seigneur contient tout ce qu’il y a à savoir sur ce sujet. Le croyant doit s’y conformer. Lorsqu’un enfant de Dieu désire se marier, il faut qu’il ait à faire très sérieusement avec Dieu, qu’il se laisse diriger par lui afin d’être sûr que cet acte, si important pour la vie tout entière, soit accompli « dans le Seigneur », comme le dit Paul (1 Corinthiens 7:39), car le lien du mariage une fois noué ne peut se dissoudre, sauf par la mort.

Il se trouvait aussi dans la foule des personnes qui reconnaissaient en Jésus une source de bénédiction en faveur des petits enfants. Ils lui en apportèrent afin qu’il les touche, chose qui dut être bien agréable au Seigneur, en contraste avec le mépris qu’il éprouvait de la part de ceux qu’il appelait « les sages et les intelligents », auxquels la grâce était cachée à cause de leur incrédulité. Les disciples n’entraient pas dans la pensée de leur Maître. La leçon qu’il leur avait donnée aux v. 36, 37 du chapitre précédent ne leur avait pas profité; car ils reprenaient ceux qui apportaient ces petits enfants. « Jésus, voyant cela, en fut indigné, et leur dit: Laissez venir à moi les petits enfants; ne les en empêchez pas, car à de tels est le royaume de Dieu. En vérité, je vous dis: quiconque ne recevra pas le royaume de Dieu comme un petit enfant, n’y entrera point » (v. 14, 15). Les disciples ne considéraient la grandeur et l’importance qu’au point de vue des hommes de la terre, pour qui les petits enfants n’ont pas d’importance, tandis que Jésus appréciait ces petits êtres parce qu’ils recevaient tout naturellement ses paroles et, par là, le royaume de Dieu et y entraient. Aussi l’on comprend que Jésus les aimait, qu’il les attirait à lui, qu’il les donnait comme exemple de ceux qui entraient dans le royaume. Il prit dans ses bras ceux qu’on lui apportait, et posant ses mains sur eux, il les bénit. Aujourd’hui, le Seigneur a les mêmes pensées envers tous les petits enfants et ceux qui leur ressemblent.

 

Un homme aimable

(v. 17-27). — Un homme, voyant Jésus qui sortait sur la route, accourut, se jeta à genoux devant lui, et lui dit: « Bon maître, que ferai-je afin que j’hérite de la vie éternelle? Et Jésus lui dit: Pourquoi m’appelles-tu bon? Nul n’est bon, sinon un seul, Dieu ». Il ignorait la ruine de l’homme et son incapacité d’obtenir la vie par ses propres œuvres; par conséquent il méconnaissait Jésus et le but de sa venue ici-bas. En l’appelant « bon maître », il ne le saluait pas comme Fils de Dieu, mais comme un homme bon d’entre les fils d’Adam, auquel d’autres et lui-même pouvaient ressembler en devenant bons comme lui. C’est pourquoi Jésus lui répond: « Nul n’est bon, sinon un seul, Dieu ». Le Seigneur était venu du ciel parce qu’il n’y avait personne de bon sur la terre et que personne ne pouvait hériter de la vie éternelle par ses propres œuvres. Cet homme se trouvait donc en présence de celui qui pouvait répondre à tous les besoins de sa situation. Saurait-il en profiter? Puisqu’il demandait ce qu’il devait faire, Jésus lui dit: « Tu sais les commandements: Ne commets point adultère; ne tue point; ne dérobe point; ne dis point de faux témoignage; ne fais tort à personne; honore ton père et ta mère ». Il répondit: « Maître, j’ai gardé toutes ces choses dès ma jeunesse ». On pouvait garder la partie de la loi que citait Jésus; cet homme l’avait fait; cependant il n’était pas sûr d’hériter de la vie que la loi promettait. Il était droit, moral; il y avait en lui des qualités attrayantes, Jésus reconnaissait ce qui restait de bon dans l’humanité qu’il avait créée; il savait l’apprécier. Il regarda le jeune homme et l’aima; il savait qu’il disait vrai; mais les qualités naturelles, de même que tout ce que l’homme dans la chair possède, ne peuvent lui donner la vie et l’amener à Dieu. Jésus lui dit: « Une chose te manque: va, vends tout ce que tu as et donne aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel, et viens, suis-moi, ayant chargé la croix. Et lui, affligé de cette parole, s’en alla tout triste, car il avait de grands biens » (v. 21, 22). La loi et les biens de ce monde allaient ensemble; le cœur de l’homme s’en accommodait; il en jouissait, mais cette jouissance était limitée à la vie présente; elle ne donnait rien pour l’éternité, ne changeait rien à l’état de l’homme coupable et perdu. Mais Jésus était là pour donner la vie éternelle et la jouissance de biens célestes. Pour les obtenir, il fallait le suivre en renonçant à tout ce qui détourne le cœur du ciel et de Lui-même, en portant sa croix, c’est-à-dire qu’il faut réaliser la mort au monde et à tout ce qui en fait partie.

Le cœur de cet homme, tout aimable qu’il ait été, s’attachait à ses richesses; il les préférait à Jésus et, sans s’en douter, les préférait au ciel. Il voulait jouir du présent; mais, en le faisant, il s’exposait à entendre, à bref délai peut-être, la voix de Dieu qui s’adressait en ces termes au riche de la parabole: « Insensé! cette nuit même ton âme te sera redemandée; et ces choses que tu as préparées, à qui seront-elles? » (Luc 12:20). Il s’en alla tout triste, ne pouvant allier le ciel et la terre, Jésus et les richesses; il garda donc celles-ci et sa tristesse.

Combien de personnes lui ressemblent autour de nous! Combien seront perdues pour avoir préféré à Jésus, non de grands biens comme cet homme, mais des bagatelles, des vanités, des plaisirs éphémères, auxquels il aurait fallu renoncer; car le raisonnement du cœur naturel est insensé, considéré à la lumière divine qui projette ses rayons jusque dans l’éternité, afin que nous puissions juger des choses présentes par la vue de celles qui sont à venir, des choses célestes et éternelles. Pour profiter de cette lumière, il faut croire; il faut se fier à Jésus; mais naturellement le cœur, incrédule, a peur de Dieu; il croit que Dieu le trompe, parce qu’il est lui-même trompé par l’Ennemi.

« Jésus, ayant regardé tout à l’entour, dit à ses disciples: Combien difficilement ceux qui ont des biens entreront-ils dans le royaume de Dieu! » (v. 23). Les disciples s’étonnèrent de cette parole, parce que, sous la loi, selon le gouvernement de Dieu, les richesses faisaient partie des bénédictions accordées aux fidèles; ils en concluaient que ceux qui en possédaient devaient tout naturellement entrer dans le royaume. Jésus leur répond: « Enfants, combien il est difficile à ceux qui se confient aux richesses d’entrer dans le royaume de Dieu! Il est plus facile qu’un chameau passe par un trou d’aiguille, qu’un riche n’entre dans le royaume de Dieu » (v. 24, 25). La confiance dans les richesses constitue l’obstacle; ceux qui n’en ont pas ne peuvent y compter; ils se confient plus facilement en Dieu, se laissent plus facilement attirer vers le Seigneur, quoique Satan sache donner du prix aux choses les plus mesquines de ce monde, afin de détourner, par elles, le cœur des hommes et tout particulièrement ceux que le Seigneur appelle.

De nouveau les disciples s’étonnèrent excessivement et dirent entre eux: « Et qui peut être sauvé? Et Jésus, les ayant regardés, dit: Pour les hommes, cela est impossible, mais non pas pour Dieu; car toutes choses sont possibles pour Dieu ». Non seulement l’homme n’est pas bon, mais il ne peut rien faire pour obtenir la vie éternelle. Cette incapacité reconnue et acceptée, Dieu entre en scène et manifeste ses ressources à la foi. Il a tout fait lui-même et tout est grâce pour le pécheur au moyen de la croix. Quelle faveur merveilleuse et quel encouragement dans ces paroles de Jésus: « Toutes choses sont possibles pour Dieu »! Le cœur, désespéré de son impuissance, trouve en Dieu le pouvoir et le vouloir. Tout le mouvement vient de lui en faveur de notre salut; il suffit d’écouter, de croire et de suivre Jésus qui est le chemin, la vérité et la vie.

 

Ceux qui ont tout quitté

(v. 28-31). — La conduite de Pierre et des autres disciples différait complètement de celle de cet homme, tout aimable qu’il ait été. Aussi Pierre dit au Seigneur: « Voici, nous avons tout quitté et nous t’avons suivi. Jésus, répondant, dit: En vérité, je vous dis: il n’y a personne qui ait quitté maison, ou frères, ou sœurs, ou père, ou mère, ou femme, ou enfants, ou champs, pour l’amour de moi et pour l’amour de l’Évangile, qui n’en reçoive maintenant, en ce temps-ci, cent fois autant, maisons, et frères, et sœurs, et mères, et enfants, et champs, avec des persécutions, et dans le siècle qui vient, la vie éternelle » (v. 29, 30). Dieu ne veut pas être redevable à ceux qui se fient à lui, en faisant le sacrifice de ce qu’il y a de plus cher pour le cœur humain; ceux-là trouveraient déjà ici-bas, au centuple, dans les relations fraternelles et en biens spirituels et éternels, ce qu’ils avaient abandonné, et le don parfait de Dieu au-dessus de toute appréciation: la vie éternelle, cette vie dans la gloire, lorsque tout le présent aura passé. Mais toutes ces choses, que l’on retrouve après en avoir fait le sacrifice pour le Seigneur, vont nécessairement avec des persécutions. On ne peut déplaire au cœur naturel sans en éprouver le mécontentement et même la haine, qui provient, chose triste à dire, de la haine pour Dieu. Cette haine s’est manifestée lorsque Dieu, en Christ, s’est présenté aux hommes dans son amour infini; mais il faisait briller, en même temps, la lumière qui les jugeait.

Pour tout abandonner et suivre Jésus, il faut avoir vu en lui le Sauveur qui seul peut délivrer du jugement et donner la vie éternelle. Alors sa personne devient l’objet du cœur et on abandonne tout facilement pour lui. L’apôtre Paul estimait comme des ordures les choses qui avaient été un gain pour lui avant qu’il ait vu tout ce qu’il possédait en recevant le Seigneur, lorsqu’il fut arrêté sur le chemin de Damas. Il peut dire: « Et je regarde même aussi toutes choses comme étant une perte, à cause de l’excellence de la connaissance du Christ Jésus, mon Seigneur, à cause duquel j’ai fait la perte de toutes » (Philippiens 3:8). Seule la connaissance d’un tel Sauveur, de son amour infini qui l’a conduit à la croix pour y endurer le jugement à notre place, peut nous amener à tout sacrifier pour lui, s’il le demande. C’est ce qui eut lieu au temps des persécutions, où les croyants avaient à quitter leurs familles, leurs biens, leur pays, et même à donner leur vie. Si nous ne sommes pas appelés à de tels sacrifices aujourd’hui, nous n’avons pas moins à renoncer à tout ce qui, dans nos cœurs, prend la place qui appartient au Seigneur. Aucun de nous ne devra quitter ce que le Fils de Dieu a dû abandonner pour venir nous sauver; aucun ne souffrira ce qu’il a souffert pour nous. À côté de son sacrifice, les nôtres sont infimes; et cependant, si nous en faisons pour lui, il nous rendra au centuple et nous introduira dans la même gloire que lui.

Jésus ajoute: « Mais plusieurs qui sont les premiers seront les derniers; et les derniers seront les premiers ». Malgré tous les sacrifices que nous ferions et verrions faire à d’autres, pour suivre le Seigneur, nous ne saurions en apprécier nous-mêmes la valeur, car Dieu lit dans les cœurs; il connaît les motifs qui nous font agir, tandis que nous ne jugeons que de ce qui apparaît, et nous risquons de nous tromper en n’appréciant pas justement. C’est pourquoi certains hommes, estimés les premiers, passeront au dernier rang, et d’autres, que nous considérons comme les derniers, deviendront les premiers, au jour où le Seigneur mettra tout en évidence. Ainsi contentons-nous de suivre Christ par amour pour lui, sans nous préoccuper des récompenses; au temps convenable, il attribuera à chacun ce qui est juste, selon Sa bonté, sans laquelle nous n’aurions rien.

 

Le chemin de la croix

(v. 32-34). — Jésus avait parlé, déjà plusieurs fois, de ses souffrances et de sa mort. Maintenant il montait à Jérusalem où cette mort l’attendait. Il allait devant ses disciples qui le suivaient stupéfiés et dans la crainte, pressentant, peut-être plus qu’ils ne le croyaient, que leur Maître allait être mis à mort. Jésus veut qu’ils sachent ce qui en était: « Et prenant encore une fois les douze avec lui, il se mit à leur dire les choses qui devaient lui arriver: Voici, nous montons à Jérusalem; et le Fils de l’homme sera livré aux principaux sacrificateurs et aux scribes, et ils le condamneront à mort, et le livreront aux nations, et ils se moqueront de lui, et le fouetteront, et cracheront contre lui, et le feront mourir, et il ressuscitera le troisième jour » (v. 33, 34). Les disciples venaient d’apprendre les avantages, présents et éternels, de ceux qui auraient tout quitté pour suivre Jésus. Ils pensaient nécessairement y avoir part en raison de leur conduite. Mais ils ne pensaient pas que, malgré leur dévouement et leur fidélité à Christ, ils ne pouvaient avoir part à aucune bénédiction dans les cieux ni sur la terre sans la croix où leur Maître subirait la mort, jugement de Dieu, à leur place. C’est pourquoi Jésus tient à placer encore une fois devant eux sa mort et sa résurrection, seul moyen de les introduire dans la gloire à venir, quelque idée qu’ils s’en fassent.

Quel amour infini que celui dont Jésus était l’expression ici-bas! Cet amour le rendait capable de se diriger vers Jérusalem, à la tête de ses disciples, dont le cœur n’était occupé que de grandeur et de gloire, vers la mort qu’il devait endurer à leur place, mort qui aurait été leur part comme la nôtre sans cet amour infini.

Que tous ceux qui sont sauvés pensent à ce qu’ils doivent à leur Sauveur, pour le suivre et le servir avec dévouement dans le chemin que lui-même leur a tracé, où ils trouveront ses soins de chaque jour, des persécutions, son opprobre, et à la fin la gloire éternelle, sans avoir à passer, comme Jésus, par les terreurs du jugement de Dieu! Puissions-nous tous dire comme l’apôtre Paul: « Ce que je vis... dans la chair, je le vis dans la foi, la foi au Fils de Dieu, qui m’a aimé et qui s’est livré lui-même pour moi » (Galates 2:20).

 

Souhait des fils de Zébédée

(v. 35-45). — Les souffrances et la mort, vers lesquelles Jésus marchait et dont il venait d’entretenir encore une fois ses disciples, auraient dû remplir de sympathie leurs cœurs et les absorber entièrement dans une sainte émotion quand ils pensaient à leur Maître bien-aimé. Hélas! il n’en était rien, au moins pour deux d’entre eux. Leur part dans la gloire les absorbe complètement et les empêche de songer aux moyens d’y entrer. Jacques et Jean, apôtres plus tard pleins d’amour et de zèle pour suivre Christ dans le chemin de la souffrance et de la mort, ne pensent qu’à leur propre gloire: ils demandent à Jésus qu’il leur accorde d’être assis dans sa gloire, l’un à sa droite, l’autre à sa gauche. Jésus leur répondit: « Vous ne savez ce que vous demandez. Pouvez-vous boire la coupe que moi je bois, ou être baptisés du baptême dont moi je serai baptisé? Et ils lui dirent: Nous le pouvons. Et Jésus leur dit: Vous boirez bien la coupe que moi je bois, et vous serez baptisés du baptême dont moi je serai baptisé; mais de s’asseoir à ma droite ou à ma gauche, n’est pas à moi pour le donner, sinon à ceux pour lesquels cela est préparé » (v. 38-40). Jésus leur indique ainsi leur part avant la gloire; quant aux places qu’ils désirent, elles appartiennent à ceux pour qui elles sont préparées; lui-même ne peut les donner à d’autres. Avant qu’ils ne les occupent, la coupe des souffrances, qui était la part de Jésus, serait aussi la leur, ainsi que le baptême de la mort; non pas la mort avec son caractère expiatoire, qui n’appartient qu’à Jésus seul, mais les souffrances et la mort, partage de ceux qui suivent Christ dans son chemin de rejection du monde. Il ne saurait en être autrement, et les apôtres l’ont réalisé avec joie. Paul n’aurait pas voulu autre chose lorsqu’il disait: « Pour le connaître, lui, et la puissance de sa résurrection, et la communion de ses souffrances... si en quelque manière que ce soit je puis parvenir à la résurrection d’entre les morts » (Philippiens 3:10, 11). Ce qui doit attirer nos cœurs vers la gloire, c’est Christ; il n’y a, du reste, pas de gloire sans lui qui en est le centre. Si nos cœurs sont attachés à sa personne en comprenant son grand amour, nous désirerons être avec lui pour jouir de lui-même, et les souffrances que nous rencontrons sur la route, nous les traverserons dans sa communion et dans la puissance que donne la contemplation de sa gloire, au lieu de nous occuper d’une bonne place pour nous-mêmes.

Dans le chemin qui se poursuit à la suite de Jésus, le Père apprécie le renoncement et le service de chacun; il donnera une place en rapport avec la fidélité montrée à l’égard de son Fils bien-aimé: « Si quelqu’un me sert, qu’il me suive; et où je suis, moi, là aussi sera mon serviteur: si quelqu’un me sert, le Père l’honorera » (Jean 12:26). Nous ne pouvons nous-mêmes apprécier justement le service de chacun. Si les disciples avaient compris ce que Jésus leur avait dit au v. 31, ils n’auraient pas prétendu à la première place, car ils ne pouvaient comprendre si d’autres ne l’avaient pas méritée. Grâces à Dieu, nous savons que Jacques et Jean auront une bonne place près du Seigneur; ils ne seront pas parmi les derniers. Jacques fut le premier des douze qui subit la mort pour son Maître. Jean eut la plus longue carrière au service de celui sur lequel sa tête reposait, la veille de la crucifixion. Dans une autre occasion, Jésus dit aux douze qu’ils seraient assis sur douze trônes, jugeant les douze tribus d’Israël (Luc 22:30).

Les dix autres disciples éprouvèrent de l’indignation à l’égard de Jacques et de Jean. Était-ce parce que de telles pensées étaient peu en rapport avec les communications que Jésus venait de leur faire, ou bien pour des motifs intéressés? Nous ne pouvons en juger. Espérons que la première supposition est exacte.

Jésus appelle ses disciples auprès de lui pour leur enseigner encore la différence entre la grandeur selon l’homme et la grandeur selon Dieu ici-bas. Ceux qui gouvernent les nations ont une autorité à faire valoir; et, par leur grandeur, certains hommes dominent sur d’autres. C’est ainsi que les choses se passent. « Mais il n’en est pas ainsi parmi vous », dit le Seigneur, « mais quiconque voudra devenir grand parmi vous, sera votre serviteur, et quiconque d’entre vous voudra devenir le premier, sera l’esclave de tous » (v. 42-44). Parmi les gens du ciel, il en est ainsi. Le plus grand de tous ceux qui seront dans la gloire, est celui qui s’est le plus abaissé. « Il s’est abaissé lui-même, étant devenu obéissant jusqu’à la mort, et à la mort de la croix. C’est pourquoi aussi Dieu l’a haut élevé et lui a donné un nom au-dessus de tout nom, afin qu’au nom de Jésus se ploie tout genou des êtres célestes, et terrestres, et infernaux » (Philippiens 2:8-11). Si Jésus a été élevé comme homme à la suprématie universelle et céleste, c’est pour avoir suivi le chemin de l’abaissement, de l’obéissance et de la mort, afin que nous puissions le suivre dans ce chemin qui est celui de la gloire. Convient-il à ses rachetés de dominer, de s’élever, là où leur Seigneur n’a trouvé que l’opprobre et la mort? La vraie grandeur ne sera-t-elle pas de l’imiter, de s’abaisser, afin de mieux pouvoir servir, en ayant pour modèle le Fils de l’homme qui « n’est pas venu pour être servi, mais pour servir et pour donner sa vie en rançon pour plusieurs » (v. 45). Si l’on veut occuper une des places que désiraient les fils de Zébédée, on devra, dans ce monde, s’abaisser, afin d’être l’esclave de tous, non seulement de quelque grand personnage — dont le service met en honneur —, mais de tous, de n’importe qui, du plus misérable, du moins attrayant, du plus indigne, comme de chacun. On le fera en étant pénétré de l’esprit du Maître. Voilà la leçon que Jésus donnait à ses disciples sur le chemin qui le conduisait à la croix, et telle il nous la donne aujourd’hui sur le chemin du ciel. Que Dieu nous accorde à tous d’en profiter!

 

L’aveugle Bartimée

(v. 46-52). — Le chemin qui conduisait à Jérusalem passait à Jéricho. Lorsque Jésus quitta cette ville, suivi par une grande foule, un aveugle, nommé Bartimée, mendiait assis au bord de la route. Ayant entendu dire que Jésus passait, il se mit à crier: « Fils de David, Jésus, aie pitié de moi! » Il y avait de la foi chez cet aveugle; il croyait que Jésus était le Fils de David, quoiqu’on le lui ait présenté sous son nom de mépris, « le Nazarénien ». Mais la foi sait discerner son objet, sous quelque forme qu’il apparaisse. « Plusieurs le reprirent afin qu’il se tût; mais il criait d’autant plus fort: Fils de David! aie pitié de moi ». Il se trouve en tout temps des personnes qui cherchent à faire taire les voix qui s’adressent au Seigneur; mais le sentiment vrai de son état et la certitude que l’on ne fait pas appel en vain à la grâce de Dieu, donnent la force de crier encore plus fort.

Cet appel à Jésus était un double témoignage rendu devant la foule indifférente; Bartimée déclarait qu’il était le Fils de David et qu’en lui se trouvaient les ressources pour son état. Jésus s’arrêta et commanda qu’on appelle l’aveugle. Ceux qui l’appelèrent lui dirent: « Aie bon courage, lève-toi, il t’appelle. Et jetant loin son vêtement, il se leva en hâte et s’en vint à Jésus ». Si, dans le monde, il y a des personnes qui empêchent d’aller à Jésus, il s’en trouve aussi que le Seigneur charge d’appeler les pécheurs et de les encourager à aller à lui en leur disant: « Il t’appelle ». Lorsqu’un pécheur éprouve quelque besoin dans son cœur, il trouvera toujours en Jésus le désir de lui répondre. Si ces deux désirs se rencontrent, le résultat est certain. Quel encouragement pour celui qui cherche le Seigneur! À l’appel de Jésus, Bartimée jette loin son vêtement, se débarrasse de tout ce qui peut retarder sa course; il regarde comme un obstacle son manteau même, pourtant nécessaire à un aveugle mendiant; il l’abandonne sans calculer, afin de se trouver au plus tôt vers Jésus qui passait pour la dernière fois dans ces lieux. Quel exemple ce pauvre homme ne donne-t-il pas à ceux qui, peu soucieux de leur salut, ne s’inquiètent pas du Sauveur, ne l’appellent pas et se font prier pendant longtemps, de venir à lui. Cependant le temps fuit; la voix qui appelle se fait entendre, aujourd’hui, peut-être pour la dernière fois.

Jésus dit à Bartimée: « Que veux-tu que je te fasse? Et l’aveugle lui dit: Rabboni, que je recouvre la vue. Et Jésus lui dit: Va, ta foi t’a guéri; et aussitôt il recouvra la vue, et il le suivit dans le chemin » (v. 51, 52). Cette guérison est un exemple de conversion. Là où la foi existe, on entre immédiatement et infailliblement en possession du salut, car le besoin d’être sauvé rencontre en Jésus le besoin de sauver. Allégé de son manteau, sans souci pour la route, guéri de son infirmité, Bartimée peut suivre Jésus qui prendra soin de lui; il se trouve avec lui sur le chemin qui conduit au ciel. Il en est ainsi de tous ceux qui sont allés au Sauveur avec foi. C’est la première fois dans l’évangile de Marc que Jésus est appelé « Fils de David », tandis que Matthieu le désigne plusieurs fois comme tel. Le fait se comprend, puisqu’en Marc Jésus revêt le caractère de Serviteur et en Matthieu celui de Messie. Mais quoique notre évangile traite du service, ce récit présente Jésus comme Fils de David en relation avec son peuple aveugle, auquel il rend la vue lorsqu’il y a la foi. Dans les trois premiers évangiles, la guérison de Bartimée termine le service public du Seigneur pour montrer que, malgré le triste aveuglement du peuple, là où se trouve la foi au Fils de Dieu, il y a guérison. C’est ce qui aura lieu aux derniers jours avec le résidu juif.