Josué

Chapitre 8

Moyens et procédés du relèvement

Le méchant venait d’être ôté de l’assemblée d’Israël, mais, par la présence du mal au milieu d’eux, Dieu leur avait fait découvrir leur confiance en eux-mêmes. Souvent des cas pareils se présentent, lorsqu’une assemblée est satisfaite d’elle-même. Elle se vante de son état, de ses bénédictions, de son accroissement...! Israël fit de même; le peuple eut confiance, non pas en Dieu, mais en sa victoire, et cette confiance devint le chemin de la défaite. Israël dut être jugé, puis il lui fallut se purifier du mal. Mais le jugement de soi-même et la sanctification pratique ne sont pas encore la restauration de l’âme. Il faut que la communion avec Dieu, interrompue par le péché, soit rétablie.

Ici, je désire placer une remarque qui me paraît importante. Au chap. 6, Dieu manifeste devant Jéricho sa puissance avec Israël, en victoire sur l’ennemi. Cette même puissance se manifeste aussi dans la vie du chrétien. Il se peut qu’on jouisse de cette force divine, des victoires qu’elle apporte... et peut-être on ne connaît réellement encore ni Dieu, ni soi-même. Josué aurait dû le connaître, lui qui avait fait personnellement la rencontre de l’ange. Le chef de l’armée de l’Éternel s’était révélé à lui, ayant l’épée nue en sa main, la puissance prête pour le combat, et comme étant le Saint. Puis, en compagnie du peuple, Josué avait vu cette puissance à l’œuvre devant Jéricho. Mais il fallait que sa conscience entrât en rapport avec la sainteté de Dieu; il n’avait pas encore l’idée de ce que cette sainteté exigeait du peuple pour la marche. La colère de l’Éternel (7:1) doit se révéler à Israël et à son conducteur, pour qu’ils apprennent que la sainteté de Dieu ne peut tolérer l’interdit. Connaître Dieu en puissance, nous laisse encore bien des choses à apprendre pour posséder la vraie, la pleine connaissance de Dieu. D’autre part, il pourrait sembler que, lorsqu’on a passé par Guilgal, on doit en avoir fini avec soi-même. En réalité, on n’en a fini avec soi-même qu’autant que l’on se tient à Guilgal. Comme le peuple se connaissait peu, après la victoire de Jéricho! Lorsque Dieu avait pris mille peines pour lui prouver que tout était de Lui dans cette victoire, quelle suffisance, quel oubli que de s’en aller sans Dieu au-devant de l’ennemi!

Le résultat en est du recul, du travail, et quand ils reprennent l’offensive, toute sorte d’embarras. Il faut que le peuple remonte un chemin pénible, semé de complications, un chemin qui met en lumière à ses yeux sa propre faiblesse, déjà manifestée, aux yeux de l’ennemi, par sa défaite. Il faut qu’ils retournent en arrière, obligés de recommencer l’expérience d’eux-mêmes; mais cette expérience, la grâce va la leur donner avec Christ, et non plus avec Satan.

Remarquez, au chap. 8, combien tout devient compliqué, quand on n’a pas suivi le simple chemin de la foi. L’âme humiliée se retrouve avec Dieu, et Dieu peut marcher avec elle; mais les conséquences du chemin de la chair se font sentir. Dieu s’en servira pour la bénédiction finale; mais, je le répète, le chemin n’a plus la simplicité du sentier primitif de la foi, chemin très simple, car le croyant suit l’ordre de Dieu dans une humble dépendance de sa Parole, et la victoire est à lui. Ainsi en fut-il autour de Jéricho. Devant Aï, la même puissance qui avait fait tomber les murs de la ville maudite, se trouve, il est vrai, avec Israël et n’a pas changé; mais l’armée doit faire des manœuvres: elle se sépare en deux corps, cinq mille hommes se mettent en embuscade, le reste du peuple attire les défenseurs d’Aï hors de leur forteresse.

Au chap. 7, les espions avaient dit dans leur rapport: «Ils sont peu nombreux; que deux mille ou trois mille hommes environ montent». Et maintenant, il fallait que trente mille hommes vaillants, choisis d’entre eux, montassent contre Aï. Quelle humiliation! comme cela rabaissait Israël dans sa propre estime! Il fallait monter de nuit; les uns devaient se cacher, les autres feindre de fuir devant l’ennemi. Comment se glorifier de cela?

Mais on me dira: Vous nous avez montré qu’à Jéricho il n’était pas question de moyens humains, et voici maintenant toutes sortes de combinaisons pour vaincre l’ennemi. Je réponds: S’il vous suffit d’employer des moyens qui mettent en lumière votre incapacité, qui impriment à l’homme le cachet de son entière faiblesse, qui l’humilient, en sorte qu’il n’ait d’autres ressources que de fuir devant l’ennemi, à la bonne heure. Mais vous le voudriez, que vous ne le pourriez pas. En réalité, cher lecteur, ce ne sont pas plus qu’à Jéricho des moyens humains; la différence est que les dispositions devant Jéricho, Dieu les avait ordonnées, afin qu’Israël connût Sa puissance, tandis qu’à Aï, il les ordonnait pour que le peuple apprît à connaître sa propre faiblesse.

Mais, je le répète, dans l’un et l’autre cas, la puissance de Dieu n’a pas changé. C’est elle qui, devant Aï, donne la victoire à Israël; Josué était là, Josué avec le javelot en sa main. Sur l’ordre de l’Éternel, «Josué étendit vers la ville le javelot qui était en sa main» (v. 18). «Et Josué ne retira point sa main, qu’il avait étendue avec le javelot, jusqu’à ce qu’on eût entièrement détruit tous les habitants d’Aï» (v. 26). Elle était restée étendue tout le long du combat!

On entend souvent répéter: «Qu’importent les divisions? N’avons-nous pas tous le même but? Ne combattons-nous pas tous pour le même Seigneur, quoique sous des drapeaux différents?» Est-ce donc ce que nous enseignent ces chapitres? Non; une grande vérité y domine. Le peuple n’est qu’un; un dans sa victoire, un dans sa faute, un dans sa défaite, un dans le jugement du mal, un dans sa restauration. Les pauvres enfants de Dieu sont dispersés et divisés, et ils se contentent de dire: «Qu’est-ce que cela fait?» Frères, dans quel but Christ est-il donc mort? N’est-ce pas «pour rassembler en un les enfants de Dieu dispersés?» (Jean 11:52). Est-ce Dieu qui les disperse, après les avoir rassemblés? Non, c’est le loup qui disperse les brebis (Jean 10:12). Et nous dirions: Qu’importe ...?

La diversité n’est pas la division; mais elle se montre dans l’unité. L’embuscade prend Aï et y met le feu. Les vingt-cinq mille hommes fuient devant l’ennemi, puis se retournent contre lui avertis par la fumée de la ville. Au moment où ils combattent, l’embuscade sort de la ville pour prendre part à la bataille (v. 22), puis tous ensemble se tournent vers Aï et la frappent au tranchant de l’épée (v. 24). Il y a donc diversité d’action et de service, mais c’est une action commune. Le corps est un; les diverses parties sont reliées ensemble, et ce qui les relie, c’est Josué avec son javelot. Si l’on ne tient pas compte de cette unité, on est défait dans la bataille.

1 Cor. 12 nous montre la diversité liée à l’unité dans l’Église. «Or il y a diversité de dons de grâce, mais le même Esprit; et il y a diversité de services, et le même Seigneur; et il y a diversité d’opérations, mais le même Dieu qui opère tout en tous» (v. 4-6). «Car de même que le corps est un, et qu’il a plusieurs membres» (c’est la diversité dans l’unité), «mais que tous les membres du corps, quoiqu’ils soient plusieurs, sont un seul corps» (c’est l’unité dans la diversité), «ainsi aussi est le Christ». Nous sommes unis en un seul corps — le Christ — et cependant chaque enfant de Dieu a sa fonction et sa tâche, que nul ne peut remplir que lui. À chacun est confié un service différent; je ne puis faire le vôtre, ni vous le mien.

Maintenant Israël a retrouvé la communion avec Dieu. Dans toute cette scène, la présence de Josué caractérise d’une manière très bénie toute l’activité du peuple. S’agit-il d’entrer en guerre: «Josué se leva avec tout le peuple» (v. 3). S’agit-il des préparatifs du combat — «Josué passa cette nuit au milieu du peuple» (v. 9). S’agit-il de se mettre en marche: «Josué s’avança cette nuit-là au milieu de la vallée» (v. 13). S’agit-il d’attirer l’ennemi: «Josué et tout Israël... s’enfuirent par le chemin du désert» (v. 15). S’agit-il de le battre: «Josué et tout Israël... frappèrent les hommes d’Aï» (v. 21). S’agit-il enfin de la victoire définitive: «Josué ne retira point sa main... qu’on n’eût entièrement détruit tous les habitants d’Aï» (v. 26).

La défaite d’Aï eut pour résultat d’apprendre aux Israélites à mieux connaître à la fois leurs propres cœurs et le caractère du Dieu qui les conduisait. Avant de considérer les résultats pratiques de cette leçon que Dieu avait donnée à son peuple en le disciplinant, je désire faire un rapprochement entre les chap. 7 et 8 de Josué et les chap. 20 et 21 des Juges. C’est un fait connu que la fin du livre des Juges, depuis le chap. 17, ne suit pas l’ordre chronologique (cf. 20:28), mais nous offre un tableau de ce qui s’est passé avant que Dieu suscitât des juges, un tableau de l’histoire d’Israël immédiatement après la mort de Josué. Le déclin avait été rapide et complet; l’idolâtrie et la corruption morale régnaient partout. Au commencement et à la fin de ces chapitres, nous trouvons cette formule: «Chacun faisait ce qui était bon à ses yeux». Plus de dépendance de Dieu, de sa Parole: la mesure du bien et du mal, c’était la conscience de l’homme. Chacun se dirigeait d’après sa propre conscience; la conscience était la mesure de la marche.

Ce tableau diffère-t-il beaucoup de celui de la chrétienté? Que s’est-il passé après le départ des apôtres? Le déclin a-t-il été moins subit, moins complet? Sans parler des principes corrompus du papisme, la chrétienté protestante éclairée, met-elle en avant la Parole, ou bien la conscience comme règle de conduite? Prêche-t-elle la soumission à la parole de Dieu, ou bien la liberté de conscience est-elle son mot d’ordre? Et quel est le résultat, lorsque l’on prend sa conscience pour guide? La confusion la plus absolue. Chacun ne tarde pas à se conduire d’après son propre jugement. Mais un péché horrible avait eu lieu à Guibha. Ce n’est pas l’interdit, la faute cachée, comme en Josué 7; c’est un péché commis à la face de Dieu et des hommes. Le misérable Lévite publie lui-même sa honte, il n’est pas une des tribus d’Israël qui n’en soit instruite (Juges 19:29). Qu’est-ce que le peuple va faire? Eh bien! comme pour le péché d’Acan, Dieu se servira du péché de Guibha pour mettre à nu l’état moral d’Israël, pour l’humilier et réveiller chez lui la conscience de ce qui est dû à Dieu. Seulement ici, l’état moral des tribus est beaucoup plus bas et plus grave qu’il ne l’était devant Aï. Ils sont indignés, mais du tort qui leur a été fait; la pensée du tort fait à Dieu est absolument absente de leur esprit. Ils parlent de «l’infamie que Guibha a commise en Israël», de la «méchante action que l’on a commise parmi ceux» de la tribu de Benjamin; mais pas le moindre mot de la honte jetée sur le nom de l’Éternel. Comme cela prouve le déclin, et qu’elle est différente la parole de Phinées aux deux tribus et demie (Josué 22:16): «Quel est ce crime que vous avez commis contre le Dieu d’Israël?»

À ce premier symptôme du déclin s’en lie un second; ils avaient abandonné ce qu’on pourrait appeler le premier amour. Le Seigneur n’était plus devant les yeux, l’affection pour lui avait diminué, et par conséquent aussi l’affection pour ce qui était né de lui. Ils oublient que Benjamin est leur frère. «Qui de nous montera le premier pour livrer bataille aux fils de Benjamin?» (Juges 20:18). Ces derniers, de leur côté, «ne voulurent pas écouter la voix de leurs frères, les fils d’Israël» (v. 13).

Un troisième symptôme, c’est l’oubli de l’unité du peuple. Remarquez que les onze tribus formaient en apparence une unité magnifique; elle était presque aussi belle que lorsqu’Israël se purifia d’Acan et fut restauré devant Aï. Ah! cependant ce n’était plus l’unité de Dieu! Le peuple avait beau être «réuni, comme un seul homme» (v. 1), ou «se lever, comme un seul homme» (v. 8), ou s’unir contre Guibha, «comme un seul homme» (v. 11), Benjamin manquait à l’unité d’Israël, et Dieu n’en reconnaît qu’une. Bien-aimés, ces anneaux du déclin se rivent l’un à l’autre; oubli de la présence de Dieu, abandon du premier amour, mépris de l’unité, malgré les meilleures apparences.

Benjamin n’était-il donc pas coupable? Oui, infiniment coupable. On voit chez lui, dès le début, le parti pris de ne pas juger le mal. Averti d’un crime patent, aussi bien que les autres tribus (19:29), ayant connaissance que l’assemblée des fils d’Israël était en voie de juger le mal, averti enfin, bien que ce fût dans un esprit charnel, qu’il eût à s’en purifier, il se refuse à tout devoir. Il renie l’unité d’Israël en établissant le principe de l’indépendance, et loin de se purifier du crime de Guibha, il s’y associe avec l’inutile et misérable semblant de faire une différence (20:15). Benjamin devait être jugé, mais l’état du peuple tout entier était si mauvais, qu’il rendait le jugement impossible selon Dieu et qu’il lui fallait passer lui-même par le crible, avant de pouvoir réellement se purifier du crime de Guibha. Qu’aurait dû faire Israël, s’il avait eu un sens droit des choses? S’humilier d’abord en présence de l’Éternel, consulter l’Éternel, et puis agir. Au lieu de cela, que font-ils? Ils commencent par se consulter, pauvre résultat de l’oubli de la présence de Dieu; ils prennent des mesures; ils décident très scripturairement «d’ôter le mal du milieu d’Israël», mais en oubliant complètement qu’eux-mêmes sont atteints par le mal, que Benjamin, c’est eux-mêmes. Après avoir pris tous leurs arrangements, et dénombré leurs guerriers, «ils montèrent à Béthel et interrogèrent Dieu» (v. 18). C’est, hélas! l’esprit du déclin; c’est ce que l’on trouve partout dans la chrétienté, et souvent chez de chers enfants de Dieu, ce que, même généralement, on érige en principe. Nous nous proposons quelque chose qui semble bon, puis au moment de l’exécution de nos plans, souvent après avoir tout arrangé, nous demandons à Dieu de nous bénir.

Le résultat de cet oubli complet des principes divins, c’est que, dans la première journée, vingt-deux mille hommes d’Israël sont mis par terre. Alors les enfants d’Israël remontent vers l’Éternel en pleurant; c’est la douleur, et non plus l’indignation charnelle, qui remplit leurs cœurs. Ils appellent Benjamin leur frère. L’amour perdu, l’esprit de solidarité, se réveillent. Puis ils se rangent encore en bataille et perdent dix-huit mille hommes. Pourquoi cette seconde défaite? Dieu, dans sa bonté, voulait produire un résultat complet. La douleur n’était pas tout, ni la proclamation des liens qui les unissaient; il fallait un jugement complet de soi-même, la repentance devant Dieu; il fallait remonter le chemin du déclin jusqu’à retrouver la présence de l’Éternel et sa communion perdue. Aussi est-il dit: «Et tous les fils d’Israël, et tout le peuple, montèrent et vinrent à Béthel, et pleurèrent, et demeurèrent là devant l’Éternel et jeûnèrent ce jour-là jusqu’au soir, et ils offrirent des holocaustes et des sacrifices de prospérités devant l’Éternel» (v. 26). Désormais, nous voyons se dérouler une scène qui offre une très grande analogie avec celle d’Aï. Il faut qu’Israël mette une embuscade (v. 29), fuie devant Benjamin (v. 32), que trente hommes encore, après toutes leurs pertes, soient blessés à mort, que le feu soit mis dans la ville pour servir de signal. Israël, entièrement jugé, et rentré en communion avec Dieu, peut désormais rencontrer le pénible devoir de juger le profane Benjamin; mais alors que de sanglots, que de larmes, à la suite de la victoire! (21:2). Comme elle était différente cette scène, de celle de Jéricho, où «le peuple jetant un grand cri, la muraille tomba sous elle-même»! (Jos. 6:20). C’est qu’il s’agissait ici de leurs frères, d’une tribu presque retranchée par le jugement. Après cela Dieu, dans sa grâce, et au milieu de bien des complications amenées par la hâte charnelle des décisions premières d’Israël, Dieu, dis-je, rétablit le grappillage de Benjamin.

Mais il est un parti dans l’assemblée d’Israël, qui est traité plus sévèrement par le peuple restauré que ne le fut Benjamin lui-même. Jabès de Galaad n’était pas venu au camp, à l’assemblée (21:8). C’était une indifférence hautement proclamée, une neutralité qui ne tenait aucun compte du mal, bien pire encore que la colère charnelle avec laquelle Benjamin s’était révolté, en méprisant une décision de l’assemblée, et qui lui avait fait prendre les armes contre ses frères, en s’associant au mal. Jabès dut être exterminé à la façon de l’interdit.

 

Résultats de la discipline

Revenons à Josué et au peuple. Israël venait d’apprendre, dans le sentier de l’humiliation, qu’il ne pouvait avoir aucune confiance en lui-même. Cette expérience porte immédiatement ses fruits. Que ce soit désormais la Parole qui dirige le peuple! Pour éviter de nouvelles chutes, il n’a qu’à se confier en ce guide parfait. Les versets 27-35 nous montrent Josué et le peuple obéissant au commandement de l’Éternel (v. 27, 31, 33, 35), et dépendant de ce qui est écrit au livre de la loi (v. 31, 34). L’humiliation a pour effet de rappeler au cœur d’Israël et de son conducteur les prescriptions du chap. 27 du Deutéronome. Bien plus, le supplice du roi d’Aï montre que les détails de la conduite de Josué sont formés sur la Parole: «Comme le soleil se couchait, Josué commanda et on descendit de l’arbre son cadavre» (cf. Deut. 21:22-23). Pour l’homme, ce détail serait sans importance, mais un cœur nourri de la Parole ne pouvait le négliger. L’eût-il négligé, Josué serait retombé dans la même faute qui avait appelé le châtiment sur le peuple; il n’aurait pas tenu compte de la sainteté de Dieu. «Son cadavre», est-il dit en Deut. 21:23, «ne passera pas la nuit sur le bois,... car celui qui est pendu est malédiction de Dieu; et tu ne rendras pas impure la terre que l’Éternel, ton Dieu, te donne en héritage». Et encore (Nomb. 35:34): «Vous ne rendrez pas impur le pays où vous demeurez, au milieu duquel j’habite; car moi, l’Éternel, j’habite au milieu des fils d’Israël». En un mot, le Dieu saint ne pouvait demeurer avec la souillure, leçon bénie, enseignée à Josué par le chef de l’armée devant Jéricho, apprise au milieu des larmes en la vallée d’Acor, et librement réalisée au jour de la victoire par une conscience exercée à l’école de Dieu.

Le jugement du roi d’Aï nous présente encore une autre leçon. Ce n’est pas sans motif que Deut. 21:18-23, relie sans interruption les deux faits contenus dans les chap. 7 et 8 de Josué, le retranchement du méchant et le jugement de l’ennemi. Pratiquement, il en est toujours ainsi. Il faut que l’assemblée ôte le mal du milieu d’elle, avant de pouvoir combattre et réduire au silence le mal du dehors. Si le mal est toléré dans l’assemblée, vous ne trouverez jamais cette décision et cette fermeté qui traitent l’ennemi sans transiger, comme un ennemi, en le mettant d’emblée à la seule place que Dieu lui assigne, et dont il est dit: «Celui qui est pendu est malédiction de Dieu».

Enfin, j’ai été frappé d’une autre coïncidence dans les versets de Josué que nous étudions. La potence du roi d’Aï était la place du jugement et de la malédiction de l’ennemi d’Israël. Mais voici le peuple obligé de se tenir lui-même sur la montagne d’Ébal, où la malédiction de Dieu est prononcée contre lui! Cette conclusion terrible de la loi, à laquelle Israël ne pouvait échapper, Dieu l’a réduite à néant par la croix de Christ1. La malédiction prononcée en Ébal sur l’homme responsable, Christ l’a portée sur la croix pour nous en racheter. Sur la potence d’Aï, Israël pouvait voir, en type, l’ennemi par excellence, le diable, défait et anéanti, et c’est ce que nous voyons dans la croix de Christ; mais nous pouvons y voir aussi, comme nous venons de le remarquer, toute la malédiction qui pesait sur nous en Ébal, passée à tout jamais dans la réalité du jugement de Celui qui a pris cette place pour nous. En Gal. 3:10, 13, nous retrouvons la même relation bénie entre Ébal et la croix: «Car il est écrit (Deut. 27:26): Maudit est quiconque ne persévère pas dans toutes les choses qui sont écrites dans le livre de la loi pour les faire». Ces paroles terminaient les malédictions d’Ébal, mais l’apôtre ajoute: «Christ nous a rachetés de la malédiction de la loi, étant devenu malédiction pour nous, car il est écrit: Maudit est quiconque est pendu au bois». Voilà le supplice d’Aï.

1 Notons que l’autel ordonné pour cette circonstance fut établi sur la montagne d’Ébal, non sur celle de Garizim. L’autel sur Ébal faisait, pour ainsi dire, contrepoids en grâce à la malédiction.

Autre résultat de la discipline: Israël humilié est en état de rendre culte. «Alors Josué bâtit un autel à l’Éternel, le Dieu d’Israël, sur la montagne d’Ébal... et ils offrirent dessus des holocaustes à l’Éternel et sacrifièrent des sacrifices de prospérités». Il en est de même pour nous: sans le jugement de nous-mêmes, pas de communion; sans communion, pas de culte. L’autel en Ébal était la provision en grâce pour la malédiction que la loi prononce sur les transgresseurs. À l’autel, nous trouvons la propitiation, base de tout culte vrai, mais ici, en présence d’un peuple menacé de malédiction, s’il n’obéit. Notre culte à nous, a la croix pour point de départ et pour centre, la croix qui a mis fin à notre malédiction et ne fait rayonner sur nous que la pleine lumière de la grâce divine.

Mais cette grâce elle-même n’affaiblit point la responsabilité des chers enfants de Dieu. Il est des conditions sous lesquelles on prend possession du pays. Un double de la loi de Moïse devait être écrit sur de grandes pierres dressées et enduites de chaux (Deut. 27:2, 3; Jos. 8:32). Cette même loi fut lue tout haut «devant toute l’assemblée d’Israël» (v. 35). N’oublions pas que Jésus Christ est à la fois pour nous Sauveur et Seigneur: Celui qui nous a fait grâce et Celui qui a tous les droits sur nous. La connaissance de sa grâce remplit nos bouches de louanges dans le culte; le sentiment de notre responsabilité nous engage à poursuivre dans la sainteté et la vérité, à combattre le bon combat, à prendre possession du bon pays de la promesse!