Jean

Chapitre 12

Jésus à table à Béthanie

(v. 1-11) — «Jésus donc, six jours avant la Pâque, vint à Béthanie où était Lazare, le mort, que Jésus avait ressuscité d’entre les morts. On lui fit donc là un souper; et Marthe servait, et Lazare était un de ceux qui étaient à table avec lui» (v. 1, 2).

Pendant que l’on complotait à Jérusalem pour faire mourir Jésus, un repas lui était préparé à Béthanie. Dans ce lieu béni, loin de la haine des hommes, le Seigneur trouvait une retraite et l’affection de cœurs qui lui étaient attachés. Nous aimons à penser combien il jouissait, dans ce milieu, de l’amour dont lui-même avait rempli les cœurs.

Jean fait de cette scène un récit quelque peu différent de ceux de Matthieu et de Marc (Matthieu 26:6-13 et Marc 14:3-9). Cela tient au caractère de l’évangile et à l’enseignement spécial que l’Esprit de Dieu présente. Nous avons vu, au chapitre précédent, que Dieu glorifia son Fils à la résurrection de Lazare. Dans notre chapitre un témoignage sera encore rendu à sa gloire comme Messie (v. 12-19) et comme fils de l’homme (v. 20-26). Avant cela, l’Esprit de Dieu nous donne, dans ce repas à Béthanie, un petit tableau symbolique des bénédictions qui résulteraient de la victoire que Jésus allait remporter sur la mort et dont il donna le gage par la résurrection de Lazare. Si l’on considère ces résultats au point de vue du peuple juif, Lazare, tiré d’entre les morts, représente l’Israël futur, ressuscité lui aussi, et Marthe ceux qui auront traversé vivants le temps des jugements. Israël, dans ces deux parties, jouira des bénédictions du règne que le Seigneur établira ensuite de sa mort et de sa résurrection. Mais en attendant l’accomplissement de ce qui concerne le peuple terrestre, il se passe, dans l’économie actuelle, une scène bien plus intime entre le Seigneur et ceux qui sont au bénéfice de son œuvre. Ils lui rendent culte et réalisent tous les caractères de la vie chrétienne, dont chacun des trois convives présente un côté différent.

Dans les deux évangiles qui nous rapportent ce récit, il est dit que Jésus était chez Simon le lépreux, en Marc, «à table». Ici, Simon n’est pas nommé; il est dit simplement: «On lui fit là un souper»; tout exprès pour lui. Dans la vie du croyant, tout doit être fait pour le Seigneur; il jouit ainsi déjà des résultats de son œuvre quand il voit vivre pour lui ceux qui, avant de le connaître, vivaient absolument pour eux-mêmes.

Être à table, c’est l’expression de la communion. Lazare le mort était à table. Tous les croyants devraient jouir de cette communion, parce qu’ils sont devenus vivants pour Dieu et par conséquent morts au monde dont ils ne sont plus.

En Marthe, nous avons la figure du service, de tout ce qu’on fait pour honorer le Seigneur dans la vie de chaque jour. Tous nous avons un service à accomplir pour lui. Maintenant qu’elle connaît Jésus comme la résurrection et la vie, elle le sert, elle l’a pour seul objet; elle n’est plus distraite par son service, comme en Luc 10:40.

En Marie nous avons la part suprême de la vie chrétienne, l’adoration, le culte. «Marie donc, ayant pris une livre de parfum de nard pur de grand prix, oignit les pieds de Jésus et lui essuya les pieds avec ses cheveux; et la maison fut remplie de l’odeur du parfum» (v. 3). En Matthieu et Marc, Marie, qui est simplement appelée «une femme», répand le parfum sur la tête de Jésus. En Matthieu, qui présente Jésus comme Messie, nous voyons cette femme le reconnaître comme tel, contrairement au peuple, à l’approche de sa mort; elle répand sur la tête du Messie l’huile de l’onction royale, expression de la valeur qu’a pour son cœur la personne du Christ rejeté. Comme Jésus devait ressusciter avant que l’on eût le temps d’embaumer son corps, il accepte cette onction comme ayant la valeur de son embaumement, service dont les autres femmes, attachées au Seigneur aussi, mais moins intelligentes que Marie, furent privées: lorsqu’elles se rendirent au sépulcre, Jésus était ressuscité.

En Marc, où nous voyons Jésus comme prophète ou serviteur, c’est sous ce caractère qu’il est honoré et oint. Nous y trouvons la même appréciation de sa personne, le même amour qui, sous l’effet de la haine de l’homme et de l’approche de la mort, exhale son parfum.

Dans notre évangile, Marie s’approche de Jésus avec tout le respect et l’honneur dus au Fils de Dieu. Elle a été assise à ses pieds, où elle a appris à connaître l’excellence de sa personne. La résurrection de son frère lui a encore révélé une gloire qu’elle ignorait jusqu’alors. Son cœur, débordant de l’amour dont Jésus était l’expression, l’amène en toute humilité à ses pieds, dans la conscience qu’elle avait de la grandeur et de la divinité du Fils de Dieu. Ce fait nous apprend pourquoi Marie oint, non la tête, mais les pieds du Fils de Dieu, de celui qui, Dieu manifesté en chair, a bien voulu lui apporter du ciel, ainsi qu’à tous les croyants, l’amour divin, infini, manifesté dans le don de lui-même. La haine que lui témoignaient les Juifs, l’approche de la mort dont Marie apercevait déjà les ombres, faisaient ressortir les gloires de son unique objet, en même temps que son amour pour lui. Elle pressentait que le dernier moment était venu pour lui témoigner le prix qu’il avait pour son âme. Ce parfum de grand prix symbolise l’adoration et la louange offertes au Seigneur dans le culte par ceux qui apprécient sa glorieuse personne. Ceux qui demeurent étrangers à l’amour de Jésus estiment cet honneur comme une perte. Judas l’exprime en ces termes: «Pourquoi ce parfum n’a-t-il pas été vendu trois cents deniers et donné aux pauvres? » Le monde aussi pense qu’au lieu d’honorer le Seigneur en lui témoignant le respect, la reconnaissance, l’amour qui lui sont dus, par le culte et une vie d’obéissance tout entière, il vaudrait mieux s’occuper de bonnes œuvres qui ont plus d’apparence aux yeux des hommes. Elles ont leur place; le Seigneur les apprécie lorsqu’on les fait pour lui; mais il doit occuper en toutes choses la première place et, dans le culte, toute la place. Hélas! Judas, qui poursuivait son but tristement intéressé, ne se souciait pas des pauvres; ses affections étaient ailleurs; il aimait l’argent, ce qui avait fait de lui un voleur. Dans un cœur comme le sien, rendu insensible à l’amour dont il avait été entouré, endurci par l’amour de l’argent, il n’y avait plus de place pour Jésus: sérieux avertissement à l’adresse de ceux qui aiment l’argent, car l’attachement à la matière endurcit, ôte les sens spirituels, rend égoïste, et conduit souvent au vol et même au crime.

Jésus répondit à Judas: «Permets-lui d’avoir gardé ceci pour le jour de ma sépulture. Car vous avez les pauvres toujours avec vous; mais moi, vous ne m’avez pas toujours» (v. 7, 8). Une occasion unique se présentait de faire quelque chose pour le Seigneur, puisqu’il allait être crucifié quelques jours après, tandis que l’on a constamment l’occasion de faire du bien aux pauvres. Il y a un temps pour tout; il faut savoir le discerner et en profiter (Ecclésiaste 3:1-8).

Quel contraste saisissant nous offre l’attitude de Lazare, de Marthe et de Marie, et celle du monde qui haïssait Jésus, sans parler de Judas! L’objet aimé et glorieux des uns est en butte à la haine des autres. Ce contraste existe encore aujourd’hui entre le croyant et le monde, car le monde n’aime pas mieux Jésus aujourd’hui qu’alors, et tout ce que Jésus était alors pour les siens, il l’est encore maintenant. Il ne manque aux croyants que d’imiter Marie, assise à ses pieds, écoutant sa Parole, pour apprendre à connaître ses gloires, à être pénétrés de son amour, pour l’apprécier, lui adresser le culte qui lui est dû, vivre pour lui, afin que le parfum de Christ se répande autour d’eux. Le temps actuel est le seul dans lequel nous puissions rendre témoignage à Jésus en présence du monde qui ne trouve en lui aucune beauté. Bientôt nous n’en trouverons plus l’occasion; saisissons-la, comme Marie.

Pendant que Jésus était à table, une grande foule de Juifs vint non seulement pour le voir, mais pour voir Lazare ressuscité. Ceci causa un vif déplaisir chez les principaux sacrificateurs, en sorte qu’ils «tinrent conseil, afin de faire mourir aussi Lazare; car, à cause de lui, plusieurs des Juifs s’en allaient et croyaient en Jésus» (v. 10, 11). Folie de l’incrédulité, aveuglement de la haine! Jésus ressuscite un mort; les hommes veulent le faire mourir. Croyaient-ils annuler la puissance divine? Leur haine les empêchait de raisonner logiquement. Ils en veulent à Lazare, parce que le miracle dont il avait été l’objet avait amené des Juifs à croire en Jésus. Tel est l’homme naturel en présence de tout le déploiement de la grâce et de la puissance en sa faveur. Cependant plusieurs crurent. C’est ce que nous avons vu plusieurs fois (chap. 10:42; 11:45). Dieu accomplit son œuvre malgré tout, encore aujourd’hui, au milieu de l’incrédulité générale de la chrétienté.

 

Jésus acclamé comme roi

(v. 12-19) — Après la scène touchante et intime de Béthanie, où Jésus reçut l’hommage de cœurs vibrants de son amour, il se mit en chemin pour Jérusalem, la ville qui tue les prophètes, et où il allait mourir; mais où Dieu voulait qu’il entrât comme Roi pour l’accomplissement des Écritures, en témoignage aux Juifs qu’il était bien leur Messie, le fils de David. «Le lendemain, une grande foule qui était venue à la fête, ayant ouï dire que Jésus venait à Jérusalem, prit les rameaux des palmiers et sortit au-devant de lui, et criait: Hosanna! béni soit celui qui vient au nom du Seigneur, le roi d’Israël! Et Jésus, ayant trouvé un ânon, s’assit dessus, selon qu’il est écrit: «Ne crains point, fille de Sion; voici, ton roi vient, assis sur l’ânon d’une ânesse» (v. 12-15). Dans les autres évangiles, on tapisse de rameaux et de vêtements la voie royale; ici il est simplement dit qu’ils «prirent les rameaux des palmiers», selon Lévitique 23:40, ce qui se faisait à la fête des tabernacles, type du règne millénaire, dont nous avons une anticipation momentanée. On acclame Jésus, selon le Psaume 118:25, 26, comme le roi qui vient au nom de l’Éternel, et selon la prophétie de Zacharie 9:9, qui devait s’accomplir durant la présentation du Messie venu dans l’humilité. Lorsqu’il viendra comme Fils de l’homme pour régner, il apparaîtra en gloire sur les nuées du ciel et non sur le poulain d’une ânesse. Si les Juifs n’avaient pas été aveuglés par leur haine et leur incrédulité, ils auraient compris que les prophéties s’accomplissaient par l’entrée de Jésus à Jérusalem et l’auraient reçu. Même les disciples ne le comprirent que plus tard. «Mais quand Jésus eut été glorifié, alors ils se souvinrent que ces choses étaient écrites de lui, et qu’ils avaient fait ces choses à son égard» (v. 16).

Les versets 17, 18 nous rapportent que la foule s’était portée au-devant de Jésus à la nouvelle du miracle de la résurrection de Lazare; elle lui rendait témoignage à cause de cela. Dieu a voulu que la résurrection de Lazare fût publiquement connue. Mais ce témoignage de la foule excite encore la haine des pharisiens contre Jésus au lieu de les convaincre, «Vous voyez que vous ne gagnez rien», disent-ils; «voici le monde est allé après lui» (v. 19 ). Les malheureux voyaient sombrer leur influence, leur crédit et toute leur gloire, si le peuple suivait celui qui ressuscitait les morts, le Fils de Dieu, le Messie, le Fils de David, le Sauveur du monde. Pour eux, tout, sauf lui, même un brigand. Quel tableau de notre propre cœur!

 

Des Grecs désirent voir Jésus

(v. 20-26) — Parmi les foules venues à la fête, se trouvaient des Grecs; quoique étrangers à Israël, ils participaient à la fête et souhaitaient de voir Jésus. Pour cela ils s’adressèrent à Philippe; celui-ci, probablement étonné que des Grecs désirassent voir Jésus, le dit à André, et, ensemble, ils le rapportèrent à Jésus (v. 20-22). Ce désir exprimé par des gentils, rappelle au Seigneur le moment où les nations seront admises à participer aux bienfaits du règne du fils de l’homme. Mais rejeté comme Messie, pour prendre ce titre, il devait mourir. Jésus pouvait s’intituler Fils de Dieu et Fils de David sans passer par la mort; mais, pour prendre son titre de Fils de l’homme et, comme tel, régner sur l’univers, s’associer des hommes dans la gloire, il devait mourir. C’est pourquoi Jésus répond aux deux disciples: «L’heure est venue pour que le Fils de l’homme soit glorifié. En vérité, en vérité, je vous dis: À moins que le grain de blé, tombant en terre, ne meure, il demeure seul; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit» (v. 23, 24). L’«heure» est celle de la glorification du Fils de l’homme. Selon les conseils de Dieu, il ne devait pas être seul dans la gloire, mais avoir des compagnons, des hommes, non des anges. Mais ces hommes tous pécheurs, loin de Dieu, méritaient la mort que Jésus allait subir. C’est pourquoi il dit que, si le grain de blé ne tombe en terre et ne meurt, il ne peut porter du fruit. C’était lui ce grain de blé, le seul homme selon les pensées et les conseils de Dieu, le seul qui pût entrer au ciel et jouir, comme homme, de la gloire de la présence de Dieu. S’il ne mourait pas, il demeurerait éternellement seul dans le ciel, où il pouvait entrer en vertu de ses propres perfections. Pour accomplir les desseins de Dieu, il accepte de porter le jugement de ceux qui seront ses compagnons dans la gloire; il les délivre de tout ce qui les privait de la jouissance éternelle de la présence de Dieu. Sa mort met fin à tout ce qu’est l’homme en Adam et à tous ses péchés. Par sa résurrection, il place l’homme devant Dieu, dans la même position que lui, en lui, en attendant qu’il y soit avec lui, semblable à lui, glorifié. C’est ainsi que pouvaient s’accomplir les conseils éternels de l’amour divin. Dieu le Père voulait amener dans la gloire des fils, fruits de la mort de son Fils bien-aimé. Aussi nous pouvons bien chanter:

Les vœux de ton amour immense
N’eussent pas été satisfaits,
Sans voir au ciel, en ta présence,
Des hommes sauvés et parfaits.

Dans les versets 25 et 26, le Seigneur parle des conséquences pratiques de sa mort ici-bas, pour ceux qui participeront à la gloire avec lui: «Celui qui affectionne sa vie, la perdra; et celui qui hait sa vie dans ce monde-ci, la conservera pour la vie éternelle. Si quelqu’un me sert, qu’il me suive; et où je suis, moi, là aussi sera mon serviteur: si quelqu’un me sert, le Père l’honorera». En attendant la gloire, ceux qui y participeront doivent abandonner leur vie d’homme en Adam, puisque Jésus est mort pour les en délivrer. Si quelqu’un a de l’affection pour cette existence-là, s’il satisfait sa volonté et lui accorde les jouissances du monde qui a rejeté Jésus, certainement il la perdra pour l’éternité. On ne peut avoir, dans la gloire, la vie acquise par la mort de Christ et conserver sa vie de pécheur ici-bas. Il faut l’abandonner pratiquement, dès que l’on possède la vie divine, en réalisant la mort toujours et partout, en marchant sur les traces de Jésus, en dehors de tout ce qui caractérise le monde où la vieille nature trouve sa satisfaction. De cette façon on conservera sa vie pour l’éternité, en jouissant déjà de tout ce qui appartient à la vie éternelle. Car le croyant est la propriété de celui qui est mort pour lui obtenir la vie; c’est lui que nous devons servir; aussi Jésus dit: «Si quelqu’un me sert, qu’il me suive», et les conséquences en sont évidentes. On ne saurait servir le Seigneur sans le suivre, malgré toute la profession que l’on peut en faire. On ne saurait servir Christ et rester attaché au monde qui ne veut rien de lui. Il a tracé aux siens un chemin en dehors du monde dont il dit que nous ne sommes pas. Il nous a laissé un modèle, afin que nous suivions ses traces (1 Pierre 2:21). En suivant le même chemin, on arrive où Jésus est arrivé. «Où je suis, moi, là aussi sera mon serviteur». En outre, le Père honorera celui qui aura servi son Fils, car le Fils est l’objet d’une telle affection pour le Père que tout ce qui est fait pour lui, le Père l’apprécie et le récompense. Mais le grand motif qui doit engager le croyant à suivre le Seigneur dans le chemin du renoncement au moi et au monde, c’est l’amour du Seigneur pour lui, amour qui lui a fait quitter la gloire pour venir dans ce monde, le sauver en subissant le jugement de Dieu, que tous ont mérité. Objets d’un tel amour, voudrions-nous avoir ici-bas une autre part, une autre place, que celle de notre Sauveur et Seigneur, lorsqu’il vint nous sauver? Si la marche du chrétien s’inspire de l’amour du Seigneur pour lui, tout lui deviendra facile, et ensuite le Père l’honorera. Cet honneur ne sert pas de motif à la fidélité, mais l’encourage.

 

L’heure de la mort

(v. 27-36) — Ce qui venait de se passer, plaçait devant Jésus la mort terrible qu’il allait subir. Il s’écrie: «Maintenant mon âme est troublée; et que dirai-je? Père délivre-moi de cette heure; mais c’est pour cela que je suis venu à cette heure. Père, glorifie ton nom» (v. 27 ). Ce n’est pas la mort de la part des hommes qui troublait l’âme de Jésus, tout sensible qu’il fût aux souffrances de tous genres qu’elle comportait; c’était la mort, jugement de Dieu, mort nécessaire pour ôter le péché afin de placer l’homme devant Dieu, lavé de toutes ses souillures. Selon toutes les perfections de sa nature, le Seigneur éprouvait l’horreur du moment où il serait séparé de son Dieu par l’abominable péché qu’il allait expier. Il ne pouvait désirer ce moment. «Délivre-moi de cette heure», dit-il; comme en Gethsémané (Luc 22:42): «Père, si tu voulais faire passer cette coupe loin de moi!»

Mais», dit-il aussitôt, dans une soumission parfaite à la volonté de son Père: «C’est pour cela que je suis venu à cette heure: Père, glorifie ton nom». Par amour pour son Père, il vint accomplir cette œuvre, afin de maintenir sa gloire, ses droits, en portant les conséquences du péché, du déshonneur que l’homme avait jeté sur le nom de Dieu, et pour que l’amour de son Dieu et Père pût être connu de coupables repentants. En réponse à son désir, une voix se fit entendre du ciel: «Et je l’ai glorifié, et je le glorifierai de nouveau». Glorifié par la résurrection de Lazare, il allait l’être encore par la résurrection de Jésus lui-même. Il a été «ressuscité d’entre les morts par la gloire du Père» (Rom. 6:4). Si le Seigneur n’a pas été délivré de l’heure de la mort, il a été délivré de la mort après l’avoir subie, chose impossible pour aucun autre homme. Les perfections divines et humaines du second Homme rendaient possible qu’il passât par la mort en portant le péché dont il s’était chargé, sans qu’elle le retînt. Après l’avoir endurée pour d’autres, il allait en sortir victorieux.

Entendant la voix venue du ciel, la foule dit qu’un coup de tonnerre s’était produit; d’autres prétendaient qu’un ange lui avait parlé. Jésus répondit: «Cette voix n’est pas venue pour moi, mais pour vous. Maintenant est le jugement de ce monde; maintenant le chef de ce monde sera jeté dehors» (v. 30, 31). Toujours en communion avec son Père, le Seigneur n’avait pas besoin qu’il lui répondît publiquement; il lui communiquait ses réponses dans l’intimité de cette communion; mais il fallait que la foule eût encore ce témoignage de la part du ciel, à cette heure suprême, solennelle pour tous. Si Jésus meurt, tout est fini entre Dieu et le monde, sauf pour ceux qui croiront en lui, mort et ressuscité. Il n’y a plus aucune ressource à faire valoir en faveur du monde jugé, sinon la grâce s’adressant non à lui, mais à des individus, des quiconque, comme Jean se plaît à le répéter souvent. Autre conséquence de la mort de Jésus: «Maintenant le chef de ce monde sera jeté dehors». C’est la délivrance de l’assujettissement à Satan, qui s’est constitué le chef de ce monde en conduisant tous les hommes à mettre à mort Jésus. Jusqu’ici, Satan n’avait pas encore reçu ce titre. Il sera lié pour la durée du règne du Fils de l’homme et jeté ensuite dans l’étang de feu préparé pour lui et ses anges. Déjà maintenant le croyant bénéficie de la victoire que Jésus a remportée sur Satan, en marchant dans la même obéissance que celui qui put dire, en s’avançant vers l’heure de la mort: «Le chef du monde vient, et il n’a rien en moi» (Jean 14:30).

Cependant Satan est toujours le prince de ce monde au milieu duquel nous sommes; pour lui résister, il suffit de suivre le modèle que nous avons en Christ. Bientôt il sera jeté dehors. «Le Dieu de paix brisera bientôt Satan sous vos pieds» (Rom. 16:20).

Jésus parle ensuite de sa mort en rapport avec le salut des hommes; car s’il devait rendre «impuissant celui qui avait le pouvoir de la mort, c’est-à-dire le diable», c’était pour délivrer «tous ceux qui, par la crainte de la mort, étaient, pendant toute leur vie, assujettis à la servitude» (Héb. 2:14, 15). «Et moi», dit Jésus, «si je suis élevé de la terre, j’attirerai tous les hommes à moi-même. Or il disait cela pour indiquer de quelle mort il allait mourir» (v. 32, 33). Jésus, homme parfait, n’avait plus de place sur la terre. Mais comme il voulait prendre celle de l’homme pécheur sous le jugement de Dieu, il ne pouvait entrer au ciel sans passer par la mort; aussi, rejeté de la terre, il prend place entre la terre et le ciel, sur la croix, pour attirer tous les hommes à lui, le Sauveur, pour introduire ensuite au ciel tous ceux qui auraient cru. L’œuvre de la croix s’accomplissait à l’intention de tous les hommes, non seulement des Juifs, en sorte que tous peuvent venir à Jésus et obtenir le salut.

La place que Jésus prend sur la croix est celle que représentait l’autel d’airain sur lequel les sacrifices étaient offerts dans le désert. Ni au milieu du peuple, ni dans le tabernacle, mais entre les deux, dans le parvis, il se trouvait dans le seul lieu où le pécheur pouvait se rencontrer avec un Dieu qui a les yeux trop purs pour voir le mal, dont personne n’osait s’approcher sans mourir.

Les Juifs comprenant que «élevé de la terre» indiquait la crucifixion, disent à Jésus: «Nous, nous avons appris de la loi, que le Christ demeure éternellement: et comment, toi, dis-tu qu’il faut que le fils de l’homme soit élevé? Qui est ce fils de l’homme? » (v. 34). Cette question fait voir, qu’au fond, ils admettent que Jésus fût le Christ, le Messie, puisqu’ils comprennent qu’il parle de lui et qu’ils appliquent au fils de l’homme ce qui est dit du Christ. Mais ils pensent toujours à un Christ glorieux, puisque même ceux qui l’avaient reçu ne comprenaient pas qu’il devait mourir. Cependant leurs Écritures disaient: «le Messie sera retranché et n’aura rien» (Daniel 9:26). Messie et fils de l’homme sont deux titres de la même personne, mais avec des attributions différentes, comme nous l’avons souvent remarqué. Parler du fils de l’homme, c’est parler du Messie rejeté, et, dans ce moment-là, ce rejet allait être consommé. Cependant ceux qui l’entouraient pouvaient encore profiter de la présence de Jésus comme lumière, afin de sortir de leur condition ténébreuse, où Jésus allait les laisser. C’est ce qu’il leur dit, au lieu de leur expliquer qui était le fils de l’homme: «Encore pour un peu de temps la lumière est au milieu de vous; marchez pendant que vous avez la lumière, afin que les ténèbres ne s’emparent pas de vous; et celui qui marche dans les ténèbres ne sait où il va. Pendant que vous avez la lumière, croyez en la lumière, afin que vous soyez fils de lumière. Jésus dit ces choses, et s’en allant, il se cacha de devant eux» (v. 35, 36). Ce dont ils avaient besoin, c’était non de savoir qui était le fils de l’homme, mais bien de profiter de celui qu’ils avaient devant leurs yeux, de profiter de la lumière, comme l’aveugle-né, en croyant en lui, l’envoyé de Dieu, «la vraie lumière qui, venant dans le monde, éclaire tout homme» (chapitre 1:9). Les ténèbres allaient s’emparer d’eux. Vers la fin de ce jour, ils pouvaient encore profiter des derniers rayons du soleil sur le point de se cacher, au lieu de discuter sur sa personne, car «Jésus dit ces choses, et s’en allant, il se cacha de devant eux».

Dans les temps absolument semblables où nous vivons, la lumière de l’Évangile brille encore sur ce monde. Mais au lieu de croire simplement la Parole de Dieu, on discute sur sa valeur; on ne croit pas à son inspiration divine; on veut expliquer ce qu’il faut en croire et ce qu’il faut en rejeter. On raisonne aussi sur la personne de Jésus; on doute de sa résurrection, même de celle de Lazare, et ainsi de suite. Pendant ce temps, les jours s’écoulent et l’on s’approche rapidement du terme de la patience de Dieu, du jour où la voix de la grâce se taira pour laisser dans les ténèbres qu’ils auront choisies ceux qui n’en ont pas profité. De ces ténèbres, qu’on appelle progrès et lumière, on veut se servir pour éclairer ce que Dieu dit par sa Parole. Quoique nous soyons à la fin du jour où brille la lumière de l’Évangile de la grâce de Dieu, il est encore temps de croire comme Jésus le dit aux Juifs: «Pendant que vous avez la lumière, croyez en la lumière, afin que vous soyez fils de lumière». On n’est pas sauvé par l’intelligence, ni par le raisonnement, mais par la foi semblable à celle d’un petit enfant, la foi au Sauveur, mort pour nos péchés et ressuscité pour notre justification.

 

Endurcissement du peuple

(v. 37-43) — «Quoiqu’il eût fait tant de miracles devant eux, ils ne crurent pas en lui», est-il dit au verset 37. Les miracles que le Seigneur avait faits avaient pour but d’amener le peuple à croire en lui.

Il est dit au chapitre 15:24: «Si je n’avais pas fait parmi eux les œuvres qu’aucun autre n’a faites, ils n’auraient pas eu de péché... Mais maintenant ils n’ont pas de prétexte pour leur péché», celui qui consiste à rejeter le Christ. Au chapitre 2:11, il est dit: «Jésus fit ce commencement de ses miracles à Cana de Galilée, et il manifesta sa gloire; et ses disciples crurent en lui». Puis il continua de faire tous les miracles qui prouvaient au peuple qu’il était bien l’envoyé de Dieu pour leur délivrance. Quelques-uns crurent en lui tout le long de son ministère; mais la nation demeura dans l’incrédulité où elle se trouve encore, jugement de Dieu prononcé par Ésaïe: «Seigneur, qui est-ce qui a cru à ce qu’il a entendu de nous, et à qui le bras du Seigneur a-t-il été révélé? » (chap. 53:1). Ils ne pouvaient pas croire, parce qu’Ésaïe dit encore: «Il a aveuglé leurs yeux et il a endurci leur cœur, afin qu’ils ne voient pas des yeux, et qu’ils n’entendent pas du cœur, et qu’ils ne soient convertis, et que je ne les guérisse» (voir Ésaïe 6:9, 10).

On objectera que les Juifs ne pouvaient croire, puisque Dieu les avait endurcis et aveuglés, pour qu’ils ne fussent pas convertis. Les prophéties qui annonçaient cet aveuglement, prononcées depuis près de huit cents ans, ne s’accomplirent que lorsque Dieu eut fait tout ce qui était possible pour en éviter l’exécution. Il avait usé d’une longue patience envers ce peuple tout au travers de son histoire; les prophètes l’avaient sans cesse sollicité à revenir à l’Éternel. Depuis qu’Ésaïe avait prononcé sa prophétie, le peuple était allé en captivité à Babylone, en avait été ramené pour recevoir le Messie qui, enfin, apparut tel qu’il avait été annoncé et, comme nous venons de le voir, fit tout le nécessaire pour être reçu et accomplir les bénédictions promises; tout fut inutile. «Quoiqu’il eût fait tant de miracles devant eux, ils ne crurent pas en lui», voilà le résultat que Dieu a obtenu. Le Seigneur eût-il continué son ministère encore un siècle, le résultat aurait été le même; ce qui devait être fait l’avait été selon la mesure de Dieu, qui est parfaite, comme tout ce que Dieu est et fait, et qui ne pourrait être dépassée sans faire tort à ses perfections. L’incrédulité est désormais la part de ce peuple qui demeure sans excuses. Un autre viendra en son propre nom, dit le Seigneur au chapitre 5:43, et ils le recevront, c’est l’Antichrist; il accomplira des miracles et des signes et des prodiges de mensonge (2 Thess. 2:9); même, comme Élie, il fera tomber le feu du ciel (Apocalypse 13:13); ils le recevront pour leur jugement final, part aussi de la chrétienté apostate, lorsque le temps de la patience de Dieu sera écoulé, ce qui aura lieu très prochainement.

Le verset 39 rappelle dans quelle circonstance la prophétie annonçant l’aveuglement judiciaire du peuple avait été prononcée: «Ésaïe dit ces choses parce qu’il vit sa gloire et qu’il parla de lui». Au chapitre 6 de ce prophète (v. 1 à 5), nous lisons: «L’année de la mort du roi Ozias, je vis le Seigneur assis sur un trône haut et élevé, et les pans de sa robe remplissaient le temple. Des séraphins se tenaient au-dessus de lui; ils avaient chacun six ailes: de deux ils se couvraient la face, et de deux ils se couvraient les pieds, et de deux ils volaient. Et l’un criait à l’autre, et disait: Saint, saint, saint, est l’Éternel des armées; toute la terre est pleine de sa gloire! Et les fondements des seuils étaient ébranlés à la voix de celui qui criait, et la maison était remplie de fumée. Et je dis: Malheur à moi! car je suis perdu; car moi, je suis un homme aux lèvres impures, et je demeure au milieu d’un peuple aux lèvres impures; car mes yeux ont vu le roi, l’Éternel des armées». Tel était donc celui que le prophète voyait dans sa majesté, sa sainteté, celui dont il est dit que les cieux mêmes ne sont pas purs à ses yeux. L’Esprit de Dieu déclare par Jean que c’était le Seigneur Jésus. «Ésaïe dit ces choses parce qu’il vit sa gloire et qu’il parla de lui». Ce Jésus rejeté, méprisé, qui, quelques jours plus tard, sera condamné, fouetté, couronné d’épines, crucifié; ce Jésus auquel aujourd’hui on refuse la divinité et que l’on croit estimer beaucoup en l’appelant le meilleur des hommes, un modèle, ou bien que l’on rejette ouvertement, est le roi de gloire, l’Éternel, tel que l’Ancien Testament le présente, le créateur des cieux et de la terre, mais venu dans ce monde, revêtu de l’humanité, au milieu d’hommes pécheurs et perdus, comme Ésaïe se voyait dans sa présence glorieuse, pour apporter la vie, la lumière, l’amour. Un homme, mais Dieu manifesté en chair, venu dans l’humilité la plus profonde, afin d’être accessible à tous; «il s’est anéanti» comme Dieu, ayant pris la forme d’esclave, trouvé en figure comme un homme. Il a quitté la gloire qui aurait foudroyé quiconque s’en serait approché, la lumière inaccessible que nul œil n’a vu ni ne peut voir. C’est celui-là que les hommes ont rejeté et rejettent encore, après avoir vu tout ce qui pouvait être vu pour le faire reconnaître en puissance, en amour, lui qui s’intéressait à toutes leurs peines et à toutes leurs douleurs. Par sa présentation, l’épreuve de l’homme en Adam était parfaite; inutile d’attendre encore, puisque son cœur ne se laissait pas toucher par une telle grâce, et qu’il n’avait pas d’yeux pour voir la beauté du Seigneur. Il n’était pas digne de Dieu de prolonger cette épreuve; il ne lui restait donc qu’à exécuter son jugement. Mais, amour suprême, insondable, divin, c’est ce Jésus glorieux, merveilleux, rejeté, haï, qui va le subir, pour sauver cet homme si haïssable aux yeux de Dieu à cause de ses péchés.

Ô Jésus, ton amour et ta grâce ineffables,
Qui les exaltera, si ce n’est ces coupables?

Cependant, à ce dernier moment, plusieurs des chefs crurent en lui; «mais à cause des pharisiens ils ne le confessaient pas, de peur d’être exclus de la synagogue; car ils ont aimé la gloire des hommes plutôt que la gloire de Dieu» (v. 42, 43). Qu’était la foi de ces hommes? Insuffisante pour marcher à la suite du Christ rejeté, suffisait-elle pour être sauvé? Dieu le sait. Il faut ou Christ ou le monde; on ne peut avoir les deux. Moise avait estimé «l’opprobre du Christ un plus grand trésor que les richesses de l’Égypte; car il regardait à la rémunération» (Héb. 11:26). Celle-ci aura lieu au jour où la marche de chacun sera manifestée, où ceux qui cherchent la gloire de Dieu pendant qu’elle n’a aucun prix pour les hommes, recevront leur récompense. Mais quel jour pour ceux qui auront eu honte du Seigneur, préférant la gloire des hommes qui l’ont rejeté lorsqu’il vint dans ce monde, et pour lesquels, aujourd’hui encore, il n’a pas d’attrait! Pour ceux qui restent encore indécis de suivre le Seigneur, c’est le moment aujourd’hui de vaincre les obstacles qu’ils trouvent sur leur route, car bientôt il sera trop tard.

 

Dernier appel du Seigneur

(v. 44-50) — Avant de terminer son ministère public, Jésus fait encore un appel qui résume tout l’évangile tel que Jean le présente. «Et Jésus s’écria et dit: Celui qui croit en moi, ne croit pas en moi, mais en celui qui m’a envoyé; et celui qui me voit, voit celui qui m’a envoyé» (v. 44, 45). Dans trois circonstances importantes, nous entendons crier Jésus dans cet évangile: 1° au chap. 7:37: «Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive». C’est à lui seul qu’il faut aller, car il n’y a aucune ressource ailleurs. 2° Au tombeau de Lazare (11:43). Jésus crie et sa voix puissante pénètre dans le domaine de la mort; et 3° ici, il affirme pour la dernière fois ce qu’il est venu faire dans le monde et quelles en seront les conséquences pour ceux qui le rejettent. Il affirme encore son identité avec Dieu son Père. En croyant en lui et en le voyant, on croit et on voit celui qui l’a envoyé, tant il était l’expression parfaite de Dieu le Père. En le rejetant on rejetait celui qui l’a envoyé, Dieu lui-même. Dans le verset 46, il rappelle qu’il est la lumière venue dans le monde, afin que quiconque croit ne demeure pas dans les ténèbres. Au verset 47, il est venu, non pour juger, mais pour sauver le monde. Dans les versets 48 et 50, il montre combien c’est grave de le rejeter et de ne pas recevoir ses paroles, car au dernier jour c’est la parole que Jésus a dite qui jugera celui qui ne l’a pas crue. Le sujet de condamnation sera la Parole qui aurait donné le salut, celle du Père, car le Seigneur n’avait pas parlé de lui-même; son Père qui l’avait envoyé lui avait commandé ce qu’il devait dire, et comment il devait le dire, en sorte que tout ce qu’il avait dit et fait était l’expression de Dieu lui-même, en grâce; car le but de Dieu dans tout ce que le Fils avait dit et fait de sa part était «la vie éternelle». Jésus termine en disant: «Les choses donc que moi je dis, je les dis comme le Père m’a dit». Quelle responsabilité effrayante pour celui qui ne croit pas la parole qui apporte aux hommes la vie éternelle! Ce sera terrible, au jour du jugement, de se trouver en présence du Sauveur, avec le souvenir de l’avoir vu et entendu ou d’avoir eu, par la Parole de Dieu, la connaissance de ce qu’il a dit et de ce qu’il a fait, afin que celui qui croit ne vienne pas en jugement.

Le service du Seigneur est terminé pour le monde avec ce chapitre 12. Dans les chapitres 13 à 17, nous avons ses enseignements aux disciples en vue de son départ; il ne s’y trouve rien pour le monde, sinon sa condamnation.