Hébreux

Chapitre 12

(v. 1). Nous retrouvons encore ici ce mot «c’est pourquoi», souvent employé par l’auteur de l’épître, et qui indique que ce qui suit est une conséquence de ce qu’il vient de dire. Il va donc exposer les exhortations pratiques découlant de son enseignement et s’appliquant d’une manière spéciale à l’état d’âme des croyants hébreux et aux dangers qu’ils couraient. Il s’applique à ranimer leur zèle et à les encourager.

La multitude des justes mentionnés dans le chapitre précédent, et comparée à une nuée, était composée de témoins qui attestaient tous cette grande vérité que «le juste vivra de foi». Les Hébreux devaient marcher sur les traces de ces hommes. Mais l’auteur couronne le tableau qu’ils présentent, en plaçant devant les yeux de ceux auxquels il écrit et devant les nôtres, Celui qui marche à la tête de tous ces témoins, le témoin par excellence, devant lequel pâlit le témoignage de tous les autres, quelque grand et apprécié qu’il eût été aux yeux de Dieu. Ce témoin est Jésus: Il est le Chef et le consommateur de la foi qui a caractérisé tous les justes. Il en a donné l’exemple parfait; il en est le Chef; il en a parcouru toute la carrière dans toute sa perfection. Ainsi il en est le consommateur. Les justes avant lui avaient été éprouvés, les uns d’une manière, les autres d’une autre; chacun, selon la position où il s’était trouvé, avait parcouru une partie du chemin de la foi, et avait là rendu témoignage; Jésus a parcouru d’un bout à l’autre la carrière, éprouvé dans tout ce en quoi la nature humaine peut l’être. Et en tout et par tout, que ce fût par les hommes, par Satan, ou même par l’abandon de Dieu, il a persévéré constamment dans l’obéissance, la patience, la confiance, montrant en même temps aussi l’énergie dans l’amour que produit la foi, quand il a renoncé à toute gloire et a subi la croix. En lui, la foi a été consommée, rendue parfaite.

Non seulement son exemple parfait établit entre lui et les témoins du chap. 11, une différence profonde; il en est une autre. Ceux-ci sont morts et ne sont pas encore parvenus à la perfection, tandis que lui, le Chef et le consommateur de la foi, a été ressuscité et est assis à la droite du trône de Dieu. Il est donc arrivé personnellement à la perfection; il est couronné de gloire et d’honneur; il a atteint le but, après avoir glorifié parfaitement Dieu dans son chemin sur la terre. Nous sommes donc exhortés à fixer nos regards sur lui, là où il est arrivé — tout en nous souvenant du chemin dans lequel il a marché. Sa séance actuelle à la droite de Dieu, non seulement comme ayant fait par lui-même la purification des péchés, mais comme consommateur de la foi, nous montre l’issue glorieuse d’un tel chemin. Elle nous dit: «Voilà où aboutit le chemin de la foi: courez donc dans ce chemin». Cette issue est placée devant nous pour nous encourager.

Ainsi, c’est pour courir avec patience et persévérance, et sans nous lasser, la course qui est devant nous, que d’un côté nous est présenté, comme derrière nous, pour nous stimuler, l’exemple de tous les témoins qui nous ont précédés, et que, d’un autre côté, pour nous encourager et nous attirer, nous avons comme but et comme phare conducteur, la place glorieuse où est arrivé le Chef et le consommateur de la foi.

C’est de la course qu’il est question ici; plus loin, il s’agit du combat (v. 4). La course ne veut pas dire la carrière que chaque homme a à parcourir ici-bas; de même que l’achèvement de la course n’est pas la fin de cette carrière. Tous ne courent pas la course, comme aussi on peut ne point l’achever. Paul, en Actes 20:24, exprime son désir d’achever sa course, et en 2 Tim. 4:7, il dit: «J’ai achevé la course». Il emploie souvent, comme figure de la vie chrétienne, ces courses et ces luttes qui avaient lieu chez les Grecs dans leurs jeux publics, et où les coureurs et les combattants rivalisaient d’ardeur pour remporter le prix (voyez 1 Cor. 9:24, 25; Phil. 3:14).

Deux choses sont requises de celui qui veut courir avec avantage dans la course proposée: c’est que rien ne pèse sur lui pour l’accabler; c’est ensuite que rien ne s’attache à lui pour l’arrêter. On ne peut courir avec un fardeau; on ne le saurait non plus si des objets étrangers vous enlacent. Les fardeaux sont les difficultés et les soucis de toutes sortes que présente le chemin de la vie; ce qui embarrasse l’esprit ou tient au cœur dans les choses terrestres. Il s’agit de les mettre bas, de les rejeter. Mais il est une autre chose qu’il faut absolument écarter: c’est le péché. Il nous enveloppe aisément, car la chair est en nous et les objets que le monde présente agissent sur elle, et les convoitises du cœur sont éveillées et excitées. Si l’on n’y prend garde, on est facilement enlacé dans les liens du péché et ainsi arrêté dans sa course. Il faut donc le rejeter purement et simplement, de même que les fardeaux. Mais comment cela aura-t-il lieu? En fixant les yeux sur Jésus, car le cœur ayant alors un objet divin devant lui, se trouve dégagé et délivré de tout ce qui le chargeait, le détournait et l’arrêtait dans sa course. En effet, en Christ se trouve non seulement ce qui répond aux affections de la vie et de la nature nouvelle que nous possédons, mais aussi la puissance pour écarter ce qui n’y répond pas et qui est de la chair.

Ayant ainsi rejeté tout fardeau et le péché, on est allégé pour courir; on peut courir et il faut courir toujours, avec persévérance. On a besoin de patience pour fournir cette course où les difficultés abondent, où les obstacles sont nombreux, mais on a en vue le but glorieux qui, à mesure que l’on avance, apparaît plus proche et devient plus précieux à l’âme fidèle.

Le v. 2 nous dit que notre modèle parfait, Jésus, avait, dans son chemin d’épreuves, une joie placée devant lui. Il était entré en grâce dans un sentier tel, qu’il avait besoin comme homme, d’encouragement par la vue du but qui lui était proposé à la fin de ses souffrances et de ses humiliations. Il voyait que son chemin le conduisait jusqu’à la mort et au tombeau (Ps. 16:10); mais il savait aussi que, par la résurrection, Dieu lui ferait connaître le chemin de la vie, et qu’il arriverait ainsi devant sa face, où il y a des rassasiements de joie et des plaisirs pour toujours. (v. 11). Sans doute que le Seigneur avait aussi devant lui la joie de nous avoir, comme prix de ses souffrances et de sa victoire sur la mort et Satan; mais ici, il s’agit de son chemin personnel comme Chef et consommateur de la foi et comme notre parfait modèle dans ce chemin. C’est donc en vue de cette joie dans la gloire de Dieu qu’il a «enduré la croix» et méprisé «la honte» qui s’attachait à ce supplice. Ce n’est pas qu’il ne sentît profondément l’offense faite à sa sainte personne. Il a «enduré», supporté «la contradiction» des pécheurs contre lui-même. Tout contredisait, dans ce monde, l’amour, la dignité et la sainteté manifestés dans sa personne. Sa grâce ne rencontrait qu’inimitié, son autorité que révolte, et sa sainteté que péché. La haine des hommes le poursuivit jusque sur la croix. Sur sa tête auguste fut placée la couronne d’épines, lui qui, Roi des rois et Seigneur des seigneurs, devait porter la couronne de gloire; il fut lié et conduit au supplice comme un vil malfaiteur, lui devant qui les anges se prosternaient; il fut jugé et mis à mort, lui, le souverain juge des vivants et des morts. On rejeta ses paroles de grâce, on attribua ses œuvres à Satan; à chaque pas de sa vie, il ne rencontra que contradiction et opposition de la part de l’homme pécheur. Et tout finit par la honte de la croix. Mais il avait devant lui la joie dans la gloire, la joie suprême où il entrerait après avoir accompli parfaitement la volonté de Dieu; il a donc tout enduré, tout méprisé en fait d’ignominie, et le but est atteint. Il est assis à la droite du trône de Dieu; il est couronné de gloire et d’honneur: fixons donc nos regards sur lui, afin que nous ne nous lassions pas dans notre course et que nous ne nous découragions pas dans nos âmes à persévérer dans le combat. Notre divin Chef a marché devant nous; il a combattu et vaincu; combattons aussi, et «si nous souffrons avec lui, nous serons glorifiés avec lui».

Au v. 4, nous arrivons au combat contre le péché. Le v. 1 nous parlait du péché qui nous enveloppe aisément. Il s’agit là de ce qui vient de l’intérieur; au v. 4, c’est contre le péché qui vient du dehors qu’il faut combattre. Dans ce sens, Christ a combattu contre le péché, quand il endurait la contradiction des pécheurs contre lui-même. «Vous n’avez pas encore résisté jusqu’au sang en combattant contre le péché». Les chrétiens hébreux avaient enduré de grandes souffrances (voir chap. 10:32-34), mais ils n’avaient pas encore eu à donner leur vie, à sceller de leur sang leur témoignage à la vérité. Christ l’avait fait, ainsi que plusieurs des témoins dont il est question au chap. 11. Pourquoi donc se décourager et se relâcher? Nous sommes les témoins de Dieu dans ce monde de péché; les témoins du bien au milieu du mal. Toutes sortes de souffrances se rattachent à ce témoignage. Le monde qui «gît dans le méchant» nous enserre et nous presse de toutes parts; on résiste: mais c’est en souffrant. On endure l’opprobre, le dédain, la malveillance, des pertes, et il s’agit de résister, de tenir ferme, fût-ce même jusqu’à la mort. Christ l’a fait; il a mieux aimé mourir que de ne pas glorifier Dieu en tous points. Les Hébreux, au contraire, s’étaient relâchés devant ces souffrances attachées au conflit entre le bien et le mal. Nous aussi, hélas! trop souvent nous nous relâchons. Mais alors Dieu nous vient en aide. Il nous discipline; il fait notre éducation; il bride notre volonté pour amener la bénédiction dans nos âmes, et pour nous rendre capables de combattre réellement pour lui contre le mal.

(v. 5, etc.). L’apôtre développe donc maintenant ce sujet si important de la discipline de Dieu à l’égard de ses enfants. On a la tendance de restreindre la discipline aux châtiments; mais la discipline comprend tout ce que comporte l’éducation, et ainsi la verge y est aussi comprise. La discipline renferme tout ce qu’embrasse cette merveilleuse déclaration: «Il ne retire pas ses yeux de dessus le juste» (Job 36:7).

Dans les v. 5 et 6, qui sont une citation de Prov. 3:11, 12, et dans les suivants, nous avons d’abord le fait que la discipline est une conséquence de la relation de fils dans laquelle se trouve à l’égard de Dieu celui envers qui elle est exercée. La souffrance qu’ils endurent est donc, non pas l’effet d’un châtiment, mais le signe du plus tendre amour de la part de Dieu. De là l’expression «discipline» ou «correction». C’est un père sage qui corrige son enfant, tout en l’aimant et parce qu’il l’aime. Cela posé, nous sommes exhortés à éviter deux écueils: l’un, c’est de passer légèrement sur les épreuves qui nous sont dispensées, ne prenant pas garde que, par elles, Dieu veut nous enseigner quelque chose, nous reprendre et nous former, ou de faire les stoïques dans les afflictions, et ainsi, de «mépriser la discipline du Seigneur». L’autre écueil, c’est de nous laisser aller au découragement; de nous laisser écraser sous le poids des épreuves, comme si tout ce qui nous arrive ne provenait pas de l’amour parfait de notre Père pour nous: «Nous savons que toutes choses travaillent ensemble pour le bien de ceux qui aiment Dieu» (Rom. 8:28). Remarquons en passant, que le v. 6 signale une différence entre la discipline qui a pour but l’éducation et la verge qui corrige en châtiant pour une faute: «Celui que le Seigneur aime, il le discipline, et il fouette tout fils qu’il agrée».

(v. 7). Sous l’administration paternelle de Dieu, on endure des peines, mais non de la part d’un père irrité. L’Écriture ne connaît pas l’expression de «la colère du Père». Ce sont les soins de l’amour paternel de notre Dieu qui s’exercent envers nous, et non la verge de sa colère. La discipline à laquelle nous sommes soumis est une preuve de la relation de fils. Un bâtard n’a point de place dans la maison paternelle, ni de part dans les soins qui appartiennent à cette maison, mais nous, nous sommes la famille de Dieu.

(v. 9 et 10). Les pères de notre chair, ceux desquels nous tenons notre vie naturelle, nous ont disciplinés, et nous les avons respectés. Nous les avons eus comme éducateurs pendant le peu de temps de notre enfance et de notre première jeunesse, et ils nous disciplinaient selon qu’ils le trouvaient bon. Leur sollicitude pouvait se relâcher, n’était pas constante, et l’éducation qu’ils nous donnaient était sujette à bien des imperfections: leurs vues pouvaient être erronées; ils pouvaient se tromper dans la direction à nous donner. Tout autrement en est-il de Dieu, le Père des esprits. Cette expression est en contraste avec «les pères de notre chair». Ceux-ci nous ont engendrés, mais notre esprit, ce qui nous fait vivre, ce par quoi aussi nous sommes en relation avec Dieu, c’est Dieu de qui nous le tenons. «L’esprit retourne à Dieu qui l’a donné» (Eccl. 12:7). Il est le «Dieu des esprits de toute chair» (Nomb. 16:22; 27:16). C’est dans ce sens qu’il est appelé le «Père des esprits»; de lui ils tirent leur origine, de même que nos corps la tirent de nos pères selon la chair. Or si nous avons respecté ceux-ci, «ne serons-nous pas beaucoup plutôt soumis au Père des esprits», pour nous incliner sous sa discipline? Soumis ainsi, «nous vivrons».

Ces dernières paroles peuvent avoir deux sens. D’un côté, la discipline développe pratiquement la vie spirituelle dans l’âme qui est exercée par elle, et qui s’y soumet avec confiance en Celui qui l’applique avec sagesse et amour (voir Rom. 5:3-5). On vit par ces choses, comme le dit Ézéchias: «J’irai doucement, toutes mes années, dans l’amertume de mon âme. Seigneur, par ces choses on vit, et en toutes ces choses est la vie de mon esprit» (Ésaïe 38:15, 16). — D’un autre côté, la discipline peut aller jusqu’à la mort du corps. Le chap. 36 de Job nous parle de la discipline de Dieu à l’égard du juste. Après avoir dit: «Il ne retire pas ses yeux de dessus le juste», il ajoute: «Et si, liés dans les chaînes, ils sont pris dans les cordeaux du malheur, il leur montre ce qu’ils ont fait, et leurs transgressions, parce qu’elles sont devenues grandes; et il ouvre leurs oreilles à la discipline, et leur dit de revenir de l’iniquité. S’ils écoutent et le servent, ils accompliront leurs jours... Mais s’ils n’écoutent pas, ils s’en iront par l’épée, et expireront sans connaissance». Ainsi la soumission à la discipline fait éviter cette fin fatale: «nous vivrons», pour jouir du fruit béni de ces épreuves par lesquelles un tendre Père juge bon de nous faire passer.

(v. 10, 11). Ce fruit nous est montré dans les v. 10 et 11. Nos pères selon la chair, en nous disciplinant pendant un peu de temps, le faisaient suivant leurs pensées, «selon qu’ils le trouvaient bon», sans avoir toujours dans leurs vues bornées un but répondant à notre vrai bien, ou n’y atteignant pas, faute de connaître ou d’appliquer les moyens d’y arriver. Notre Dieu, le Père des esprits, désire notre vrai bien, un bien en dehors et au-dessus de tout ce que la terre peut offrir. Il nous discipline «pour notre profit», avec une sagesse parfaite; connaissant et choisissant les moyens propres pour nous faire arriver au but qu’il se propose à notre égard, et ne se lassant pas de les employer: faisant travailler toutes choses à notre bien. Les épreuves sont diverses pour chacun, mais toutes tendent pour chacun à ce grand but de la discipline: «afin que nous participions à sa sainteté».

La sainteté de Dieu, quelle pensée! La séparation absolue de tout mal, parce qu’il est le bien absolu; cette pureté inaltérable qu’aucune souillure ne peut atteindre; cette lumière qu’aucunes ténèbres ne peuvent obscurcir; voilà la sainteté, l’état moral auquel Dieu veut que nous participions. Et c’est pour nous dégager de tout ce qui pourrait être une entrave à la jouissance toujours plus grande de cette condition qu’il nous discipline! N’est-ce pas une preuve manifeste de sa tendre sollicitude pour nous? En Christ, nous avons devant Dieu une position de sainteté parfaite: «Saints et irréprochables devant lui en amour» (Éph. 1). Mais il veut que nous lui ressemblions pratiquement; que moralement notre état réponde à ce qu’il est; et c’est pour nous le bonheur qui ne peut se trouver que dans la proximité du Dieu saint et bienheureux dans sa sainteté. Quelle grâce que ses soins en discipline aient pour nous un semblable but! Puissions-nous nous y soumettre avec une humble confiance!

(v. 11). Notre Dieu sait que ces exercices douloureux de sa discipline paternelle ne sauraient être, alors que nous y passons, un sujet de joie. Si nous ne les ressentions pas, s’ils ne produisaient pas la tristesse, quels fruits pourraient-ils porter? Le chrétien n’est pas un stoïque qui, orgueilleusement, brave la douleur. Il sent les coups, mais il connaît la main qui les inflige, et en les sentant, il regarde au résultat béni qui en sera la suite. Lorsqu’une fois la volonté a été brisée, que nous avons saisi que «toutes choses travaillent ensemble» à notre bien (Rom. 8:28) , que «notre légère tribulation d’un moment» est destinée à opérer «pour nous, en mesure surabondante, un poids éternel de gloire» (2 Cor. 4:17) , alors est produit le fruit paisible de la justice pratique, la réalisation dans la vie de cette sainteté dont nous sommes faits participants. Le fruit de la discipline pour ceux qui sont exercés par elle, est donc un état d’âme paisible dans la soumission à la volonté de Dieu et dans une marche de séparation pour lui. Le mal agite et rend malheureux: «Il n’y a pas de paix, dit mon Dieu, pour les méchants» (És. 57:21); mais le bien, la pratique de la justice rend paisible et heureux: «L’œuvre de la justice sera la paix, et le travail de la justice, repos et sécurité à toujours» (És. 32:17). Que le Seigneur nous donne, quand nous passons par l’épreuve, de ne jamais perdre de vue le but béni qu’il poursuit pour nous — nous dégager, nous purifier de tout ce qui serait un obstacle à ce que nous jouissions pleinement de sa présence et de sa communion!

(v. 12). Nous retrouvons de nouveau un «c’est pourquoi». L’apôtre qui vient de placer devant les yeux de ses lecteurs les grandes vérités touchant le but béni de l’épreuve, en tire comme conséquence l’encouragement qui suit. Tout ce qui est dispensé provenant de l’amour du Père, nous pouvons prendre courage. «Redressez les mains lassées et les genoux défaillants». C’était l’exhortation que l’Esprit Saint, par la bouche d’Ésaïe, adressait à Israël, en lui annonçant la bénédiction à venir, quand son Dieu viendrait le sauver. Combien, pour les Hébreux, qui connaissaient les Écritures, cette citation était propre à relever leurs esprits! Ils pouvaient, sous la discipline actuelle du Père, regarder à la bénédiction qui en serait la suite.

Les mains lassées ont peut-être trait à la prière, en rapport avec cette parole de 1 Tim. 2:8: «Je veux donc que les hommes prient en tout lieu, élevant des mains saintes». Il est certain que, si l’on se décourage sous la discipline, ne comprenant pas le but de Dieu, on peut se lasser de prier, et qu’alors les genoux défaillent et la marche chrétienne devient languissante et chancelante. Les mains lassées et les genoux défaillants sont l’indice pour le corps d’un affaiblissement, d’un affaissement du système. Appliquées comme figure à l’âme, ces expressions désignent aussi la faiblesse, le relâchement, produits par le doute, par le manque de foi et de confiance en Dieu. C’est un état d’âme maladif et qui devient dangereux, si un remède énergique n’y est pas appliqué. L’épître nous l’indique, ce remède. Ce n’est pas d’attendre passivement qu’un changement se produise, mais c’est de s’appuyer fermement sur ce qui a été dit précédemment touchant les tendres soins de Dieu. Alors, on devient capable de redresser les mains et les genoux; une vie nouvelle circule dans l’âme quand on saisit, par la foi, Dieu et ses voies envers nous; on retrouve une vigueur qui nous fait aussi faire à nos pieds «des sentiers droits» (v. 13), dans lesquels on marche d’un pas ferme et non chancelant. Ces sentiers droits sont ceux dans lesquels nous conduit la parole de Dieu, à part du péché, du monde et de la recherche des avantages que la terre peut donner; sentiers dans lesquels on regarde droit devant soi vers les choses divines et célestes sans hésiter et se détourner, sans vouloir allier la terre avec le ciel, le monde avec Christ. Ce sont les sentiers de la foi. «Que tes yeux», disent les Proverbes, «regardent droit en avant, et que tes paupières se dirigent droit devant toi. Pèse le chemin de tes pieds, et que toutes tes voies soient bien réglées» (Prov. 4:25, 26).

En marchant ainsi courageusement à travers les difficultés, portant, à travers tout, un cœur joyeux, témoignage d’une réelle communion avec Dieu, on sera un encouragement pour les faibles; en sorte que ceux qui suivent en boitant ne se dévoient pas, mais soient guéris. Ils verront que c’est aussi leur privilège de poursuivre leur chemin dans les «sentiers droits» où le cœur est au large, et où la bénédiction abonde. Un bon exemple est un meilleur stimulant que la répréhension même.

(v. 14). Nous sommes exhortés ici à rechercher ou poursuivre deux choses: la paix avec tous, et la sainteté sans laquelle nul ne verra le Seigneur. La première chose a rapport à nos relations les uns avec les autres, et la seconde a rapport à nos relations avec Dieu. Poursuivre la paix, est s’efforcer d’éviter ces dissensions entre chrétiens qui nuisent au développement de la vie spirituelle, d’apporter en tout un esprit d’humilité et de douceur qui écarte les occasions d’irritation et de froissements et qui apaise les querelles. Pour cela, on comprend qu’il est essentiel que tout d’abord il y ait un état d’âme paisible, résultat d’une marche avec Dieu, dans la dépendance. Si la paix de Dieu garde mon âme dans la jouissance de Christ (Phil. 4:6, 7), si la paix de Christ préside dans mon cœur (Col. 3:15), il me sera aisé de poursuivre la paix avec tous. Je l’apporterai avec moi, là où j’irai; mes pieds seront chaussés de la préparation de l’évangile de paix (Éph. 6:15), et au lieu d’attiser les mésintelligences, je procurerai la paix, comme il convient à un fils de Dieu, du Dieu de paix (Matt. 5:9). Quelqu’un a dit qu’un homme heureux est facilement aimable. Si je jouis dans mon âme de la communion avec le Dieu de paix, je suis heureux, et ce bonheur me rend aisé d’être doux, bienveillant, plein de support envers les autres.

Mais cette paix avec tous ne doit jamais s’obtenir aux dépens de la sainteté, aux dépens de ce qui touche nos rapports avec Dieu. C’est simultanément que nous avons à poursuivre ces deux choses. Nous savons ce qu’il faut entendre par la sainteté pratique, celle dont il est question ici. C’est la séparation pour Dieu de toute souillure, de tout ce qui est mal (2 Cor. 6:17, 18; 7:1), et en même temps une marche dans tout ce qui est selon Dieu. Partout nous y sommes exhortés (1 Pierre 1:15, 16), et Dieu lui-même nous est proposé comme exemple et modèle, et comme motif à la sainteté. Sans elle, il n’y a pas de communion possible avec Dieu; nous avons déjà le privilège ici-bas de le voir, de le contempler, de jouir de lui par la foi et dans la puissance de l’Esprit, mais jamais en dehors de la sainteté pratique. Si nous cédons à quelque chose qui porte atteinte à la sainteté, notre vue spirituelle s’obscurcit, comme aussi notre jouissance des choses de Dieu est altérée. On comprend donc que la sainteté pratique que nous avons à poursuivre ici-bas, n’est pas d’une autre nature que celle — parfaite à tous égards, sans altération possible (Apoc. 4:6) — dont nous jouirons dans le ciel, et qui seule nous rendra possible de voir le Seigneur. Nous avons donc à la poursuivre, à la rechercher, à y persévérer ici-bas jusqu’à ce que nous soyons placés «irréprochables devant sa gloire avec abondance de joie» (Jude 24). «Bienheureux ceux qui sont purs de cœur», dit le Seigneur, «car c’est eux qui verront Dieu» (Matt. 5:8). «Quiconque a cette espérance en lui se purifie, comme lui est pur» (1 Jean 3:3), et la marche dans la sainteté pratique aboutit à la vie éternelle en gloire (voyez Rom. 6:22). Combien il est essentiel dans nos temps de relâchement de nous souvenir avec sérieux de cette exhortation: «Poursuivez la sainteté»! Est-ce que je la poursuis; est-ce la chose qui occupe mon âme, que d’être en tout gardé à part pour mon Dieu?

(v. 15, 16). «Veillant», parole d’avertissement bien motivée par les trois dangers signalés ici et dans lesquels le manque de vigilance nous ferait aisément tomber, nous écartant ainsi de la voie de la sainteté.

Premier danger signalé: «De peur que quelqu’un ne manque de la grâce de Dieu». La grâce de Dieu qui nous a introduits dans le chemin de la bénédiction, peut seule aussi nous y faire marcher et persévérer, et nous garder du mal. Aussi les apôtres dans leurs lettres souhaitent-ils la grâce aux saints auxquels ils écrivent; ils les exhortent à persévérer dans la grâce de Dieu; on est recommandé à cette grâce, et exhorté à se fortifier dans la grâce qui est dans le Christ Jésus. Ainsi paix, joie, sécurité, force, tout découle de cette grâce, de cette disposition du cœur de Dieu qui l’incline vers nous; nous y trouvons tout ce qui est nécessaire pour la vie chrétienne, pour la marche dans la sainteté. Mais si un cœur vient à l’oublier, s’il ne s’appuie plus sur elle, s’il n’en jouit plus, en un mot, s’il vient à en manquer — non que ce soit elle qui lui manque, car Dieu reste le même, mais parce qu’il a négligé ce précieux trésor, alors il est ouvert au mal: quelque cause lui en a ôté la jouissance.

Deuxième danger: «De peur que quelque racine d’amertume, bourgeonnant en haut, ne vous trouble, et que par elle plusieurs ne soient souillés». Le mal signalé ici, découle du premier, car une racine d’amertume ne pourra jamais germer, bourgeonner et pousser dans le terrain de la grâce, dans un cœur qui n’en manque point. Il y a sans doute ici une allusion à Deut. 29:18, 19, où l’infidélité du cœur et l’idolâtrie, si elles se glissaient parmi le peuple de Dieu, sont comparées à une racine amère produisant «du poison et de l’absinthe». «De peur», dit Moïse, «qu’il n’y ait parmi vous homme, ou femme, ou famille, ou tribu, dont le cœur se détourne aujourd’hui d’avec l’Éternel, notre Dieu, pour aller servir les dieux de ces nations; de peur qu’il n’y ait parmi vous une racine qui produise du poison et de l’absinthe, et qu’il n’arrive que quelqu’un, en entendant les paroles de ce serment, ne se bénisse dans son cœur, disant: J’aurai la paix, lors même que je marcherai dans l’obstination de mon cœur» .

Il en est ainsi chez les chrétiens. La pensée de se détourner du christianisme pouvait s’élever dans le cœur des Hébreux à cause des difficultés qu’ils trouvaient sur leur route: s’ils manquaient de la grâce de Dieu, s’ils ne jugeaient pas cette pensée, elle pouvait devenir une racine d’amertume, qui, d’abord cachée, bourgeonnerait bientôt, se montrerait, troublerait les âmes et en souillerait plusieurs. Rien n’est subtil et contagieux comme le mal. Mais l’avertissement a une portée générale et nous concerne tous. Si quelque mal, quelque péché est toléré dans le cœur sans qu’il soit jugé, c’est une racine qui ne manquera pas de bourgeonner en haut. La mauvaise plante viendra à la surface, le mal apparaîtra extérieurement, troublera les âmes et se répandra, en sorte que plusieurs en seront souillés. Cette marche du mal est surtout frappante au point de vue doctrinal.

L’expression «racine d’amertume» est bien propre à attirer l’attention. La racine a déjà tous les caractères qui se trouveront dans les fruits qu’elle produit. C’est poison en soi et amertume dans les tristes et fâcheuses conséquences qui en résultent.

Troisième danger: «De peur qu’il n’y ait quelque fornicateur, ou profane comme Ésaü». Voilà où peut aboutir le manque de la grâce de Dieu, et le défaut de jugement du mal, la négligence à extirper la racine d’amertume dès qu’elle se montre. Il peut s’agir de la corruption païenne, quand il est parlé de «fornicateur». Mais cela va plus loin. Dans l’Ancien Testament, l’idolâtrie, dans laquelle les Israélites étaient exposés à tomber et sont tombés souvent, est appelée adultère à l’égard de Dieu et fornication. Il y a donc une fornication spirituelle pour l’âme, quand elle se détourne de la fidélité complète qu’elle doit au Seigneur (voyez Osée 4:12), et l’apôtre exhorte les chrétiens à cet égard (1 Cor. 10:8; voyez aussi Apoc. 2:14, 20). Mais il y a aussi quelque «profane comme Ésaü», et ici il s’agit de ce dont l’apôtre a parlé au chap. 6 et au chap. 10: l’abandon du christianisme par ceux qui, sortis du judaïsme, l’avaient accepté. C’est là l’acte profane, mépriser et rejeter une chose sainte, le don de Dieu, et les conséquences en sont terribles. Ésaü méprisa et livra son droit de premier-né, auquel étaient attachées toutes les bénédictions promises à Abraham. Et ce fut par un motif grossier et tout charnel, trahissant son manque de foi et le peu d’estime qu’il faisait du don et des promesses de Dieu. «Voici, je m’en vais mourir; et de quoi me sert le droit d’aînesse?» disait-il. Ne pouvait-il s’attendre à Dieu? Mais non; «il méprisa son droit d’aînesse» (Gen. 25:29-34). Les Hébreux étaient exposés à un danger semblable. Pour échapper aux épreuves et jouir des choses terrestres, ils étaient tentés de retourner en arrière. Or ç’aurait été une profanation; ç’aurait été mépriser Christ, le don de Dieu. On voit ainsi toute la force et l’à-propos de l’avertissement qui leur est donné. Cela ne nous dira-t-il rien, à nous aussi? Ne nous arrive-t-il point de préférer à Christ et aux choses célestes, quelque avantage terrestre, quelque satisfaction de la chair?

Ce qui rend l’avertissement encore plus sérieux, c’est la conséquence de la profanation ainsi commise, mise en relief dans l’histoire d’Ésaü. N’ayant pas apprécié la bénédiction, quand plus tard il la désira, il fut rejeté, bien qu’il la recherchât avec larmes. «N’as-tu que cette seule bénédiction, mon père?» s’écriait-il en pleurant. «Bénis-moi, moi aussi, mon père!» Mais «il ne trouva pas lieu à la repentance»; son père ne changea pas de disposition. C’était trop tard alors (Gen. 27:38). Cet exemple est placé devant les Hébreux professants pour leur montrer le danger que couraient ceux qui rejetteraient le christianisme, après l’avoir accepté. Il faut se souvenir que les Hébreux sont toujours considérés relativement à leur profession, sans qu’il soit question de la réalité de la vie divine chez eux.1

1 Quelques-uns pensent que ces paroles: «Il ne trouva pas lieu à la repentance», s’appliquent à Ésaü et non à Isaac. Elles signifieraient d’après eux qu’Ésaü, quoiqu’il le désirât avec larmes, ne put se repentir véritablement et fut rejeté. La conclusion serait toujours la même: le profane est rejeté.

(v. 18-24). Ici, l’auteur de l’épître trace un parallèle frappant entre ce que la loi offrait et les bénédictions que Christ a apportées. Le contraste entre les deux lui sert d’argument puissant — «car», dit-il — pour montrer combien il serait insensé et coupable d’abandonner l’un pour retourner à l’autre. C’est comme s’il disait aux Hébreux pour les encourager et les stimuler: Voulez-vous donc retourner en arrière vers la loi qui n’offrait que des ombres et des figures, et vous placer sous ses terreurs, en vous privant des bénédictions que la grâce vous apporte dans le christianisme? Voyez le contraste entre votre ancienne condition juive, et votre condition chrétienne sous la grâce. «Car vous n’êtes pas venus» aux foudres du Sinaï, à cet appareil redoutable dont s’enveloppait la majesté de Dieu, et tel que ceux qui entendaient sa voix priaient «que la parole ne leur fût plus adressée». La montagne qui peut être touchée, indiquait une économie terrestre, mais en même temps cette montagne, sur laquelle Dieu était descendu, ne devait pas être approchée, ni touchée, sous peine de mort. La loi tenait l’homme pécheur à distance, et s’il voulait s’approcher de Dieu dans cette condition, c’était la mort pour lui et ce qui dépendait de lui. Si terrible était ce qui paraissait, que Moise lui-même était effrayé et tout tremblant. Ce fait ne nous est point rapporté dans le récit que nous donne l’Exode, chap. 19 et 20. Là, l’Écriture nous présente Moïse dans sa dignité de médiateur. Seul il s’approche de l’obscurité profonde où était Dieu et reçoit ses paroles pour les transmettre au peuple (Ex. 20:21, 22). Mais ici, l’Esprit Saint nous révèle ce qui se passait dans le cœur de l’homme mis en présence de la majesté divine, de Dieu se révélant dans toute la gloire de sa sainteté et de sa justice.

«Mais», dit notre épître, «vous êtes venus à la montagne de Sion», en contraste avec Sinaï. Sion est la montagne de la grâce. Elle figure l’intervention de la souveraine grâce de Dieu envers Israël, quand tout avait failli sous la responsabilité de la loi. Israël était ruiné; «Icabod», c’est-à-dire «privé de gloire», était écrit sur le peuple, car l’arche de l’Éternel était tombée entre les mains de l’ennemi et, bien que ramenée, elle reste chez Abinadab, oubliée pour ainsi dire. L’Éternel ne demeurait pas encore au milieu de son peuple (voyez 1 Sam. 4-6; 7:1). Alors, en 2 Sam. 5, nous voyons David, le roi élu, l’homme selon le cœur de Dieu, marchant contre les Jébusiens à Jérusalem, et s’emparant de la forteresse de Sion qui devient la ville de David. L’arche y est placée; l’Éternel, dans sa grâce, ayant établi la royauté en David, rétablit aussi le peuple dans ses relations avec lui-même. Sion devient le siège de la puissance royale, c’est la demeure de l’Éternel, c’est là que le Messie est oint comme Roi. «Et moi», dit l’Éternel, au jour où les rois de la terre s’élèvent contre lui, «j’ai oint mon roi sur Sion, la montagne de ma sainteté» (Ps. 2). Le livre des Psaumes est rempli d’allusions à Sion, les prophètes en parlent aussi, et partout sont célébrées sa beauté, sa perfection; partout, elle est montrée comme le lieu où l’Éternel habite et d’où découle la bénédiction (voyez Ps. 48:3, 14; 50:2; 110:2; És. 2:1-5, etc...)

Tout ce qui est décrit dans les v. 22-24 de notre chapitre, présente la scène millénaire à laquelle les croyants hébreux étaient spirituellement parvenus; choses à venir, espérées, non encore établies, mais auxquelles nous appartenons déjà.

Après Sion, lieu de la demeure et du repos de Dieu sur la terre, nous montons en esprit jusqu’à la Jérusalem céleste, la cité du Dieu vivant. Sion est le siège de la puissance du Messie sur la terre; mais le Seigneur, fils de l’homme, a droit à un héritage dont les limites s’étendent à tout l’univers (Ps. 8; Héb. 2:7, 8; Éph. 1:10; 2:20-22; Phil. 2:9-11). De ce vaste empire, la Jérusalem céleste, la cité du Dieu vivant, est, pour ainsi dire, la métropole. C’est la cité qui a des fondements, dont Dieu lui-même est l’architecte et le créateur. En Apoc. 21, on trouve la sainte cité, nouvelle Jérusalem, soit pour le millénium, soit pour l’état éternel. C’est l’Église. Là, c’est donc ce que nous serons, tandis qu’ici, dans les Hébreux, la Jérusalem céleste, c’est où nous serons.

En montant le premier versant de cette montagne de gloire, nous sommes arrivés à la Jérusalem céleste. C’est donc le ciel que nous avons atteint, et nous voici au milieu de ses habitants. D’abord nous trouvons les «myriades d’anges, l’assemblée universelle» de ces êtres qui sont comme les indigènes du ciel: ils ont été préservés de chute et sont là dans leur demeure naturelle. Ils peuplent le monde invisible à nos yeux. Nous les voyons, en Apoc. 5, autour du trône: «des myriades de myriades et des milliers de milliers».

Montant plus haut encore, cette scène merveilleuse nous présente un objet particulier: «l’assemblée1 des premiers-nés écrits dans les cieux». C’est l’Église. Ceux qui la composent ne sont pas nés là; ils n’en sont pas les indigènes, comme les anges. Ils sont les objets des conseils de Dieu. Ce n’est pas seulement qu’ils ont atteint le ciel: ils sont les glorieux héritiers et les premiers-nés de Dieu selon ses conseils éternels, en vertu desquels ils sont inscrits dans les cieux. L’Assemblée, composée des objets de la grâce, maintenant appelés en Christ, appartient au ciel par la grâce. Ils ne sont pas (comme les saints de l’Ancien Testament) les objets des promesses, lesquels n’en ayant pas reçu l’accomplissement sur la terre, ne manqueront pas d’en jouir dans le ciel. Les premiers-nés n’ont en anticipation aucune autre patrie que le ciel. Leur bourgeoisie est dans les cieux (Phil. 3). Les promesses ne leur sont pas adressées; leur place n’est pas sur la terre. Dieu lui-même leur a préparé le ciel; c’est là et nulle autre part qu’il a inscrit leurs noms. Leur place est la plus élevée dans le ciel, au-dessus des voies de Dieu sur la terre, en gouvernement, en promesse et selon la loi. C’est l’Église, qui tient le premier rang dans les conseils de Dieu, et qui vient la dernière dans l’ordre des révélations (voyez Éph. 3).

1 Dans l’expression «assemblée universelle», le mot dans l’original n’est pas le même que dans «l’assemblée des premiers-nés». Le premier était celui qu’on employait pour désigner tous les états de la Grèce; le second indique l’assemblée des citoyens d’un état particulier.

Quelle place glorieuse que la sienne! Ce tableau de la gloire, de ce qui y est le plus élevé, et c’est ce qu’il y a de plus excellent en grâce, nous amène au sommet, à Dieu lui-même, «juge de tous». C’est donc sous un autre caractère que nous le voyons là, car l’idée de gouvernement se retrouve partout dans l’épître aux Hébreux. Dieu est présenté comme gouvernant et jugeant d’en haut tout ce qui se trouve au-dessous, caractère sous lequel il est partout désigné dans l’Ancien Testament et surtout dans les Psaumes.

Cela nous conduit, pour ainsi dire, sur l’autre versant. De Dieu, juge de tous, nous arrivons à une autre classe des bienheureux habitants de la gloire céleste. Ce sont les esprits des justes consommés, qui ont achevé leur course, qui, par leur foi, ont vaincu dans les combats. Dieu, juge de tous, les a reconnus pour siens avant que l’Assemblée céleste fût révélée. En rapport avec les voies de Dieu sur la terre, ils ont été fidèles sans recevoir l’effet des promesses, et maintenant, dans le repos du ciel, ils attendent la résurrection et la gloire (chap. 11:39, 40).

«Et à Jésus, médiateur d’une nouvelle alliance». Israël n’est pas perdu de vue. De ces esprits des justes consommés, déjà dans le ciel, nous descendons au peuple terrestre, pour lequel il y a encore des bénédictions en réserve; non plus sur le principe de la loi et de la responsabilité de l’homme, mais sur le principe de la grâce. Dieu établira une nouvelle alliance avec Israël, comme nous l’avons vu (chap. 10). Il ne se souviendra plus de leurs péchés ni de leurs iniquités, et il mettra ses lois dans leurs cœurs et les écrira dans leurs entendements. C’est une alliance de grâce et de pardon, où tout est du côté de Dieu. Et Jésus est le médiateur de cette nouvelle alliance. Il était déjà apparu comme tel et avait posé les bases de cette alliance; il avait accompli tout ce qui était nécessaire pour qu’elle fût établie. Les croyants hébreux étaient venus, non à la nouvelle alliance qui n’est pas encore établie, mais à Celui qui en est le médiateur, et dans lequel une bénédiction à venir était préparée et assurée pour Israël et pour la terre.

Enfin, ils étaient venus «au sang d’aspersion qui parle mieux qu’Abel». Le sang d’Abel, versé par Caïn, criait de la terre à Dieu et demandait vengeance du crime commis. La réponse fut la sentence prononcée contre le meurtrier: «Le sol... ne te donnera plus sa force; tu seras errant et vagabond sur la terre» (Gen. 4:10-12). Mais le sang de Christ, au lieu de crier vengeance, parle de grâce. Il implore le pardon pour ceux-mêmes qui l’ont versé (Luc 23:34); c’est en vertu de ce sang que ceux qui étaient ennemis sont réconciliés, et même qu’un jour, toutes choses, dans les cieux et sur la terre, seront réconciliées1 (Col. 1:20-22).

1 Les Juifs ont versé le sang de Christ, ils ont crié: «Que son sang soit sur nous et sur nos enfants» (Matt. 27:25). Le sang de Christ n’a pas crié vengeance contre eux, mais eux ont assumé volontairement la responsabilité de leur acte, et sur leurs têtes coupables est tombée la vengeance. Comme Caïn, les voilà errants et vagabonds sur la terre.

(v. 25-27). Après avoir établi le contraste frappant entre Sinaï avec ses terreurs, et la scène merveilleuse de gloire céleste et terrestre à laquelle les Hébreux étaient venus, l’auteur de l’épître les exhorte d’une manière pressante à ne pas se détourner de Celui qui leur parlait des cieux, c’est-à-dire Christ. C’était déjà lui, le Jéhovah de l’Ancien Testament, qui avait parlé en oracles sur la terre, lorsque à Sinaï il donnait des oracles vivants, afin que Moïse les donnât au peuple (Actes 7:38). Le peuple refusa d’entendre et n’a pas échappé. Christ a rendu, il est vrai, son témoignage sur la terre: il y a fait entendre sa voix. Mais, en fait, les Hébreux, ainsi que nous-mêmes, avaient affaire maintenant à Celui qui nous «parle des cieux», à Christ qui est glorifié, assis à la droite de la Majesté, au Seigneur lui-même dans la gloire, d’où il a envoyé l’Esprit Saint qui a confirmé son témoignage (Héb. 2:1-4). Si le peuple d’Israël n’a pas échappé, ayant refusé Celui qui parlait alors sur la terre, combien moins échappera-t-on maintenant, si l’on se détourne de Celui «qui parle des cieux»?

Sa voix ébranla la terre, lorsqu’il parla en Sinaï (Ex. 19:18), et maintenant il parle avec grâce et autorité du haut du ciel, et que nous annonce-t-il? Qu’il va encore une fois secouer, non seulement la terre, mais aussi les cieux, selon la prophétie d’Aggée (Aggée 2:6). Or cet ébranlement, selon l’explication qu’en donne l’auteur sacré, indique la dissolution de toutes les choses créées, ainsi que nous le voyons en 2 Pierre 3:7, 12. Le judaïsme, système en rapport avec l’homme dans sa responsabilité avec Dieu, allait disparaître, mais le passage qui nous occupe va plus loin. Non seulement la terre et tout ce qui s’y trouve, souillés par le péché et la corruption, la terre et tout ce en quoi l’homme cherche à trouver son repos et son plaisir, doivent être dissous, disparaître; mais le ciel même, siège de la puissance de l’ennemi, souillé par sa présence (Apoc. 12, etc.), doit être dissous. Tout ce qui appartient à la première création — les choses muables — doit disparaître et céder la place aux choses immuables, permanentes, de la nouvelle création. «Selon sa promesse, nous attendons de nouveaux cieux et une nouvelle terre, dans lesquels la justice habite».

(v. 28, 29). L’apôtre tire maintenant, pour les croyants, la conséquence de ce qu’il vient de dire. Ils étaient arrivés à la possession par la foi de toutes ces gloires millénaires et éternelles; ils étaient la partie céleste de ce royaume qui ne peut être ébranlé et qui sera introduit de fait par l’ébranlement des choses muables — ils étaient les premiers fruits de la nouvelle création, et quant au présent, ils recevaient déjà ce royaume.

C’est en effet le privilège de tout croyant de vivre et de se mouvoir par la foi dans tout cet ordre de choses si élevé auquel ils appartiennent. Par là, les Hébreux étaient détachés du judaïsme, chose muable qui passait; par là, nos cœurs seront détachés des choses qui sont sur la terre et qui nous entravent dans le service que nous avons à rendre à Dieu.

Nous possédons ces privilèges par la grâce: ne l’oublions pas, mais retenons cette grâce. La loi ne pouvait nous y faire arriver. Et maintenant, qu’avons-nous à faire? Servir Dieu «d’une manière qui lui soit agréable». Servir ici, comme partout dans cette épître, se rapporte au culte que nous avons à rendre à Dieu. Le culte juif avait fait son temps, ce n’était plus le culte agréable à Dieu; maintenant la grâce qui nous a introduits dans la jouissance des bénédictions célestes, remplit nos cœurs de reconnaissance envers Dieu et nous rend capables de lui offrir un culte qui lui est agréable. Il est le fruit de ce que sa grâce a produit en nous.

Toutefois il ne faut pas oublier que, si la grâce nous a amenés près de Dieu, de sorte que nous sommes en liberté en sa présence, il n’en reste pas moins le Dieu Tout-puissant, le Dieu saint et juste, et que nous sommes devant sa Majesté souveraine. Il faut donc que notre service s’accomplisse «avec révérence et avec crainte», dans la conscience de sa grandeur et du respect qui lui est dû. Ce respect et cette crainte, liés au sentiment de la grâce, donneront à notre culte un caractère extrêmement élevé. Puissions-nous en être pénétrés dans toute notre marche qui doit être un service journalier! Ainsi le motif de notre service est la grâce, et son caractère, la manière de l’accomplir, est le respect et la crainte.

La raison qui nous en est donnée est solennelle. «Car aussi notre Dieu est un feu consumant»: «notre Dieu», remarquez-le, et non Dieu en dehors de Christ. Le Dieu qui consuma Nadab et Abihu pour avoir offert devant l’Éternel un feu étranger (Lév. 10:1, 2); le Dieu qui déclare aux Israélites en les avertissant contre l’idolâtrie, qu’il est un feu consumant, un Dieu jaloux (Deut. 4:24), est aussi notre Dieu, le Dieu des chrétiens, et demeure dans son caractère de sainteté qui lui fait juger le mal. Il ne veut souffrir en ceux qui s’approchent de lui aucune souillure, rien qui rappelle au sens spirituel le feu étranger, ni l’idolâtrie. Il nous veut tout entiers pour lui.