Ézéchiel

Chapitre 10

La vision qui suit complète le tableau de jugement commencé aux chapitres 8 et 9. Elle rappelle ce que le prophète avait déjà vu lorsqu’il était au milieu des captifs sur les bords de Kébar. Il s’y trouve certaines modifications qui s’expliquent par le fait que le prophète avait été transporté par l’Esprit dans les visions de Dieu à Jérusalem, alors qu’il était assis avec les anciens de Juda devant lui. La ville était maintenant dans le jour de sa visitation à cause de son impureté de chair et d’esprit, et Dieu commençait par le sanctuaire, tout en prenant connaissance de l’état de la cité toute entière, hormis ceux qui soupiraient et gémissaient à cause de toutes les abominations qui se commettaient au milieu d’elle. C’était un spectacle solennel pour le prophète captif, de contempler la gloire de Dieu dans un pays païen, mais c’était tout aussi significatif de la voir dressée en vengeance contre la cité sur laquelle Ses yeux et Son cœur reposent perpétuellement (2 Chr. 7:16).

«Et je regardai, et voici, dans le firmament au-dessus de la tête des chérubins, parut comme une pierre de saphir, comme l’aspect de la ressemblance d’un trône, au-dessus d’eux. Et il parla à l’homme vêtu de lin, et dit: Viens entre les roues, au-dessous du chérubin, et remplis le creux de tes mains de charbons de feu pris d’entre les chérubins, et répands-les sur la ville. Et il entra, devant mes yeux. Et les chérubins se tenaient à droite de la maison lorsque l’homme entra, et la nuée remplissait le parvis intérieur» (10:1-3). C’est de Celui qui n’est même pas nommé, mais qui remplit le trône au-dessus, que vient l’ordre ordonnant un jugement de destruction sur la ville. Celui qui avait reçu la mission de marquer les justes pour être épargnés, reçoit maintenant le commandement de remplir ses mains de charbons de feu pris d’entre les chérubins et de les répandre sur Jérusalem. La nuée de la présence de l’Éternel était là, mais elle n’apportait ni abri, ni direction au peuple qui avait abandonné tout souci de Sa volonté et avait préféré un veau ou un dieu exécrable au Dieu d’Israël. Quel changement depuis le jour où l’Éternel allait devant eux et remplissait le sanctuaire!

«Et la gloire de l’Éternel s’éleva de dessus le chérubin, et vint sur le seuil de la maison; et la maison fut remplie de la nuée, et le parvis fut rempli de la splendeur de la gloire de l’Éternel. Et le bruit des ailes des chérubins s’entendit jusqu’au parvis extérieur, comme la voix du Dieu Tout-puissant quand il parle» (10:4-5). Maintenant la gloire quitte cet endroit au lieu d’y venir habiter. L’Éternel abandonne la résidence qu’Il s’était plu à choisir — sans pour autant la quitter pour toujours, puisque qu’Il l’avait choisie pour toujours. Mais Il est chassé moralement par l’iniquité et l’apostasie de Son propre peuple. La prophétie d’Ézéchiel dit explicitement qu’Il reviendra habiter là, et ne quittera plus jamais Sa maison, aussi longtemps que la terre durera, car Son peuple jouira alors du repos de Dieu sous le Messie et la nouvelle alliance. Mais de même que, dans ses dernières paroles, David était obligé de dire que «sa maison n’était pas ainsi avec Dieu» (2 Sam. 23), notre prophète prononce ici en symboles mystérieux la rupture des liens entre Dieu et Israël par les signes solennels de leur jugement. Cela est rendu bien visible au prophète, si par extraordinaire le peuple pouvait écouter et vivre, ayant été saisi par les spectacles et les sons étranges que le Seigneur lui donne de raconter. Quoiqu’Il pût faire en d’autres temps, c’était à ne pas s’y tromper l’Éternel qui dirigeait le ravage et la destruction de Sa propre ville et de Son sanctuaire. La foi du croyant serait fortifiée par ce que Dieu fait en dégageant le sol de tout arbre qu’Il n’a pas planté (Matt. 15:13).

Nous avons ensuite l’exécution de l’ordre donné dans la vision, de façon que tout soit rendu d’autant plus impressionnant et certain pour ceux qui se flattaient de l’impossibilité que l’Éternel cesse de reconnaître Israël, malgré toutes Ses leçons tranchantes et Ses châtiments; ceux-ci pouvaient penser que, malgré les succès temporaires de l’ennemi, le pays, la ville et le temple seraient un rempart imprenable empêchant cet ennemi d’obtenir un avantage durable sur le peuple élu. L’homme est en effet si prompt à oublier les principes immuables de Dieu dans Son être moral, et à tourner à son propre avantage et à son propre honneur ce que Dieu est obligé de faire pour maintenir la vérité et la justice à Sa gloire.

«Et il arriva que, lorsqu’il eut commandé à l’homme vêtu de lin, disant: Prends du feu d’entre les roues, d’entre les chérubins, il entra et se tint à côté des roues. Et le chérubin étendit sa main entre les chérubins, vers le feu qui était entre les chérubins, et il en prit, et le mit dans le creux des mains de l’homme vêtu de lin; et il le prit et sortit. Et on voyait aux chérubins la figure d’une main d’homme sous leurs ailes. Et je regardai, et voici, quatre roues à côté des chérubins, une roue à côté d’un chérubin, et une roue à côté d’un chérubin, et l’aspect des roues était comme la couleur de la pierre de béryl. Et quant à leur aspect, elles avaient les quatre une seule ressemblance, comme si une roue était au milieu d’une roue. Quand elles allaient, elles allaient sur leurs quatre côtés; elles ne se tournaient pas, quand elles allaient; mais, vers le lieu où la tête regardait, elles allaient après elle: elles ne se tournaient pas quand elles allaient. Et tout leur corps, et leur dos, et leurs mains, et leurs ailes, et les roues, étaient pleins d’yeux tout autour, même les roues que les quatre avaient. Quant aux roues, on leur cria, moi l’entendant: Ô roue! Et chacun avait quatre faces: la première face était la face d’un chérubin, et la seconde face était la face d’un homme, et la troisième était la face d’un lion, et la quatrième, la face d’un aigle. Et les chérubins s’élevèrent. C’était l’animal que j’avais vu près du fleuve Kebar. Et quand les chérubins allaient, les roues allaient à côté d’eux; et quand les chérubins levaient leurs ailes pour s’élever de dessus terre, les roues aussi ne se détournaient point d’à côté d’eux; quand ils s’arrêtaient, elles s’arrêtaient, et quand ils s’élevaient, elles s’élevaient avec eux, car l’esprit de l’animal était en elles» (10:6-17).

Les versets 15, 20 et 22 identifient parfaitement la gloire avec celle vue au début sur les bords du fleuve Kébar. Il est clair que, si cette gloire revient, ce n’est qu’en passant, et chargée de la triste tâche de sceller le jugement, et de marquer l’abandon d’Israël sous la loi, devenu maintenant apostat. Le symbole du gouvernement divin en providence était là, mais il n’occupait pas son siège dans le lieu très saint. Il se tenait sur le seuil, et le parvis était rempli de la splendeur de la gloire de l’Éternel, mais il n’entrait plus à l’intérieur. C’était une visitation judiciaire, en obéissance aux ordres de Celui qui, d’en haut, contrôlait chacun de ces mouvements. La colère était sortie contre Jérusalem. Et c’était Lui qui dirigeait tout; ce n’était pas les idoles muettes des Gentils, qui ont des bouches et ne parlent pas, des yeux, des mains et des oreilles, mais ne voient, ni ne touchent, ni n’entendent pas (Ps. 115:5-7); des idoles aussi vaines que ceux qui se confient en elles contre le Dieu des cieux qui a fait tout ce qui Lui a plu (Ps. 115:3).

Quelques traits diffèrent de ceux de la première manifestation, sans pour autant qu’il y ait quelque séparation des roues d’avec les chérubins, ni la moindre divergence dans l’action commune ou dans le but de leurs mouvements compliqués. L’intelligence pénétrante est réaffirmée plus fortement pour le corps tout entier, les dos, les mains, les ailes et les roues. «Quant aux roues, on leur cria, moi l’entendant: Galgal!» [roue, ou: roule, roule] (10:13).

Le verset 18 nous montre un mouvement très significatif: «Et la gloire de l’Éternel sortit de dessus le seuil de la maison, et se tint au-dessus des chérubins. Et les chérubins haussèrent leurs ailes et s’élevèrent de terre à mes yeux, quand ils sortirent; et les roues étaient auprès d’eux. Et ils s’arrêtèrent à l’entrée de la porte orientale de la maison de l’Éternel; et la gloire du Dieu d’Israël était au-dessus d’eux, en haut. C’était là l’animal que j’avais vu au-dessous du Dieu d’Israël, près du fleuve Kebar; et je connus que c’étaient les chérubins. Chacun avait quatre faces, et chacun quatre ailes, et il y avait une ressemblance de mains d’homme sous leurs ailes. Et quant à la ressemblance de leurs faces, c’était les mêmes faces que j’avais vues près du fleuve Kebar, leur aspect, et eux-mêmes; ils allaient chacun droit devant soi» (10:18-22). La gloire peut s’attarder sur la porte orientale, mais elle s’en va vraiment.