Deutéronome

Chapitre 18

Le paragraphe qui commence ce chapitre suggère une série de vérités éminemment intéressantes et pratiques.

«Les sacrificateurs, les Lévites, et toute la tribu de Lévi, n’auront point de part ni d’héritage avec Israël ils mangeront des sacrifices de l’Éternel faits par feu, et de son héritage, mais ils n’auront point d’héritage au milieu de leurs frères. L’Éternel est leur héritage, comme il le leur a dit. Or c’est ici le droit des sacrificateurs de la part du peuple, de la part de ceux qui offrent un sacrifice, que ce soit un bœuf, ou un mouton on donnera au sacrificateur l’épaule, et les mâchoires, et l’estomac. Tu lui donneras les prémices de ton froment, de ton moût et de ton huile, et les prémices de la toison de tes moutons. Car l’Éternel, ton Dieu, l’a choisi, lui et ses fils, d’entre toutes les tribus, pour qu’il se tienne toujours devant lui pour faire le service au nom de l’Éternel. Et si le Lévite vient de l’une de tes portes, de tout Israël où il séjourne, et qu’il vienne, selon tout le désir de son âme, au lieu que l’Éternel aura choisi, et qu’il serve au nom de l’Éternel, son Dieu, comme tous ses frères, les Lévites, qui se tiennent là devant l’Éternel, il mangera une portion égale, outre ce qu’il aura vendu de son patrimoine» (vers. 1-8).

Ici, comme partout ailleurs dans le livre du Deutéronome, les sacrificateurs sont classés avec les Lévites, d’une manière toute spéciale. Nous appelons l’attention du lecteur sur ce trait caractéristique de notre livre, mais nous ne nous y arrêterons maintenant qu’un moment, pour indiquer la raison de la différence que présente à cet égard le livre du Deutéronome avec l’Exode, le Lévitique et les Nombres. Nous croyons que cela vient de ce que, dans le Deutéronome, le but de Dieu est de mettre davantage en évidence l’assemblée d’Israël tout entière. C’est pour cela que nous y voyons rarement paraître les sacrificateurs dans leurs fonctions officielles. La grande pensée du Deutéronome, c’est la relation immédiate d’Israël avec l’Éternel.

Or, dans le passage qui nous occupe, les sacrificateurs et les Lévites sont associés ensemble et présentés comme les serviteurs de l’Éternel, entièrement dépendants de Lui, et intimement identifiés avec son autel et son service. Cela est d’un grand intérêt et ouvre un vaste champ de vérités pratiques à l’Église de Dieu.

En parcourant l’histoire du peuple d’Israël, nous pouvons remarquer que lorsque tout marchait bien, l’autel de Dieu était bien servi, et, comme conséquence, les sacrificateurs et les Lévites ne manquaient de rien. Si l’Éternel avait la part qui lui était due, ses serviteurs pouvaient être assurés d’avoir la leur. S’il était négligé, ils l’étaient aussi; ils étaient liés ensemble. Le peuple devait apporter ses offrandes à Dieu, et Lui les partageait avec ses serviteurs. Les sacrificateurs et les Lévites ne devaient rien exiger ou demander du peuple, mais le peuple avait le privilège d’apporter ses dons à l’autel de Dieu, qui permettait à ses serviteurs de se nourrir des fruits provenant du dévouement de son peuple pour Lui-même.

Telle était l’intention divine de l’Éternel quant à ses serviteurs d’alors. Ils devaient se nourrir des offrandes volontaires présentées à Dieu par la congrégation tout entière. Il est vrai que nous trouvons un état de chose entièrement différent dans les sombres et tristes jours des fils d’Éli: «Et la coutume des sacrificateurs à l’égard du peuple était celle-ci quand quelqu’un sacrifiait un sacrifice, le serviteur du sacrificateur venait lorsqu’on faisait bouillir la chair, ayant en sa main une fourchette à trois dents, et il piquait dans la chaudière, ou dans le chaudron, ou dans la marmite, ou dans le pot le sacrificateur en prenait tout ce que la fourchette amenait en haut. Ils faisaient ainsi à tous ceux d’Israël qui venaient là, à Silo. Même, avant qu’on eût fait fumer la graisse», — la part spéciale de Dieu, — «le serviteur du sacrificateur venait, et disait à l’homme qui sacrifiait: Donne de la chair à rôtir pour le sacrificateur; et il ne prendra pas de toi de la chair bouillie, mais de la chair crue. Si l’homme lui disait: On va d’abord faire fumer la graisse, puis tu prendras selon le désir de ton âme, alors il lui disait: Non, car tu en donneras maintenant sinon, j’en prendrai de force. Et le péché de ces jeunes hommes fut très grand devant l’Éternel car les hommes méprisaient l’offrande de l’Éternel» (1 Sam. 2:13-17).

Tout cela était déplorable et amena le terrible jugement de Dieu sur la maison d’Éli. Il n’en pouvait être autrement. Si ceux qui servaient à l’autel pouvaient se rendre coupables d’une iniquité et d’une impiété si grande, il fallait que le jugement eût son cours.

Mais l’état normal des choses, tel qu’il est décrit dans notre chapitre, offrait un contraste complet avec tout ce mal. L’Éternel s’entourait des offrandes volontaires de son peuple, et il en nourrissait ses serviteurs qui servaient à son autel. Par conséquent, lorsque les offrandes abondaient sur l’autel de Dieu, les sacrificateurs et les Lévites avaient une riche portion, une abondante provision; tandis qu’au contraire, lorsque l’Éternel et son autel étaient négligés, les serviteurs de l’Éternel l’étaient aussi, dans la même proportion. Ils étaient, en un mot, intimement identifiés avec le culte et le service du Dieu d’Israël.

Ainsi, par exemple, dans les beaux jours du bon roi Ézéchias, où les cœurs étaient heureux et sincères, nous lisons: «Et Ézéchias établit les classes des sacrificateurs et des lévites, selon leurs classes, chacun selon son service, tant sacrificateurs que lévites, pour les holocaustes et pour les sacrifices de prospérités, pour faire le service et pour rendre grâces et pour louer aux portes des parvis de l’Éternel. Et il établit que la portion du roi serait prise sur ses biens, pour les holocaustes; pour les holocaustes du matin et du soir, et pour les holocaustes des sabbats et des nouvelles lunes et des fêtes solennelles, comme il est écrit dans la loi de l’Éternel. Et il dit au peuple, aux habitants de Jérusalem, de donner la portion des sacrificateurs et des lévites, afin qu’ils s’attachassent à la loi de l’Éternel. Et quand la parole du roi se répandit, les fils d’Israël apportèrent en grande quantité les prémices du blé, du moût, et de l’huile, et du miel, et de tous les produits des champs; et ils apportèrent la dîme de tout, en abondance. Et les fils d’Israël et de Juda, qui habitaient dans les villes de Juda, eux aussi apportèrent la dîme du gros bétail et du menu bétail, et la dîme des choses saintes, qui étaient consacrées à l’Éternel, leur Dieu, et ils les mirent par monceaux. Au troisième mois, ils commencèrent de faire les monceaux, et au septième mois ils achevèrent. Et Ézéchias et les chefs vinrent et virent les monceaux, et ils bénirent l’Éternel et son peuple Israël. Et Ézéchias s’informa auprès des sacrificateurs et des lévites au sujet des monceaux. Et Azaria, le principal sacrificateur, qui était de la maison de Tsadok, lui parla, et dit: Depuis qu’on a commencé d’apporter l’offrande dans la maison de l’Éternel, on a mangé et on a été rassasié, et il en est resté en abondance; car l’Éternel a béni son peuple; et ce qui reste, c’est cette grande quantité» (2 Chr. 31:2-10).

Que tout cela est beau et encourageant! Le fleuve profond d’un entier dévouement coulait autour de l’autel de Dieu, portant dans son sein d’amples provisions pour les besoins des serviteurs de l’Éternel, et même il y avait des «monceaux» de reste. Nous pouvons être assurés que cela était agréable au cœur du Dieu d’Israël, comme aux cœurs de ceux qui, à son appel, s’étaient voués au service de son autel et de son sanctuaire.

Remarquons particulièrement les paroles suivantes: «Comme il est écrit dans la loi de l’Éternel». Voilà quelle était l’autorité d’Ézéchias, le fondement sûr et ferme de toute sa conduite. Il est vrai que l’unité visible de la nation avait pris fin, et que l’état des choses, lorsqu’il commença son œuvre, était des plus décourageants; mais la parole de l’Éternel, dans son application, était aussi vraie, aussi positive et aussi directe, aux jours d’Ézéchias, qu’aux jours de David ou de Josué. Ézéchias sentait, avec raison, que Deut. 18:1-8, s’appliquait à son temps et à sa conscience et que soit lui, soit le peuple, étaient responsables d’agir en conséquence, selon leur pouvoir. Les sacrificateurs et les Lévites devaient-ils souffrir de la faim, parce que l’unité nationale d’Israël avait cessé? Non, assurément. Ils subsistaient ou tombaient avec la Parole, le culte et l’œuvre de Dieu. Les circonstances pouvaient changer, et l’Israélite se trouver dans une position où il ne lui serait pas possible d’observer tous les détails des cérémonies lévitiques, mais jamais il ne pouvait se trouver dans des circonstances où il ne pût avoir l’immense privilège d’exprimer largement le dévouement de son cœur au service, à l’autel et à la loi de l’Éternel.

Nous voyons donc constamment dans l’histoire d’Israël, que lorsque les choses allaient bien, il était abondamment pourvu à ce qui regardait le culte de l’Éternel, son service et ses serviteurs. Mais, au contraire, lorsque l’état moral baissait, que les cœurs se refroidissaient, que l’égoïsme prenait le dessus, alors tous ces grands objets étaient traités avec une froide indifférence. Voyez, par exemple, le chapitre 13 de Néhémie. Quand ce fidèle serviteur retourna à Jérusalem, après une absence de quelques jours, il vit avec un profond chagrin que, dans ce temps si court, bien des choses avaient mal été, et que, entre autres, les pauvres Lévites avaient été laissés sans nourriture. «Et j’appris que les portions des lévites ne leur avaient pas été données, et que les lévites et les chantres qui faisaient le service avaient fui chacun à son champ» (vers. 10). Il n’y avait pas de «monceaux» de prémices dans ces tristes jours, et ce n’était pas selon la loi de Dieu, ni selon son cœur, que des hommes dussent travailler et chanter sans avoir rien à manger. C’était un opprobre pour le peuple que les serviteurs de l’Éternel fussent obligés, par leur négligence, d’abandonner son culte et son service afin de ne pas mourir de faim.

C’était un état de choses déplorable, et Néhémie le sentit profondément, car nous lisons: «Et je querellai les chefs, et je dis: Pourquoi la maison de Dieu est-elle abandonnée? Et je les rassemblai, et je les fis demeurer à leur poste. Et tout Juda apporta dans les magasins la dîme du blé, et du moût, et de l’huile. Et j’établis sur les magasins Shélémia, etc., car ils étaient estimés fidèles», ils avaient droit à la confiance de leurs frères, «et c’était à eux de faire les répartitions à leurs frères». Il fallait des hommes éprouvés et fidèles pour occuper cette haute charge, et distribuer les fruits précieux du dévouement du peuple; ils devaient prendre conseil ensemble, et veiller à ce que le trésor de l’Éternel fût fidèlement géré selon sa parole, et à ce qu’il fût pourvu aux besoins de ses vrais serviteurs, sans partialité.

Tel était l’ordre admirable prescrit par le Dieu d’Israël, ordre que tous les vrais Israélites, tels que Néhémie et Ézéchias, prenaient plaisir à observer. Le large fleuve des bénédictions coulait de l’Éternel vers son peuple, et retournait de son peuple à Lui, et c’est à ce fleuve que ses serviteurs devaient puiser abondamment pour tous leurs besoins. C’était un déshonneur pour Lui que les Lévites fussent obligés de retourner à leurs champs; cela prouvait que sa maison était abandonnée, et qu’il n’y avait pas de quoi nourrir ses serviteurs.

Quelle leçon pouvons-nous tirer de tout cela? Qu’est-ce que l’Église de Dieu peut apprendre de Deut. 18:1-8? Afin de répondre à ces questions, lisons le chapitre 9 de 1 Corinthiens, où l’apôtre traite le sujet si important de la manière dont l’Assemblée a à pourvoir aux besoins des serviteurs de Dieu, sujet bien peu compris par la grande masse des chrétiens de profession. La règle est aussi claire que possible. «Qui jamais va à la guerre à ses propres dépens? Qui plante une vigne et n’en mange pas le fruit? Ou qui paît un troupeau et ne mange pas du lait du troupeau? Est-ce que je dis ces choses selon l’homme? Ou la loi aussi ne dit-elle pas ces choses? Car dans la loi de Moïse il est écrit: «Tu n’emmuselleras pas le bœuf qui foule le grain». Dieu s’occupe-t-il des bœufs? ou parle-t-il entièrement pour nous? Car c’est pour nous que cela est écrit, que celui qui laboure doit labourer avec espérance, et que celui qui foule le grain doit le fouler dans l’espérance d’y avoir part. Si nous avons semé pour vous des biens spirituels, est-ce beaucoup que nous moissonnions de vos biens charnels? Si d’autres ont part à ce droit sur vous, ne l’avons-nous pas bien plus? Mais» — ici la grâce brille de tout son éclat — «nous n’avons pas usé de ce droit, mais nous supportons tout, afin de ne mettre aucun obstacle à l’évangile du Christ. Ne savez-vous pas que ceux qui s’emploient aux choses sacrées mangent de ce qui vient du temple; que ceux qui servent à l’autel ont leur part de l’autel? De même aussi, le Seigneur a ordonné à ceux qui annoncent l’évangile, de vivre de l’évangile. Mais» — ici encore la grâce montre sa sainte dignité — «moi je n’ai usé d’aucune de ces choses, et je n’ai pas écrit ceci, afin qu’il en soit fait ainsi à mon égard; car il serait bon pour moi de mourir, plutôt que de voir quelqu’un anéantir ma gloire. Car, si j’évangélise, je n’ai pas de quoi me glorifier, car c’est une nécessité qui m’est imposée, car malheur à moi si je n’évangélise pas. Car, si je fais cela volontairement, j’en ai un salaire mais si c’est malgré moi, une administration m’est confiée. Quel est donc mon salaire? C’est que, en évangélisant, je rends l’évangile exempt de frais, pour ne pas user comme d’une chose à moi, de mon droit dans l’évangile» (vers. 7-18).

Ce sujet si intéressant et si important est envisagé ici sous tous ses points de vue. L’apôtre proclame de la manière la plus claire et la plus positive, la loi divine à cet égard; il n’y a pas à s’y méprendre. «Le Seigneur a ordonné à ceux qui annoncent l’évangile, de vivre de l’évangile», c’est-à-dire que de même qu’autrefois les sacrificateurs et les Lévites vivaient des offrandes présentées par le peuple, de même maintenant ceux qui sont réellement appelés de Dieu, doués par Christ, et préparés par le Saint Esprit à prêcher l’évangile, et qui se donnent entièrement à cette œuvre excellente, ceux-là, disons-nous, ont droit moralement à être entretenus quant à leurs besoins temporels. Non qu’ils aient à attendre de ceux auxquels ils prêchent la Parole, un paiement fixe. Il n’y a rien de pareil dans le Nouveau Testament. L’ouvrier doit s’attendre à son maître seul pour son entretien. Malheur à lui s’il regarde à l’Église ou à des hommes, quels qu’ils soient! Les sacrificateurs et les Lévites avaient leur portion en l’Éternel et la recevaient de Lui; il était le lot de leur héritage. Il est vrai qu’il voulait que les Israélites le servissent dans la personne de ses serviteurs. Il leur disait ce qu’ils devaient donner, et ils étaient bénis en donnant; donner, était leur privilège aussi bien que leur devoir; s’ils eussent refusé ou négligé de le faire, la sécheresse et la stérilité de leurs champs en aurait été la conséquence (Aggée 1:5-11).

Mais les sacrificateurs et les Lévites devaient s’attendre à l’Éternel seul. Si le peuple manquait à apporter ses offrandes, les Lévites devaient retourner à leurs champs et travailler pour leur entretien. Ils ne pouvaient pas entrer en procès au sujet des dîmes et des offrandes, leur seul recours devait être au Dieu d’Israël qui les avait consacrés à son service et leur avait donné ce service à accomplir.

Il en est de même des serviteurs du Seigneur maintenant; ce n’est qu’à Lui seul qu’ils doivent s’attendre. Il faut qu’ils soient bien certains qu’ils ont été qualifiés et appelés par Lui pour l’œuvre, avant de s’y hasarder et de se donner entièrement au service de la prédication. Il faut qu’ils détournent complètement leurs yeux des hommes, de toutes les ressources venant des hommes, de tous les soutiens humains, et qu’ils s’appuient exclusivement sur le Dieu vivant. On voit les conséquences les plus déplorables résulter du fait que l’on a agi avec légèreté dans cette solennelle question des hommes, non appelés de Dieu, ni qualifiés pour son service, abandonnant leurs occupations pour se vouer à l’œuvre et vivre de foi, disent-ils. Des chutes déplorables en sont toujours le résultat. Les uns, lorsqu’ils commencent à voir les sérieuses réalités du chemin, sont si alarmés qu’ils perdent leur équilibre moral, et même parfois la raison pour un temps; d’autres perdent la paix; d’autres enfin retournent au monde.

Bref, nous sommes convaincus, par l’expérience de quarante années, que les cas sont fort rares où un chrétien puisse, en toute sécurité, abandonner la profession qui est son gagne-pain, afin de prêcher l’Évangile. Il faut, dans ce cas, que l’appel soit si clair et si distinct, que ce chrétien ne puisse que dire, comme Luther, à la diète de Worms: «Me voici je ne puis faire autrement; que Dieu me soit en aide! Amen.» Alors il pourra être parfaitement certain que Dieu sera avec lui dans l’œuvre à laquelle il l’a appelé, et qu’il suppléera à tous ses besoins, «selon ses richesses en gloire par le Christ Jésus». Quant aux hommes et à ce qu’ils peuvent penser de lui et de sa manière de faire, il n’a qu’à les renvoyer à son Maître. Comme il ne leur demande pas de l’entretenir, il n’a aucun compte à leur rendre, et n’est responsable qu’envers son Maître.

Mais en considérant le beau passage de 1 Cor. 9, que nous venons de citer, nous voyons que l’apôtre, après avoir pleinement établi les droits qu’il avait à être entretenu, y renonce entièrement. «Mais moi je n’ai usé d’aucune de ces choses». Il travaillait de ses mains, travaillait nuit et jour afin de n’être à charge de personne. «Ces mains», dit-il en Actes 20:34, «ont été employées pour mes besoins et pour les personnes qui étaient avec moi». Il ne convoitait ni l’or, ni l’argent, ni la robe de personne. Il voyageait, il prêchait, il visitait de maison en maison, il était l’apôtre infatigable, le zélé évangéliste, le pasteur diligent; il avait le soin de toutes les églises. N’aurait-il pas eu le droit d’être entretenu? Assurément. L’Église de Dieu aurait dû être trop heureuse de Pourvoir à tous ses besoins; mais il ne fit jamais valoir ses droits, et même il y renonça. Il se nourrissait, lui et ses compagnons, par le travail de ses mains, et cela pour exemple, comme il le dit aux anciens de l’assemblée d’Éphèse: «Je vous ai montré en toutes choses, qu’en travaillant ainsi, il nous faut secourir les faibles, et nous souvenir des paroles du Seigneur Jésus, qui lui-même a dit: Il est plus heureux de donner que de recevoir».

N’a-t-on pas sujet de s’étonner de voir ce bien-aimé et vénéré serviteur de Christ, avec tous ses grands voyages, de Jérusalem et jusqu’en Illyrie, ses immenses travaux comme évangéliste, pasteur et docteur, trouver encore le temps de travailler de ses mains pour subvenir à ses besoins et à ceux des personnes qui l’accompagnaient? Il occupait vraiment une haute position morale. Sa vie fut une censure constante contre toute espèce d’esprit mercenaire. Les allusions ironiques des incrédules à l’égard des ministres largement payés, ne pourraient pas s’appliquer à lui. Il ne prêchait certes pas pour de l’argent.

Et cependant il recevait avec gratitude l’aide de ceux qui savaient donner. Maintes fois, la chère assemblée de Philippes pourvut aux besoins de son vénéré et bien-aimé père en Christ, et cela ne sera jamais oublié. Des milliers de chrétiens ont lu le touchant récit du dévouement des Philippiens, et ont été rafraîchis par le parfum de leur sacrifice; il est inscrit dans le ciel, où rien de semblable n’est jamais oublié, et même il est gravé sur le cœur de Christ. Écoutez comment l’apôtre laisse déborder son cœur reconnaissant, en s’adressant à ses enfants bien-aimés: «Or je me suis grandement réjoui dans le Seigneur de ce que maintenant enfin vous avez fait revivre votre pensée pour moi, quoique vous y ayez bien aussi pensé, mais l’occasion vous manquait; non que je parle ayant égard à des privations, car, moi, j’ai appris à être content en moi-même dans les circonstances où je me trouve. Je sais être abaissé, je sais aussi être dans l’abondance; en toutes choses et à tous égards, je suis enseigné aussi bien à être rassasié qu’à avoir faim, aussi bien à être dans l’abondance qu’à être dans les privations. Je puis toutes choses en Celui qui me fortifie. Néanmoins vous avez bien fait de prendre part à mon affliction. Or vous aussi, Philippiens, vous savez qu’au commencement de l’Évangile, quand je quittai la Macédoine, aucune assemblée ne me communiqua rien, pour ce qui est de donner et de recevoir, excepté vous seuls; car, même à Thessalonique, une fois et même deux fois, vous m'avez fait un envoi pour mes besoins; non que je recherche un don, mais je recherche du fruit qui abonde pour votre compte. Or j’ai amplement de tout, et je suis dans l’abondance; je suis comblé, ayant reçu d’Épaphrodite ce qui m’a été envoyé de votre part,… un parfum de bonne odeur, un sacrifice acceptable, agréable à Dieu: mais mon Dieu suppléera à tous vos besoins selon ses richesses en gloire par le Christ Jésus» (Phil. 4:10-19).

Quel privilège que celui de pouvoir rafraîchir le cœur d’un tel serviteur de Christ à la fin de sa carrière et dans la solitude de sa prison à Rome! Comme l’offrande des Philippiens était acceptable et venait à propos, et quelle dut être leur joie en recevant les témoignages de reconnaissance de l’apôtre! Et qu’elle était précieuse l’assurance qu’il leur donnait que leur offrande était montée comme un parfum de bonne odeur jusqu’au trône et au cœur de Dieu! Qui ne préférerait être un Philippien, suppléant aux besoins de l’apôtre, plutôt qu’un Corinthien mettant en doute son ministère, ou qu’un Galate lui brisant cœur? Quelle immense différence? L’apôtre ne pouvait rien recevoir de l’assemblée de Corinthe; leur état ne le permettait point. Quelques membres de cette assemblée vinrent à son aide, et le fait est rapporté dans les pages inspirées, il est inscrit dans le ciel, et il sera abondamment récompensé dans le royaume à venir. «Or je me réjouis de la venue de Stéphanas, et de Fortunat, et d’Achaïque, parce qu’ils ont suppléé à ce qui a manqué de votre part; car ils ont récréé mon esprit et le vôtre; reconnaissez donc de tels hommes» (1 Cor. 16:17-18).

Nous voyons donc très clairement que, soit sous la loi ou sous l’évangile, c’est selon la volonté et selon le cœur de Dieu que ceux qui sont réellement appelés par Lui à l’œuvre, et qui s’y dévouent entièrement et fidèlement, aient la sympathie cordiale et les secours matériels de ses enfants. Tous ceux qui aiment Christ considéreront comme un bonheur et un privilège de pouvoir Lui faire part de leurs biens dans la personne de ses serviteurs. Lorsqu’il était sur cette terre, il daignait accepter des secours de la part de ceux qui l’aimaient et qui avaient profité de son précieux ministère: «Des femmes aussi qui avaient été guéries d’esprits malins et d’infirmités, Marie, qu’on appelait Magdeleine, de laquelle étaient sortis sept démons, et Jeanne, femme de Chuzas, intendant d’Hérode, et Susanne, et plusieurs autres, qui l’assistaient de leurs biens» (Luc 8:2-3).

Femmes heureuses et privilégiées! Quelle joie de pouvoir assister le Seigneur de gloire dans les jours de son humiliation et de ses besoins terrestres! Leurs noms ont l’honneur d’être enregistrés dans les pages divines, inscrits par le Saint Esprit, et portés sur le fleuve du temps jusque dans l’éternité. Bien en prît à ces femmes de ne pas avoir dépensé leur argent en superfluités, ni de l’avoir entassé pour être en malédiction pour leurs âmes, comme c’est le cas lorsqu’on ne s’en sert pas pour Dieu!

Mais, d’un autre côté, nous voyons combien il est nécessaire que tous ceux qui agissent, soit au dedans, soit au dehors de l’assemblée, se gardent parfaitement libres de toute influence humaine, et ne s’attendent point à l’homme, de quelque manière que ce soit. C’est avec Dieu qu’ils doivent avoir à faire dans le secret de leurs âmes; sans cela, ils succomberont certainement, tôt ou tard. Ils ne doivent s’attendre qu’à Lui pour subvenir à leurs besoins. Si l’Église les néglige, c’est elle qui y perdra le plus. S’ils peuvent subvenir à leurs besoins par le travail de leurs mains, sans nuire à leur service pour Christ, tant mieux; évidemment c’est ce qui vaut le mieux, nous en sommes pleinement persuadés. Il n’y a rien de plus beau, moralement et spirituellement, que de voir un vrai serviteur de Christ entretenant lui-même et sa famille à la sueur de son front ou de son cerveau, et se donnant, en même temps avec zèle à l’œuvre du Seigneur, soit comme évangéliste, comme pasteur ou docteur. L’extrême opposé se montre à nous en la personne d’un homme qui, sans dons et sans vie spirituelle, embrasse ce qu’on appelle le ministère, comme toute autre profession ou moyen d’existence. La position d’un tel homme est moralement dangereuse et tout ce qu’il y a de plus misérable. Nous ne nous y arrêterons pas, vu que ce serait sortir de notre sujet, et préférons de beaucoup continuer notre chapitre.

«Quand tu seras entré dans le pays que l’Éternel, ton Dieu, te donne, tu n’apprendras pas à faire selon les abominations de ces nations: il ne se trouvera au milieu de toi personne qui fasse passer par le feu son fils ou sa fille, ni devin qui se mêle de divination, ni pronostiqueur, ni enchanteur, ni magicien, ni sorcier, ni personne qui consulte les esprits, ni diseur de bonne aventure, ni personne qui interroge les morts; car quiconque fait ces choses est en abomination à l’Éternel; et à cause de ces abominations, l’Éternel, ton Dieu, les dépossède devant toi. Tu seras parfait avec l’Éternel, ton Dieu. Car ces nations, que tu vas déposséder, écoutent les pronostiqueurs et les devins; mais pour toi, l’Éternel, ton Dieu, ne t’a pas permis d’agir ainsi» (vers. 9-14).

Il se peut qu’en lisant ce passage, le lecteur se demande quelle application il peut avoir aux chrétiens de profession? Nous lui demanderons à notre tour s’il n’y a pas des chrétiens de profession qui vont assister à ce que font des sorciers, des magiciens et des nécromanciens? N’y en a-t-il pas qui s’occupent de tables tournantes, d’esprits frappeurs, de magnétisme animal ou de seconde vue? S’il en est ainsi, le passage que nous venons de citer s’applique à eux et cela d’une manière solennelle. Nous croyons fermement que toutes ces choses sont du diable. Nous sommes persuadés que lorsqu’on se prête, d’une manière ou d’une autre, à la terrible évocation des esprits, on se place entre les mains de Satan pour être entraîné et trompé par ses mensonges. Qu’ont besoin des tables tournantes et des esprits frappeurs ceux qui ont entre les mains une révélation parfaite de Dieu? Nul besoin, assurément. Et si, n’étant pas satisfaits d’avoir cette précieuse Parole, ils se tournent vers les esprits d’amis défunts ou d’autres, que peuvent-ils attendre, sinon que Dieu les abandonne à être aveuglés et égarés par de mauvais esprits qui paraissent et personnifient les défunts, et prononcent toute espèce de mensonges?

Nous ne chercherons pas à approfondir ce sujet maintenant; nous n’avons ni le temps, ni le désir de le faire; mais nous nous sentons pressés de mettre le lecteur en garde contre le grand danger qu’il y a à consulter les esprits de ceux qui ne sont plus. Nous n’entrerons pas dans la question de savoir si les âmes peuvent revenir dans ce monde; sans doute que Dieu pourrait le permettre s’il le jugeait à propos, mais nous laissons ce sujet de côté. Le grand point que nous devons toujours avoir devant nos cœurs, c’est la parfaite suffisance de la révélation divine. Qu’avons-nous besoin des esprits? L’homme riche s’imaginait que si Lazare retournait sur la terre et parlait lui-même à ses cinq frères, cela produirait un grand effet sur eux: «Je te prie donc, père, de l’envoyer dans la maison de mon père, car j’ai cinq frères, en sorte qu’il les adjure; de peur qu’eux aussi ne viennent dans ce lieu de tourment. Mais Abraham lui dit: Ils ont Moïse et les prophètes; qu’ils les écoutent. Mais il dit: Non, père Abraham; mais si quelqu’un va des morts vers eux, ils se repentiront. Et il lui dit: S’ils n’écoutent pas Moïse et les prophètes, ils ne seront pas persuadés non plus si quelqu’un ressuscitait d’entre les morts» (Luc 16:27-31).

Voilà ce qui tranche la question. Si les hommes n’écoutent pas la parole de Dieu, s’ils ne veulent pas croire ce qu’elle leur dit, d’une manière si claire et si solennelle, sur eux-mêmes, sur leur état actuel et sur leur destinée future, ils ne seraient pas persuadés non plus lors même que des milliers d’esprits reviendraient leur dire ce qu’ils ont vu, entendu et éprouvé dans le ciel ou dans l’enfer; cela ne produirait sur eux aucun effet permanent ou salutaire. Cela pourrait causer une grande sensation, être le sujet de bien des conversations et remplir les journaux, mais cela s’arrêterait là. Les hommes n’interrompraient point leurs occupations et leurs plaisirs, leurs gains et leurs folies. «S’ils n’écoutent pas Moïse et les prophètes», — et nous pouvons ajouter Christ et ses saints apôtres, — «ils ne seront pas persuadés non plus, si quelqu’un ressuscitait d’entre les morts». Le cœur qui ne se soumet pas à l’évidence des Écritures, ne sera convaincu par rien et quant au vrai croyant, il trouve dans l’Écriture tout ce dont il peut avoir besoin, et par conséquent il n’a que faire des tables tournantes, des esprits frappeurs, ou de la magie: «Et s’ils vous disent: Enquérez-vous des évocateurs d’esprits et des diseurs de bonne aventure, qui murmurent et qui chuchotent,… un peuple ne s’enquiert-il pas de son Dieu? ira-t-il aux morts pour les vivants? À la loi et au témoignage! S’ils ne parlent pas selon cette parole, il n’y a pas d’aurore pour lui» (Ésaïe 8:19-20).

C’est là, qu’en tout temps et en tout lieu, est la ressource divine pour les enfants de Dieu, et c’est à cela que Moïse renvoie l’assemblée dans le magnifique paragraphe qui termine notre chapitre. Il leur montre clairement qu’ils n’ont aucun besoin de s’adresser aux devins, aux sorciers, aux enchanteurs, ou aux diseurs de bonne aventure, qui tous étaient en abomination à l’Éternel. «L’Éternel ton Dieu», dit-il, «te suscitera un prophète comme moi, du milieu de toi, d’entre tes frères; vous l’écouterez, selon tout ce que tu demandas à l’Éternel, ton Dieu, à Horeb, le jour de la congrégation, disant: Que je n’entende plus la voix de l’Éternel, mon Dieu, et que je ne voie plus ce grand feu, afin que je ne meure pas. Et l’Éternel me dit: Ils ont bien dit ce qu’ils ont dit. Je leur susciterai un prophète comme toi, du milieu de leurs frères, et je mettrai mes paroles dans sa bouche, et il leur dira tout ce que je lui commanderai. Et il arrivera que l’homme qui n’écoutera pas mes paroles, lesquelles il dira en mon nom, moi, je le lui redemanderai. Seulement, le prophète qui prétendra dire en mon nom une parole que je ne lui aurai pas commandé de dire, ou qui parlera au nom d’autres dieux, ce prophète-là mourra. Et si tu dis dans ton cœur: Comment connaîtrons-nous la parole que l’Éternel n’a pas dite? Quand le prophète parlera au nom de l’Éternel, et que la chose n’aura pas lieu et n’arrivera pas, c’est cette parole-là que l’Éternel n’a pas dite; le prophète l’a dite présomptueusement tu n’auras pas peur de lui» (vers. 15-22).

Nous ne saurions hésiter à reconnaître dans ce prophète notre adorable Seigneur et Sauveur Jésus Christ. Au chapitre 3 des Actes, Pierre lui applique ainsi les paroles de Moïse: «Et qu’il envoie Jésus Christ, qui vous a été préordonné, lequel il faut que le ciel reçoive, jusqu’aux temps du rétablissement de toutes choses dont Dieu a parlé par la bouche de ses saints prophètes de tout temps. Moïse déjà a dit: Le Seigneur, votre Dieu, vous suscitera d’entre vos frères un prophète comme moi; vous l’écouterez dans tout ce qu’il pourra vous dire; et il arrivera, que toute âme qui n’écoutera pas ce prophète sera exterminée d’entre le peuple» (vers. 20-23).

Quel précieux privilège que celui d’écouter la voix d’un tel prophète? C’est la voix de Dieu lui-même parlant par la bouche de l’Homme Christ Jésus, non du milieu des tonnerres et des éclairs, et du feu consumant, mais avec le son doux et subtil de l’amour et de la grâce qui rafraîchit le cœur brisé et l’esprit contrit, et tombe comme la rosée des cieux sur la terre altérée. Nous trouvons cette voix dans la Sainte Écriture, la précieuse révélation qui est placée si constamment et si puissamment devant nous dans notre étude de ce beau livre du Deutéronome. Ne l’oublions jamais; la voix de l’Écriture est la voix de Christ, et la voix de Christ est la voix de Dieu.

Nous n’avons nul besoin d’autre chose. Si quelqu’un avait la prétention de venir avec une nouvelle révélation, ou quelque vérité nouvelle qui ne se trouve pas dans le volume divin, nous devrions le juger, lui et son enseignement, à la lumière de l’Écriture, et les rejeter entièrement. «Tu n’auras pas peur de lui». Les faux prophètes se présentent d’habitude avec de hautes prétentions, des paroles pompeuses, et une apparence de dévotion. Ils tâchent de s’entourer d’une auréole de dignité et d’importance qui souvent en impose aux ignorants; mais ils ne peuvent résister à la puissance scrutatrice de la parole de Dieu. Un simple passage de la Sainte Écriture leur enlève toute leur importance, et coupera à sa racine leur merveilleuse révélation. Ceux qui connaissent la voix du vrai Prophète n’en écouteront aucune autre; ceux qui ont entendu la voix du bon Berger n’écouteront pas la voix d’un étranger.

Lecteur, prenez garde à n’écouter que la voix de Jésus.