Amos

Chapitre 3

Chapitre 3 à 5 (v. 17) — Écoutez cette parole

Chapitre 3

Dans la première division, de notre prophète (chap. 1-2) nous avons vu que les mots: «Ainsi dit l’Éternel» annonçaient un jugement certain, déjà arrêté. Le décret ne pouvait être révoqué. Juda, puis les dix tribus, n’étaient pas séparés des nations environnantes. La seule différence est que, plus rapprochés de l’Éternel, donc plus coupables que les peuples idolâtres leurs voisins, les griefs formulés contre eux dépassent les premiers en nombre et en gravité. Israël surtout avait mis le comble à ses iniquités. Son état moral était pire encore que ses actes. Si Juda était taxé de désobéissance, du mépris de la parole divine et d’idolâtrie, Israël était caractérisé par l’absence absolue de crainte de Dieu: telle était leur condition spirituelle. Les nations sont jugées pour leur conduite envers le peuple de Dieu, Israël, en particulier, pour sa conduite envers l’Éternel, dans la personne de ceux qui Le représentent ici-bas, pauvre Résidu sur lequel Ses yeux reposent avec complaisance. Il en fut de même plus tard pour la tribu de Juda. Aux jours de Jésus, ceux qui confessaient leurs péchés, les «excellents de la terre»; les pauvres, les débonnaires, les persécutés, étaient les objets spéciaux de sa sollicitude. L’Évangile était annoncé à ces pauvres du troupeau, les promesses leur étaient faites; ils étaient déclarés bienheureux les consolations étaient pour eux, quand, semblables à leur Maître, ils étaient poursuivis, persécutés, mis à mort par les conducteurs de Juda. Dans cette seconde division une nouvelle interpellation, un suprême appel est adressé à Israël: «Écoutez cette parole!»

N’oublions pas que, lorsqu’Amos prophétisait, le peuple d’Israël sous Ozias, et particulièrement sous Jéroboam 11, après avoir subi des jugements terribles, mais partiels, était parvenu de nouveau au comble d’une prospérité relative. La richesse, le luxe, le repos, l’adoucissement, disons plutôt l’amollissement des mœurs, une vie de bien-être sans précédent depuis Salomon, caractérisaient ce peuple. On peut dire que ces temps ont plus d’un point de contact avec les nôtres. Jamais le monde ne semble avoir été plus florissant quant à ses intérêts matériels, alors que son oubli de Dieu, sa corruption morale ont atteint leur comble. Soudain la longue patience de Dieu arrive à son terme, au moment où le monde s’y attendait le moins et semblait le plus prospère. L’Éternel rugit de Sion; le tremblement e terre, annoncé par le prophète, s’abat sur Israël; le cataclysme dont il est le centre l’atteint et s’étend à tous ses voisins!

Depuis ce troisième chapitre, l’Éternel s’adresse à l’ensemble du peuple, sans perdre de vue son objet principal, et le plus proche: le jugement terrible qui, sous peu d’années, s’abattrait sur les dix tribus.

«Écoutez cette parole que l’Éternel prononce sur vous, fils d’Israël, sur la famille entière que j’ai fait monter du pays d’Égypte, disant: Je vous ai connus, vous seuls, de toutes les familles de la terre; c’est pourquoi je visiterai sur vous toutes vos iniquités» (v. 1, 2). Dieu ne sépare pas la famille entière, quand il parle de ses miséricordes passées. La division des tribus était le fruit de leurs péchés et Dieu l’avait permise comme jugement sur elles et non point par une faveur spéciale. Le temps arriverait où le lien rompu entre Juda et Israël serait rétabli et où ces frères ennemis réunis par la grâce, habiteraient de nouveau bien unis ensemble. Pour le moment Dieu les réunit dans le jugement; mais c’était comme «famille entière» qu’Il les avait jadis rachetés d’Égypte. La rédemption les avait considérés comme formant une unité, la régénération les verra réunis en un. Il en est de même de l’Église. Jadis Christ l’a aimée et s’est donné lui-même pour elle; aujourd’hui elle est bien plus divisée que les douze tribus ne l’ont jamais été. Dans l’avenir le Seigneur se la présentera une, son Épouse purifiée, sans tache ni ride, dans la gloire. Aujourd’hui le Seigneur lui dit: «Écoutez cette parole». Israël étant mis à part de toutes les nations qui l’entouraient, une responsabilité très grave en était pour lui la conséquence: «C’est pourquoi je visiterai sur vous toutes vos iniquités». Nous ne pouvons assez méditer cet important principe. La grandeur de notre responsabilité se mesure à la grandeur de notre privilège. Un Moïse, l’ami de Dieu, est jugé plus sévèrement pour un seul manquement qu’un ignorant qui ne jouit pas de ce privilège, ou n’y a pas de part. Il en est de même pour les peuples. Ceux qui ont été illuminés des clartés de la Parole sont jugés plus sévèrement que ceux qui, en étant privés, ont vécu dans la nuit de l’ignorance. Les plus privilégiées des nations protestantes méprisent celles qui vivent dans les ténèbres du catholicisme, oubliant que c’est sur elles-mêmes que tomberont les coups les plus sensibles. Elles doivent avoir affaire à Dieu et non pas se vanter de leurs privilèges. C’est avec Dieu que l’homme est en chemin. «Deux hommes peuvent-ils marcher ensemble s’ils ne sont pas d’accord?» (v. 3). Cette vérité s’applique aussi bien aux peuples qu’aux individus. En Luc 12:54-59, les hommes auraient dû discerner le temps du Seigneur et comprendre que si la grâce était avec eux dans ce moment-là comme une ondée, le jugement brûlant, le vent du midi, dont il est dit: «Il fera chaud», était près de souffler. Les choses en étant là, ne voyaient-ils pas qu’il s’agissait pour eux d’échapper au jour de jugement? «Quand tu vas avec ta partie adverse devant le magistrat, efforce-toi en chemin d’en être délivré, de peur qu’elle ne te tire devant le juge; et le juge te livrera au sergent, et le sergent te jettera en prison. Je te dis que tu ne sortiras point de là, que tu n’aies payé jusqu’à la dernière pite.» Pour les individus comme pour les peuples, le seul moyen d’échapper au pouvoir judiciaire est de s’efforcer d’en être délivré, tandis qu’on est en chemin avec lui. Comment cela peut-il se faire? En acceptant d’avance comme juste le jugement mérité, en se reconnaissant coupable, et en ayant recours à la grâce.

Dans notre passage, l’Esprit nous montre plutôt l’impossibilité de marcher avec Dieu si l’on n’est pas d’accord avec Lui. La prétention du monde à posséder la faveur de Dieu contredit absolument ce que la Parole nous présente ici. Le monde n’est nullement d’accord avec Dieu sur la nécessité de sa propre condamnation. Il parle de sa juste cause, prétend combattre pour la justice et pour le droit, et ne voit pas que Dieu le taxe d’iniquité et d’injustice, que Dieu est foncièrement en désaccord avec lui, et ne peut prendre en main sa cause, puisqu’il est perdu sans espoir. Oui, le jugement est à la porte: Israël ne s’en apercevait pas. Le lion rugissait dans la forêt, ayant déjà sa proie et prêt à la dévorer. Le lionceau, instrument de jugements moindres ou partiels, avait pris quelque chose. Le filet était tendu pour l’oiseau imprudent qui allait tomber dans le piège. Celui-ci allait se lever du sol, retenant captifs dans ses mailles ceux qu’il avait attirés. Déjà les avertissements s’étaient fait entendre, la trompette avait sonné dans la ville... le peuple avait-il tremblé? Avait-il reconnu la main de l’Éternel quand le mal s’était abattu sur quelque région limitée du territoire d’Israël? (v. 4-6). Dieu avait proclamé l’imminence des jugements; les forêts, les champs, les villes d’Israël en étaient les témoins; mais où se trouvaient des oreilles pour entendre?

Et pourtant Dieu ne s’était pas contenté de parler par des calamités ou des jugements partiels. Il n’avait rien exécuté sans avertissement préalable: «Or le Seigneur, l’Éternel, ne fera rien, qu’il ne révèle son secret à ses serviteurs les prophètes» (v. 7). Tel était le rôle des prophètes, dont le nombre se multipliait d’autant plus en Israël que le jugement était plus proche. Dieu leur avait révélé son secret: ce fait est d’une importance capitale pour tous les temps. Les Écritures remplacent maintenant le prophète, car il était en Israël le messager de la parole de Dieu et annonçait le secret du Seigneur. Pour connaître ce secret, nous pouvons aujourd’hui consulter la Parole. Elle nous fait connaître comme le prophète en Israël, le jugement de Dieu et la grâce qui s’élève au-dessus du jugement. Nous sommes aujourd’hui les confidents de ce secret renfermé dans les Écritures. Soyons-y attentifs. Restons avec le prophète et non avec le monde qui ne veut pas écouter le secret révélé au serviteur de l’Éternel quand le lion a rugi. Annonçons aux hommes le seul moyen d’échapper au juge. Comme le prophète qui avait le secret de Dieu, notre part est d’être absolument séparés d’un monde mûr pour le jugement. Hélas! comme Israël il nous commande aujourd’hui, disant: «Ne prophétisez pas!» (2:12). Toutefois, que rien ne nous entrave: «Le lion a rugi: qui n’aura peur? Le Seigneur, l’Éternel, a parlé: qui ne prophétisera?» Les hommes ont beau chanter pour se donner du courage, exulter en proclamant d’avance la victoire: Ils ont peur! Le nuage, sillonné d’éclairs, descend toujours plus bas sur leur tête, grandit sur eux, les enveloppe; ils ont peur en chantant des hymnes de triomphe. Ils emploient toute leur énergie pour vaincre la tempête; ils s’écrient: Je tiens ferme, je réussis, mes forces viendront à bout de la furie des éléments — dans le fond de leur âme ils ont peur. Jamais ils ne l’avoueront, mais qu’ils soient dans un camp ou dans l’autre, ils ont peur. Peuvent-ils quelque chose contre le lion qui a rugi, contre l’Éternel qui a parlé, contre le dominateur, déjà en possession de sa proie? La tâche du croyant est de prophétiser, parce qu’il a le secret de Dieu. Chrétiens, ne manquons pas de le faire; que notre voix, que la parole de Dieu soit entendue distinctement au milieu des éléments déchaînés, ne fût-ce que pour convaincre le monde de péché, de justice et de jugement, ne fût-ce que pour sauver du piège de l’oiseleur quelque pauvre oiseau fasciné par le miroir sur lequel un filet a été tendu!

Au v. 9 Dieu appelle la Philistie (Asdod) et l’Égypte à s’assembler sur les montagnes de Samarie pour voir «la grande confusion qui est au milieu d’elle, et les oppressions qui ont lieu dans son sein: et ils ne savent pas faire ce qui est droit... eux qui amassent la violence et la rapine dans leurs palais». Ce n’est pas que Dieu disculpe ces nations, car la Philistie a été signalée au premier chapitre comme un des objets du jugement, à cause de l’oppression exercée sur les captifs des dix tribus, et Dieu prend ces nations à témoin des iniquités d’Éphraïm, afin qu’elles comprennent que, s’il juge Israël par leur moyen, ce n’est pas qu’il les tienne pour innocentes, mais qu’Il revendique d’autant plus son caractère vis-à-vis de tout mal, là où Son nom est invoqué. Combien peu cette vérité est comprise aujourd’hui! Une nation qui en asservit une autre croit que Dieu l’emploie et l’approuve parce qu’elle est meilleure que son ennemi vaincu. Qu’elle médite ces versets! Dieu se sert de la Philistie et de l’Égypte pour châtier et non comme preuve de faveur sur ces nations. «Le reste des Philistins périra» (1:8), avait dit le Seigneur. Qu’ils prennent donc garde! Ils ne seront pas les objets de la grâce au milieu du renversement opéré par eux, mais du sein du peuple, écrasé par le jugement, l’Éternel sauvera un pauvre petit Résidu. «Comme le berger sauve de la gueule du lion deux jambes ou un bout d’oreille, ainsi seront sauvés les fils d’Israël qui sont assis à Samarie sur le coin d’un lit, et sur le damas d’un divan» (v. 12). Il en restera des débris qui, tout mutilés qu’ils soient, pourront être reconnus du berger auquel ils appartiennent. Le Résidu d’un peuple, voué à la destruction, sera recueilli par le pasteur du troupeau. Un seul homme, Christ, est sorti indemne de la gueule du lion sans être dévoré. En butte aux traits des tireurs de l’arc, «sa force est restée en son entier»; au sein même de la mort Il a été «la puissance de Dieu».

Ce petit Résidu est l’objet de la sollicitude de l’Éternel. On le voit reparaître au chap. 5, vers. 15: «Peut-être l’Éternel, le Dieu des armées, usera-t-il de grâce envers le reste de Joseph», s’il revient au bien. Ce même Résidu est encore, au chap. 4, vers. 11 comme «un tison sauvé d’un incendie». De même, au chap. 9:8, en parlant des douze tribus il dit: «Seulement je ne détruirai pas entièrement la maison de Jacob». Puis vient l’annonce de ce que l’Éternel fera à la fin des jours, quand il rétablira Israël (v. 11-15). Toutes les voies de Dieu envers son peuple se terminent par un chant de triomphe. Ses jugements sont invariablement suivis du résultat de sa fidélité à ses promesses, en un mot de sa grâce!

«Écoutez», dit le Seigneur (v. 13). Les prophètes avaient fait entendre aux ennemis le cri de rassemblement (v. 9). Ici, ces mêmes prophètes rendent partout témoignage en Israël, car ils sont seuls à écouter. Le tremblement de terre ne vous a-t-il pas servi d’avertissement? La destruction atteindra vos faux autels; celui de Béthel tombera à terre. Sous Jéroboam 1er, le vieux prophète avait prophétisé contre ce même autel de Béthel. Séance tenante sa malédiction S’était réalisée (1 Rois 13:2, 5) comme signe de ce qui allait arriver. Josias accomplit cette prophétie (2 Rois 23:15) cent ans environ après les paroles d’Amos, car, nous l’avons dit souvent, le trait particulier de ce prophète est d’annoncer des jugements prochains.

Toute la prospérité et les richesses accumulées par les hommes efféminés de Samarie disparaîtront dans la tourmente: «Je frapperai la maison d’hiver avec la maison d’été, et les maisons d’ivoire périront, et beaucoup de maisons cesseront d’exister, dit l’Éternel» (v. 15).

L’opulence dont le monde se vante et qu’il recherche comme son but suprême est un des traits particuliers de ce prophète (voyez 3:12, 15; 5:11; 6, 1:4-6). Tout cela est jugé1.

1 Une seconde charge qui revient souvent dans ce livre est l’oppression des chétifs (voyez 2:7-8; 3:10; 4:1; 5:11; 8:5-6).