Actes des Apôtres

Chapitre 27

Départ pour Rome

(v. 1-8). — Le départ pour l’Italie décidé, Paul et d’autres prisonniers furent remis à un centurion nommé Jules, qui faisait partie de la cohorte Auguste, unité de l’armée romaine portant le nom du célèbre empereur. On les embarqua sur un navire d’Adramytte, port de l’Asie Mineure. Aristarque de Thessalonique accompagnait Paul; nous l’avons déjà vu avec l’apôtre à Éphèse (chap. 19), puis en Macédoine. Il paraît avoir été prisonnier à Rome, puisque l’apôtre l’appelle son compagnon de captivité en écrivant aux Colossiens (chap. 4:10), et aussi son compagnon d’œuvre, dans l’épître à Philémon. Sans doute plusieurs frères accompagnaient Paul, entre autres Luc, l’auteur du livre des Actes. Le navire, devant faire escale aux ports de la côte d’Asie, aborda le lendemain à Sidon. Le centurion qui traitait Paul avec humanité, est-il dit au verset 3, lui permit d’aller avec ses compagnons voir leurs amis, afin de bénéficier de leurs soins. De là, ils partirent pour Chypre, les vents étant contraires, ils voguèrent à l’abri de cette île et arrivèrent à Myra, port situé au sud-ouest de l’Asie Mineure. Leur navire devant continuer sa course vers le nord, ils le quittèrent pour prendre un bateau d’Alexandrie qui allait en Italie. À cause du vent défavorable, le navire côtoya la Crète et atteignit avec peine Beaux-Ports, près d’une ville nommée Lasée.

 

De l’île de Crète à Malte

(v. 9-44). — La saison était avancée. À cette époque, on ne naviguait guère en hiver, car les voiliers étaient incapables de lutter contre les tempêtes de la saison. Il est dit (v. 9) que le jeûne était passé: il correspondait à la fête des propitiations, qui avait lieu le septième mois de l’année juive, en sorte que l’on se trouvait au mois d’octobre ou de novembre. En considérant les dangers de la navigation, Paul conseilla aux matelots de passer l’hiver dans le port où ils se trouvaient; il les avertit que la traversée risquait de causer de sérieux dommages non seulement au chargement et au navire, mais aussi à leurs vies. Mais le centurion se fiait plus au pilote et au capitaine qu’à Paul. Comme le port n’était pas commode pour hiverner, ils résolurent de partir pour Phénice, autre port de Crète, afin d’y passer l’hiver.

Ces hommes ne connaissaient pas l’importance de ce prisonnier qui allait à Rome comme serviteur de Dieu et non comme malfaiteur; ils ne pensaient pas que sa parole eût la valeur de la parole de Dieu, car il leur parlait de sa part. Ils l’apprirent plus tard, lorsque tout ce que Paul avait prévu arriva. Le vent du midi soufflait doucement, ce qui leur était favorable et paraissait leur donner raison. Mais peu après, un vent violent descendit de l’île à l’abri de laquelle ils pensaient voyager. Ne pouvant plus lutter, ils laissèrent aller le navire à la dérive et furent emportés. Toutes les mesures de sûreté n’apportèrent aucune amélioration à leur sort et ils craignirent d’être emportés sur les bancs de sables de la Syrte, grand golfe au nord de l’Afrique, dans la direction duquel le vent les chassait. Ils descendirent les agrès supérieurs du navire1. Le lendemain, ils jetèrent à la mer une partie de la charge, et le troisième jour le reste des agrès, afin d’alléger le bâtiment. Les jours s’écoulaient sans changement, durant lesquels, dit l’écrivain des Actes, «il ne parut ni soleil ni étoiles»; tout espoir de salut s’évanouit.

1 Les agrès sont tous les objets qui font partie de la mâture d’un bâtiment: voiles, cordages, vergues, etc.

Quand l’homme est à bout de ressources, parce qu’il n’a pas écouté la voix de la sagesse, Dieu peut intervenir. La vie de l’équipage et des passagers était entre ses mains et tout particulièrement son serviteur Paul qu’il envoyait à Rome. C’est lui qui sera écouté, maintenant que la sagesse de ceux auxquels le centurion se fiait «est venue à néant» (voir Ps. 107:27).

Après avoir été longtemps à jeun, «Paul, se tenant debout au milieu d’eux, dit: Ô hommes, vous auriez dû m’écouter, et ne pas partir de Crète, et éviter ces avaries et ce dommage. Et maintenant je vous exhorte à avoir bon courage; car on ne fera la perte de la vie d’aucun de vous, mais seulement du navire. Car un ange du Dieu à qui je suis et que je sers, est venu à moi cette nuit, disant: Ne crains point, Paul: il faut que tu comparaisses devant César; et voici, Dieu t’a donné tous ceux qui naviguent avec toi. C’est pourquoi, ô hommes, ayez bon courage; car je crois Dieu, et je sais que la chose arrivera comme il m’a été dit. Mais il faut que nous soyons jetés sur quelque île» (v. 21-27). De tous ceux qui se trouvaient à bord, aucun ne pensait qu’au milieu d’eux se trouvait un homme en relation avec le ciel et auquel un ange était apparu au milieu de la tempête. Insignifiant comme un prisonnier pouvait l’être, c’est de lui que tous dépendaient. «Dieu t’a donné tous ceux qui naviguent avec toi», lui avait dit l’ange. Quel contraste avec un autre homme, aussi un serviteur de Dieu, au milieu d’une tempête sur les mêmes eaux, alors que tout espoir de sauver le navire était perdu. Le salut commun dépendait aussi de lui, mais par un tout autre moyen. Il s’agit de Jonas, le prophète, qui fuyait de devant l’Éternel, afin de ne pas s’acquitter du message adressé par lui à Ninive. Ayant désobéi, il comprend qu’il est la cause de cette tempête et indique lui-même le moyen de l’arrêter. Il faut le jeter à la mer. Paul, au contraire, était dans le chemin de Dieu, envoyé à Rome pour rendre témoignage devant l’empereur et les grands de ce monde, ainsi que le Seigneur l’avait dit à Ananias au chap. 9:15. De tels faits, et tant d’autres dans la Parole, nous font voir que ce qui importe pour un serviteur de Dieu, comme pour tout croyant, c’est d’obéir, dès que l’on connaît la volonté de Dieu. Ils nous montrent aussi que ce qui importe pour Dieu ici-bas, ce sont ceux qui lui appartiennent. Les hommes ne pensent pas que de grands événements, provoqués en apparence par une cause toute naturelle, le sont en réalité par un racheté du Seigneur, et en tout cas par la volonté de Dieu qui a toujours des raisons pour agir comme il le trouve bon.

Lorsque vint la quatorzième nuit de ce terrible voyage, le navire errait sur la mer Adriatique, dirigé, par celui qui commande aux vents et à la mer, vers l’ouest plutôt que vers les côtes de l’Afrique. Pensant qu’ils approchaient de la terre, les matelots jetèrent la sonde et trouvèrent vingt brasses de profondeur, un peu plus loin quinze brasses. Craignant que le navire ne donnât contre un écueil, ils l’immobilisèrent au moyen d’une ancre. Ensuite ils descendirent la chaloupe à la mer, sous prétexte d’aller jeter plus loin les ancres de la proue, mais avec l’intention de s’enfuir. Alors Paul dit au centurion et aux soldats: «Si ceux-ci ne demeurent pas dans le navire, vous ne pouvez être sauvés» (v. 31). En entendant cela, les soldats coupèrent les cordes de la chaloupe qui tomba à la mer. En attendant le jour, Paul les exhorta à prendre de la nourriture, «car», dit-il, «cela est nécessaire pour votre conservation; car pas un cheveu de la tête d’aucun de vous ne périra» (v. 33, 34).

Ces exhortations de Paul nous fournissent un enseignement, tant celles relatives aux matelots qui devaient rester dans le navire pour le salut de tous, que celles qui concernent la nécessité de prendre de la nourriture.

Dieu place à la disposition de chacun les moyens d’existence et de conservation. Les matelots ayant pour métier tout ce qui touche à la marche et à l’entretien d’un navire avaient donc la responsabilité du bateau; à eux de faire leur service. C’est pourquoi Paul leur enjoint de rester à bord. Dieu peut accomplir des miracles quand Il le trouve à propos; mais tant que nous avons à notre disposition les moyens qu’Il nous a donnés pour nous en servir, nous devons en user. Il en va de même pour la nourriture. Un homme ne peut vivre sans manger et Dieu a pourvu à la nourriture dont il a besoin. Comme elle ne manquait pas dans ce navire, ils avaient à la consommer, il est probable que, venant d’Alexandrie en Égypte, il transportait du blé, ce que confirme le verset 38. On ne peut dire que Dieu nous garde lorsque nous nous exposons au danger. Si c’est par obéissance que nous avons à le faire, nous pouvons compter sur Dieu sans crainte. Le Seigneur nous exhorte à ne pas nous mettre en souci pour la vie, ni de ce que nous mangerons ou boirons, ni de quoi nous serons vêtus; notre Père sait que nous avons besoin de ces choses, il y pourvoira (lire Matthieu 6:24-34). Mais comment le fait-il? Normalement c’est par le travail de nos mains. Nous ne pouvons pas compter sur Dieu et ne rien faire. S’il juge à propos de nous retirer le travail ou la capacité de travailler, il faut compter sur sa fidélité; il interviendra par ses moyens à Lui. Il est bon d’être exercé à dépendre de Lui seul en recherchant premièrement son royaume et sa justice, comme le Seigneur le dit dans les passages cités plus haut. Paul avait donc raison de dire, en exhortant les matelots à prendre de la nourriture, que c’était nécessaire à leur conservation, puisque Dieu conserve ses créatures en leur fournissant les aliments et les moyens de les obtenir.

Lorsque Paul eut exhorté à manger, il prit du pain et rendit grâces à Dieu devant tous; et, l’ayant rompu, il se mit à manger. Et ayant tous pris courage, eux aussi prirent de la nourriture. «Or nous étions en tout dans le navire deux cent soixante-seize personnes» (v. 35-37). Ensuite ils jetèrent le froment à la mer pour alléger le bâtiment. Le jour venu, ils se trouvèrent en face d’une terre qu’ils ne connaissaient pas. Ils aperçurent une baie, bordée d’une plage sur laquelle ils résolurent de faire échouer le navire si possible. Pour cela, ils coupèrent les câbles des ancres et laissèrent libre le gouvernail, puis mirent au vent la voile d’artimon (celle qui est le plus en arrière). Ainsi, poussé par les vagues vers la côte, le navire s’échoua. La proue engagée dans la plage demeura immobile, tandis que la poupe se rompait. Craignant que les prisonniers ne s’enfuient, les soldats proposèrent de les tuer; mais le centurion, voulant sauver Paul, les en empêcha. Il ordonna à ceux qui savaient nager de se jeter les premiers à la mer pour gagner la terre; aux autres d’utiliser des planches et des débris du navire. Ainsi, tous parvinrent à terre sains et saufs, comme Paul le leur avait dit.