Actes des Apôtres

Chapitre 26

Apologie de Paul devant Agrippa

(v. 1-32). — Lorsque Paul reçut la permission de parler, il commença en disant: «Je m’estime heureux, roi Agrippa, de ce que, au sujet de toutes les choses dont je suis accusé par les Juifs, je dois faire mon apologie aujourd’hui devant toi, surtout parce que tu es au fait de toutes les coutumes et questions qui existent parmi les Juifs; c’est pourquoi je te prie de m’écouter avec patience» (v. 1-3). Heureux de se trouver devant un auditoire qui ne lui était pas hostile comme les Juifs du chap. 23, il saisissait avec joie l’occasion de présenter la vérité devant un roi et sa cour.

Il rappelle sa manière de vivre dès sa jeunesse, telle que les Juifs la connaissaient et dont ils pouvaient rendre témoignage, car il avait été pharisien, pratiquant méticuleusement le culte juif. S’il comparaissait en jugement, c’était pour «l’espérance de la promesse faite par Dieu à nos pères, à laquelle nos douze tribus, en servant Dieu sans relâche nuit et jour, espèrent parvenir; et c’est pour cette espérance, ô roi, que je suis accusé par les Juifs» (v. 4-7). Il répète ici, en partie, son discours devant Ananias (chap. 23:7). Quelle est l’espérance de la promesse de Dieu à Israël? C’est Christ, annoncé par les prophètes, pour introduire ce peuple dans le beau règne dont ils avaient tous parlé et dont les douze tribus jouiront. Ce Christ promis est venu; mais il a été rejeté, ce qui a fait renvoyer à plus tard la jouissance des bénédictions annoncées à ce peuple que Paul considérait toujours selon les pensées de Dieu et non dans le triste état dans lequel il se trouvait, haïssant Christ et les siens, et divisé depuis le règne de Roboam, fils de Salomon. En effet, les Juifs du temps du Seigneur, de même que ceux que nous connaissons aujourd’hui, descendaient du royaume de Juda, formé des tribus de Juda et de Benjamin, revenu de la captivité de Babylone sous Esdras pour recevoir le Messie. Les dix tribus qui formaient le royaume d’Israël, avec Samarie pour capitale, avaient été transportées en Assyrie cent quinze ans avant la captivité de Juda. Elles ne sont jamais revenues. Confondues avec les peuples d’orient, elles rentreront dans le pays après la venue du Seigneur en gloire, pour ne former qu’un seul peuple durant le règne de Christ, selon la pensée de Dieu que la foi a toujours reconnue.

Quand le peuple, divisé, vivait dans l’idolâtrie, Élie bâtit un autel composé de douze pierres, «selon le nombre des fils de Jacob, auquel vint la parole de l’Éternel, disant: Israël sera ton nom» (1 Rois 18:31). Paul s’exprime comme il le fait aux versets 6 et 7, parce qu’il reconnaît, comme Élie, le peuple selon la pensée de Dieu. Il en est de même aujourd’hui, relativement à l’Église. La chrétienté professante est dans un triste état; c’est le monde. Mais elle renferme les vrais croyants; ils reconnaissent que la vraie Église, ou Assemblée, se compose de tous ceux qui sont nés de nouveau; que cette Église est une, malgré la dispersion des enfants de Dieu entre les diverses sectes. Ceux qui agissent selon les enseignements de la Parole de Dieu se réunissent autour du Seigneur et prennent la cène à sa Table où l’unité du corps de Christ est exprimée, lors même qu’ils ne seraient que quelques-uns à l’entourer. La foi reconnaît toujours les choses comme Dieu les a établies, malgré la confusion et le désordre qui résultent de l’infidélité de l’homme.

Le motif de sa comparution établi, Paul continue: «Pourquoi, parmi vous, juge-t-on incroyable que Dieu ressuscite des morts?» (v. 8). Tout ce qu’il allait présenter reposait sur le grand fait de la résurrection du Seigneur. Il semble qu’Agrippa soutenait les sadducéens, favorables au gouvernement et négateurs de la résurrection. C’est pourquoi Paul tient à relever, dès le début, l’importance de cette vérité fondamentale du christianisme. Il continue en disant qu’il avait pensé qu’il fallait «faire beaucoup contre le nom de Jésus le Nazaréen»; comment il avait fait souffrir les saints; comment, en les punissant, il les contraignait à blasphémer; comment, transporté de fureur, il les persécutait jusque dans les villes étrangères. Puis, comment il avait été arrêté sur le chemin de Damas, où, jeté à terre sous l’effet d’une lumière plus éclatante que celle du soleil, il avait entendu la voix du Seigneur lui dire en hébreu: «Saul! Saul! pourquoi me persécutes-tu?» Et il ajouta, ce qu’il n’avait pas dit dans son précédent discours sur sa conversion: «Il t’est dur de regimber contre les aiguillons» (v. 14). Ces paroles font comprendre que Paul résistait à la voix de sa conscience, par laquelle Dieu lui parlait. Lorsqu’il persécutait les saints, en voyant leur attitude dans les souffrances et le témoignage qu’ils rendaient, elle avait pu être atteinte, comme ce fut le cas plus tard pour plusieurs persécuteurs des chrétiens. Les hommes redoutaient tellement leur témoignage puissant qu’en conduisant les martyrs au supplice, on les bâillonnait pour les empêcher de parler; car la Parole de Dieu est comme un aiguillon qui atteint la conscience la plus endurcie.

Le Seigneur arrêta soudainement Saul dont il voulait employer la grande énergie et toutes les belles qualités à son service d’amour. Après avoir été terrassé et avoir entendu la voix du Seigneur, Saul dit: «Qui es-tu, Seigneur? Et le Seigneur dit: Je suis Jésus que tu persécutes. Mais lève-toi, et tiens-toi sur tes pieds: car je te suis apparu afin de te désigner pour serviteur et témoin, et des choses que tu as vues et de celles pour la révélation desquelles je t’apparaîtrai, en te retirant du milieu du peuple et des nations vers lesquelles moi je t’envoie pour ouvrir leurs yeux, pour qu’ils se tournent des ténèbres à la lumière, et du pouvoir de Satan à Dieu; pour qu’ils reçoivent la rémission des péchés et une part avec ceux qui sont sanctifiés, par la foi en moi» (v. 16-18).

Dans le v. 18, le Seigneur énumère cinq buts du ministère de Paul: 1° Il doit ouvrir les yeux des nations en leur présentant la Parole; 2° pour qu’ils se tournent des ténèbres à la lumière, que cette Parole ferait briller devant leurs yeux; 3° pour les soustraire au pouvoir de Satan et les amener à Dieu; 4° pour qu’ils reçoivent la rémission des péchés; 5° pour avoir une part avec ceux qui sont sanctifiés, c’est-à-dire tous ceux qui ont été mis à part selon les conseils de Dieu en grâce. Tous ces faits merveilleux seraient obtenus «par la foi en moi», en celui que Saul avait persécuté et que le monde hait. Nous trouvons un résumé du sujet en Col. 1:12-14. «Rendant grâces au Père qui nous a rendus capables de participer au lot des saints dans la lumière; qui nous a délivrés du pouvoir des ténèbres, et nous a transportés dans le royaume du Fils de son amour, en qui nous avons la rédemption, la rémission des péchés». Œuvre merveilleuse accomplie au milieu de ces peuples idolâtres auxquels Paul porta ce message de lumière et d’amour!

Comme le Seigneur le lui a dit, il lui apparut plusieurs fois pour lui révéler ces glorieuses vérités. On remarque aussi qu’il lui dit qu’il le retirait du milieu du peuple et des nations vers lesquelles il l’envoyait. Il le mettait entièrement à part de tout. Paul était un ambassadeur pour Christ (2 Cor. 5:20). Un ambassadeur n’appartient pas au pays où il accomplit sa mission; il y représente son souverain. Paul était dès lors du ciel, un envoyé spécial du Seigneur; mais chaque croyant, quoiqu’il ne soit pas apôtre, est aussi du ciel, étranger dans ce monde. Pour lui, il n’y a ni Juif, ni Grec, ni circoncision, ni incirconcision, ni barbare, ni Scythe (Col. 3:11). Ce qui le caractérise, c’est Christ dont il a la vie.

Après avoir dépeint cette vision et avoir placé devant son auditoire le but de son appel par le Seigneur, Paul dit: «Ainsi, ô roi Agrippa, je n’ai pas été désobéissant à la vision céleste; mais j’ai annoncé premièrement à ceux de Damas, et à Jérusalem, et à tout le pays de la Judée, et aux nations, de se repentir et de se tourner vers Dieu, en faisant des œuvres convenables à la repentance» (v. 19, 20). Paul, en effet, a été prompt à obéir: «Quand il plut à Dieu,… de révéler son Fils en moi... aussitôt, je ne pris pas conseil de la chair ni du sang» (Gal. 1:15, 16). Au lieu d’aller à Damas faire prisonniers les chrétiens de cette ville, il fut compté au nombre des disciples de Christ et commença à prêcher qu’il fallait se repentir et se tourner vers Dieu. La repentance, œuvre intérieure, amène à renoncer à la mauvaise voie suivie jusque-là et se prouve par des faits qui en sont les fruits, démontrant la réalité de l’œuvre de Dieu dans le cœur et la conscience. Jean le Baptiseur le disait à ceux qui venaient à lui: «Produisez donc du fruit qui convienne à la repentance» (Matthieu 3:8). Il ne suffit pas de dire: «Je suis converti». Il faut le prouver par une marche qui découle de la vie que l’on a reçue, car personne ne peut lire dans le cœur pour voir ce qui s’y est passé. Notre entourage doit voir des œuvres qui manifestent la réalité de la foi. On entend souvent dire par des enfants de chrétiens qu’ils sont sauvés, mais on ne voit pas de changement dans leur conduite. Le Seigneur dit: «On connaît l’arbre à son fruit». Pour qu’une plante porte du fruit, il faut la soigner, l’arroser; cette œuvre s’accomplit chez le croyant au moyen de la Parole et de la prière. Par ces deux moyens, la vie de Dieu se développe et se montre. Un enfant sera plus obéissant, il accomplira plus consciencieusement ses devoirs, quels qu’ils soient. On le verra chercher à se corriger de ses défauts avec le secours que Dieu lui donne au moyen de la Parole et de la prière.

Voyant Paul exécuter fidèlement sa mission, les Juifs cherchèrent à le tuer; mais, dit-il: «Ayant reçu le secours qui vient de Dieu, me voici debout jusqu’à ce jour, rendant témoignage aux petits et aux grands, ne disant rien d’autre que ce que les prophètes et Moïse ont dit devoir arriver, savoir qu’il fallait que le Christ fût soumis aux souffrances, et que, le premier par la résurrection des morts il devait annoncer la lumière et au peuple et aux nations» (v. 22, 23). Ainsi, pour trouver Paul en défaut, il eût fallu annuler la Parole de Dieu, dont le grand sujet est Christ, son œuvre et tous ses résultats merveilleux, qui se montreront, pour la terre, dans le règne glorieux du Seigneur, et pour le ciel dans une éternité de gloire. Mais pour jouir de ce que cette Parole nous donne, il faut la croire telle qu’elle est écrite et ne pas chercher en elle ce qui plaît au cœur naturel, comme les Juifs le faisaient, ce qui égare et jette de l’obscurité sur elle. Que de maux les vrais croyants ont endurés, que de sang a été répandu, avec la Parole en mains, par ceux qui l’expliquaient à leur façon, remplis de haine pour ceux qui, la recevant dans sa simplicité, étaient les vrais chrétiens! Que d’erreurs dans les temps actuels, même au milieu de vrais chrétiens, qui ne croient pas simplement ce qu’elle dit et cherchent à l’ajuster à leurs propres pensées.

En entendant parler de choses tellement au-dessus de sa portée, Festus s’écria: «Tu es hors de sens, Paul; ton grand savoir te met hors de sens» (v. 24). En effet, Paul avait un grand savoir; il parlait des choses profondes de Dieu, que la sagesse humaine est incapable de comprendre, tandis qu’elles sont révélées aux petits enfants, c’est-à-dire à celui qui croit comme un petit enfant. «L’homme animal ne reçoit pas les choses... de Dieu, car elles lui sont folie» (1 Corinthiens 2:14). Mais si «le monde, par la sagesse, n’a pas connu Dieu, il a plu à Dieu, par la folie de la prédication, de sauver ceux qui croient» (1 Corinthiens 1:21). Car Dieu veut accomplir ses pensées de grâce.

Paul répondit à Festus: «Je ne suis point hors de sens, très excellent Festus, mais je prononce des paroles de vérité et de sens rassis: car le roi a connaissance de ces choses, et je parle hardiment devant lui, car je suis persuadé qu’il n’ignore rien de ces choses: car ceci n’a point été fait en secret» (v. 25, 26). Roi de ces contrées depuis un certain temps, Agrippa savait ce qui s’y était passé, et comme il professait le judaïsme, il avait une certaine connaissance qui manquait à Festus. Il était d’un caractère plutôt conciliant. Paul lui dit: «Ô roi Agrippa! crois-tu aux prophètes? Je sais que tu y crois. Et Agrippa dit à Paul: Tu me persuaderas bientôt d’être chrétien» (v. 27, 28). On sent le roi un peu gêné par cette déclaration de Paul en présence d’un pareil auditoire. Comme la note du verset 28 le fait comprendre, «tu me persuaderas bientôt d’être chrétien», a le sens de: «tu me fais chrétien en bien peu de temps»; ce qui était compromettant devant cet auditoire païen. Alors, conscient de la grâce merveilleuse que Dieu lui avait faite et de sa supériorité sur tous ceux qu’il avait devant lui. Paul répondit au roi: «Plût à Dieu que non seulement toi, mais aussi tous ceux qui m’entendent aujourd’hui, vous devinssiez de toutes manières tels que je suis, hormis ces liens» (v. 29).

Jouissant de cette faveur d’être enfant de Dieu, possédant cette relation bénie avec Dieu le Père, ayant la gloire en perspective, délivré d’un monde plongé dans les ténèbres, hors du pouvoir de Satan, comment ne pas souhaiter que tous possédassent de si grands privilèges? Paul ne désirait pas pour eux les liens, quoiqu’ils n’ôtassent rien au bonheur qui remplissait son cœur. Le roi et sa suite ne savaient pas qui ils avaient devant eux comme prisonnier et moins encore qui le soutenait dans son témoignage.

S’ils ne l’ont pas appris ici-bas, ils le sauront un jour, alors qu’il sera trop tard pour profiter de la grâce dont Paul était le grand héraut. Mais nous pouvons supposer que le Seigneur accomplit son œuvre dans plusieurs de ceux qui entendirent le message de l’apôtre.

La séance terminée, le roi se retira avec les assistants. Ils émirent cet avis: «Cet homme ne fait rien qui soit digne de mort ou de liens. Et Agrippa dit à Festus: Cet homme aurait pu être relâché, s’il n’en avait appelé à César» (v. 30-32). L’innocence de Paul est reconnue, comme celle du Seigneur l’avait été par Pilate; mais ni l’un ni l’autre n’a été relâché, pour des motifs fort différents. Le Seigneur se livrait lui-même pour accomplir l’œuvre que son Père lui avait donné à faire, l’œuvre de notre salut. Quant à Paul, il en avait appelé à César. Cependant il allait aussi à Rome pour accomplir l’œuvre de Dieu. Mais il ressemblait en bien des points à son divin Maître et, dans ce chemin de douleur, jouissait de sa communion comme peu en ont joui, ainsi que le témoignent les épîtres qu’il écrivit pendant sa captivité à Rome.