2 Thessaloniciens

Henri Rossier

Introduction

Dans nos «Entretiens sur la première Épître aux Thessaloniciens» nous avons remarqué que la venue du Seigneur pour enlever les saints auprès de Lui (l’espérance chrétienne proprement dite), qui forme le sujet capital de cette Épître, ne rentre, en aucune manière, dans le cadre de la prophétie. N’oublions pas cependant que ce mot: la Venue (ou Parousie) s’étend bien au delà de l’événement que nous venons de mentionner. Comme vous le savez tous, l’apparition du Seigneur (son Épiphanie) est le second acte de Sa venue: Il n’aura pas lieu, comme le premier acte, pour enlever les saints, mais pour les ramener avec le Seigneur.

Or c’est de l’apparition du Seigneur que la seconde Épître aux Thessaloniciens nous entretient.

Cependant, l’Esprit de Dieu ne sépare pas ces deux actes d’une manière absolue comme on pourrait l’attendre s’il s’agissait de logique humaine; cela se comprend aisément, car l’Esprit de Dieu ne peut, tout en les différenciant, séparer sa grâce de sa justice, sa vérité de son amour, le royaume céleste de Christ de son royaume terrestre. De plus, les conseils de Dieu forment un ensemble dont toutes les parties se tiennent et se complètent mutuellement. Aussi la Parousie et l’Épiphanie, tout en étant distinctes, se relient nécessairement l’une à l’autre. De là l’expression que vous trouvez au chap. 2, vers. 8: Le Seigneur consumera l’inique par le souffle de sa bouche et l’anéantira «par l’apparition de sa venue» (par l’Épiphanie de sa Parousie).

En contraste avec la première Épître, la seconde ne nous parle qu’une seule fois de Sa Venue, en l’isolant complètement de Son apparition (chap. 2:1), et ce passage, comme nous le verrons, résume par un seul mot le contenu de la première Épître.

Il y a donc un jour qui répond à notre espérance actuelle: le jour où le Seigneur viendra recueillir auprès de Lui tous les saints ressuscités et transmués — et un jour que nous attendons aussi, non pas au même moment, mais au même titre que le premier, parce que nous y aurons une part directe et immédiate, avec notre Sauveur: le jour glorieux où Il viendra avec tous ses saints, préalablement enlevés auprès de Lui, pour établir son royaume par les jugements qu’Il exécutera sur le monde.

Ce mot: «Les jugements» nous ramène nécessairement au contenu de la Prophétie. En effet, les temps et les événements prophétiques, caractérisés par les terribles calamités qui s’abattront sur les hommes, ne commenceront à se dérouler qu’après le moment où le Seigneur aura ravi auprès de Lui les saints de toutes les Économies, avec l’Épouse céleste, son Église. C’est alors que les choses futures (le triomphe apparent, mais momentané de Satan dans le monde) annoncées par tous les prophètes, se succéderont avec une rapidité foudroyante, pour atteindre leur point culminant dans l’Apostasie du Judaïsme et de la Chrétienté (abandon total de Dieu et de son Christ, reniement du Père et du Fils), la plus grande iniquité que le monde puisse encore ajouter au crime d’avoir crucifié le Fils de Dieu. Devant cette Apostasie finale, à la préparation de laquelle nous assistons de plus en plus, la colère et l’indignation de Dieu, différées jusqu’alors par sa longue patience envers les hommes, devront se donner libre cours.

Pour nous croyants, le premier acte de la Venue du Seigneur, sa Parousie, n’est pas, comme nous l’avons dit, un événement prophétique et n’a aucun rapport avec le jugement. Cet acte est l’aube du jour, le couronnement de la grâce, sujet délicieux pour le cœur des rachetés. Quand Jésus viendra ravir son Épouse auprès de Lui, ce ne sera pas pour manifester Sa gloire, aussi le monde ne Le verra-t-il pas, mais les croyants le verront sous les traits de sa grâce, connus d’eux seuls. Comme il était descendu en grâce dans ce monde, afin de laisser sa vie en rançon pour ses rachetés, il reviendra du ciel en grâce pour les rassembler autour de Lui et couronnera sa grâce en les introduisant dans la gloire. En effet, ce moment sera le triomphe définitif de la grâce. Ceux qui avaient appris à la connaître dans toute sa grandeur sur la croix vont en savourer le couronnement glorieux quand Jésus viendra recueillir tous ses saints auprès de Lui.

Pour le monde, qui ne verra ni ne saura rien de ce premier acte, le second, «l’Apparition de sa Venue», sera la lumière du soleil de justice. Elle consumera les incrédules, mais ce sera en vue de la gloire de Christ, afin d’établir sur la terre Son règne de justice et de paix (Mal. 4:1-3).

Cette Épiphanie est l’apparition de sa gloire et nous verrons dans notre chapitre ce qui la caractérise. Il faut que le Sauveur, rejeté, crucifié et méprisé par le monde, soit glorifié comme Seigneur, et il le sera par le jugement. Ses ennemis seront détruits, mais ce ne sera pas le dernier mot de sa gloire: c’est, comme nous l’avons dit, par le jugement qu’il établira son Royaume. Alors «la terre sera pleine de la connaissance de la gloire de l’Éternel, comme les eaux couvrent le fond de la mer». Alors le glorieux diadème de Jésus ressuscité resplendira publiquement de toutes ses couronnes, celles du Messie, du Fils de Dieu, du Fils de l’homme, du Fils de David, du Souverain Sacrificateur assis sur son trône, selon l’ordre de Melchisédec. Il aura dans sa main un sceptre de fer pour paître les nations ou les briser à la moindre velléité de révolte; mais il confiera ce sceptre aux saints célestes qu’il associera à son règne. Dans l’Ancien Testament, ses compagnons dans le royaume seront le Résidu fidèle d’Israël et les nations Lui seront soumises; dans le Nouveau, les saints célestes régneront avec Lui, et l’Église, son Épouse, sera sa compagne sur Son trône.

 

Toutes les choses dont nous venons de parler appartiennent à la Prophétie.

Le Nouveau Testament, remarquons-le bien, a autant affaire à la Prophétie que l’Ancien, dès qu’il est question du gouvernement de Dieu sur la terre. Le Nouveau nous présente sans doute des sujets bien plus importants et plus élevés que celui-là, car il nous sort du domaine terrestre pour nous introduire dans le ciel et dans nos relations éternelles avec le Père et avec le Fils, mais, dès qu’il s’agit du gouvernement de Dieu, le Nouveau Testament redescend sur la terre et se meut au milieu des mêmes principes que l’Ancien, seulement, à la différence près qu’Israël dans l’Ancien Testament et dans le Nouveau Testament la Chrétienté occupent le devant de la scène.

Est-il besoin d’ajouter que la Prophétie de l’Ancien Testament comme celle du Nouveau, nous présente avant toutes choses les gloires de la personne de Christ en rapport avec Son gouvernement. Seulement le Nouveau, quand il parle «de la puissance et de la venue de notre Seigneur Jésus Christ», décrit ses gloires d’une manière infiniment plus riche et plus variée. Il suffit de lire l’Apocalypse pour juger de la différence.

L’Ancien Testament nous présente les jugements qui vont tomber d’abord sur Israël infidèle, puis sur les nations, Dieu sauvant finalement, à travers la «détresse de Jacob» et la «grande tribulation», ceux du peuple ou des nations qui auront cru. L’Ancien Testament nous occupe donc, d’un côté du peuple juif, de l’autre, des nations auxquelles Dieu avait confié le gouvernement à la suite de l’infidélité d’Israël, et montre comment les jugements les atteindront tous afin d’établir le règne du Messie, seul gouvernement qui réponde parfaitement aux pensées de Dieu.

La Prophétie du Nouveau Testament diffère de celle-là. Après la réjection du Messie dont la dispersion d’Israël fut la conséquence, une chose nouvelle entre en scène: le Christianisme. Le Christ, livré par les Juifs et crucifié par les nations, ressuscite et monte à la droite de Dieu.

De là, par l’envoi du Saint Esprit, il forme son Église ici-bas, et il enlèvera à sa rencontre dans les airs cette Épouse qu’il s’est acquise.

Seulement, comme corps responsable dans ce monde, l’Église s’est entièrement corrompue. Aussi, dans le Nouveau Testament, la Prophétie nous présente, non pas les jugements sur le peuple juif ou les nations, dont elle ne parle qu’incidemment, mais sur la Chrétienté qui, au lieu d’être sanctifiée (d’être séparée pour Dieu), est devenue la sphère du trône de Satan, puis «la demeure des démons et le repaire de tout esprit immonde». En effet, ce corps responsable, devenu la Chrétienté, atteindra son développement final dans «la grande Babylone» de la fin. C’est donc de la Chrétienté que notre Épître, de même que l’Apocalypse, nous entretiendra.

Néanmoins, quand il s’agit, dans le Nouveau Testament, des événements prophétiques de la fin, les destinées du peuple juif viennent s’y intercaler pour compléter le tableau (voyez, par exemple, le petit livre de l’Apocalypse, 10:8 à 11:13). Ces destinées ne peuvent rester isolées des «choses qui doivent arriver bientôt», aussi, dans le Nouveau Testament, les jugements de ce peuple occupent-ils leur place spéciale parmi ceux de la Chrétienté.

Notre Épître en est un exemple. Nous y trouvons à la fois le jugement de la Chrétienté et la part que le peuple juif aura dans son apostasie, par le moyen de l’Antichrist, faux prophète, mais aussi faux Messie juif qui établira sa royauté à Jérusalem. Quand on se rend compte de cette distinction, l’on comprend pourquoi l’exposé des mêmes événements prophétiques a un caractère si différent dans le Nouveau et dans l’Ancien Testament, et aussi pourquoi une quantité d’événements prophétiques futurs, mentionnés dans le Nouveau Testament, ne le sont pas même une seule fois dans l’Ancien et vice versa. On comprend aussi combien est vaine la tentation d’harmoniser ces deux catégories de prophéties, les sujets qu’elles traitent étant toujours différents et souvent opposés.

 

Du commencement à la fin, le Nouveau Testament présente donc des parties prophétiques auxquelles, comme dit l’apôtre Pierre, «nous faisons bien d’être attentifs». Ainsi, par exemple, le chap. 24 de Matthieu contient une prophétie du Seigneur, ayant trait à «son jour» en rapport avec Israël et le royaume; le chap. 25 une prophétie qui traite de la venue de l’Époux et de ce qui la suivra, ainsi que de la responsabilité de ceux qui ont porté Son nom en Son absence et des résultats futurs de leur conduite; — et la fin de ce même chapitre une prophétie relative au règne de Christ, en rapport avec la manière dont les nations auront accueilli les frères juifs du Seigneur en son absence.

L’Apocalypse développe dans toute son étendue la Prophétie du Nouveau Testament, au sujet de la Chrétienté. Ce livre nous apprend le sort des nations chrétiennes, plongées, comme le peuple juif, dans l’Apostasie; et l’établissement du règne de Christ sur les nations, règne qui aura pour centre la nouvelle Jérusalem, l’Épouse céleste.

Outre ces grands sujets, nous rencontrons constamment l’exposé de vérités prophétiques générales ou partielles dans tous les Évangiles et dans presque toutes les Épîtres, soit qu’il s’agisse du royaume de Dieu, ou des derniers jours, ou de la fin de toutes choses et des temps éternels. La seconde Épître à Timothée, l’Épître de Jude, la seconde Épître de Pierre, en offrent des exemples frappants.

Parmi les Épîtres il en est une qui possède, par excellence, ce caractère prophétique, et c’est la seconde épître aux Thessaloniciens, dont nous commençons la lecture ce soir. Nous y apprenons ce qu’aucune autre partie de l’Écriture ne montre d’une manière aussi évidente, quel sera le jugement du Méchant, de l’Antichrist, et quels seront les instruments de ce jugement; elle nous décrit les caractères effrayants de cet «homme de péché», dernière incarnation de Satan, qui non seulement blasphémera le nom du Père et du Fils, mais se présentera au monde entier comme étant Dieu et se fera adorer comme Dieu.

Tous ces caractères prophétiques du Méchant sont mis en relief dans notre Épître; et les événements qui accompagneront le jour du Seigneur en rapport avec la Chrétienté y sont tout aussi clairement exposés que dans l’Apocalypse, quoique d’une manière plus succincte.

 

C’est donc par le jugement que sera établi le Royaume de Dieu. Les tribulations que les chrétiens supportent sont une démonstration de ce juste jugement, afin qu’ils soient «estimés dignes du Royaume de Dieu» (1:5).

Ces mots: «le Royaume de Dieu» s’accordent avec le caractère prophétique de notre Épître. Dans les Épîtres, le Royaume de Dieu est envisagé d’habitude sous son caractère moral et comme puissance spirituelle (voyez, par exemple, Rom. 14:17; 1 Cor. 4:20), mais ici nous trouvons, au point de vue prophétique, le Royaume à la fois céleste et terrestre. Il sera inauguré par l’apparition du Seigneur lorsque les saints, recueillis auparavant par Lui dans le ciel, seront révélés en public, comme faisant partie de ce Royaume auquel ils appartenaient déjà spirituellement. En Apoc. 1:9, Jean déclare avoir part avec ses frères «à la tribulation et au Royaume et à la patience» de Jésus Christ, pensée exprimée dans le passage des Thessaloniciens que nous venons de citer. Quand le Royaume de Dieu sera pleinement établi par l’apparition du Seigneur, non seulement les saints glorifiés régneront sur la terre (Apoc. 5:10), mais les parties céleste et terrestre du royaume se répondront mutuellement dans une parfaite harmonie.

Aujourd’hui le Royaume de Dieu existe d’une manière mystérieuse, mais réelle, sous forme de Royaume des cieux, en l’absence du Roi. En apparence le «Maître du champ» dort; en réalité, il fait concourir la méchanceté des hommes et toute la haine de Satan contre Lui à l’accomplissement de ses desseins. Le jour est proche, où le résultat du gouvernement occulte de Dieu sera mis en pleine lumière, où l’on verra que le mal lui-même a concouru au triomphe définitif du bien, à l’établissement d’un règne de paix, de justice et de gloire sous le sceptre de Christ, et où les conseils éternels de Dieu auront enfin abouti, en glorifiant Christ et ceux qui ont souffert avec Lui.

 

J’ajouterai encore un mot à ces Remarques préliminaires:

En nous occupant des Prophéties, il nous faut éviter un écueil, et pour mon compte, étant plus ou moins familier avec ces sujets, je sens très vivement ce danger. Quand la Parole nous présente les événements prophétiques de la fin, nous ne devons pas y chercher, tout intéressants qu’ils soient, un aliment pour notre curiosité, ou céder au besoin de les coordonner et d’en former un tout logique qui, s’accordant avec notre raison humaine, satisfasse son désir de clarté, d’ordre et de symétrie. Tel n’est pas, soyez-en certains, le but de la Prophétie, but que la seconde Épître aux Thessaloniciens met précisément en pleine lumière. Elle décrit, sans doute, avec détail les événements qui accompagneront le jour du Seigneur, mais elle est, comme toute Prophétie, une «Révélation du Seigneur Jésus» (1:7). C’est ainsi que le premier chapitre nous présente le Seigneur, venant comme Juge, pour revendiquer ses droits sur le monde, mais aussi associant tous ses rachetés à cette Révélation de Lui-même, perspective qui remplit nos cœurs de reconnaissance et de joie. En même temps que Sa sainteté et Sa justice, les conseils les plus secrets de Dieu, les pensées d’amour de Christ à l’égard des siens, nous sont dévoilés, car il donne «la grâce», comme nous le voyons dans la première Épître, et «la gloire», comme nous le voyons dans la seconde (cf. Ps. 84:13). Qu’elle est merveilleuse cette parole: «Il viendra pour être, dans ce jour-là, glorifié dans ses saints et admiré dans tous ceux qui auront cru!»

Si nous ne lisions pas cette admirable Épître avec la pensée d’y contempler les gloires de notre Sauveur, manifestées aux yeux de tous, gloires auxquelles nous aurons part quand Il viendra exercer ses jugements sur le monde, nos âmes en perdraient tout le bénéfice. Pour éviter la tentation de mettre les multiples événements prophétiques au premier plan, nous avons besoin d’un œil simple, attaché sur un seul et unique objet, la personne du Seigneur.

Lisons donc cette Épître dans cet esprit-là; nous y puiserons de nouvelles provisions dans «les richesses insondables de Christ»; nos cœurs seront remplis d’adoration pour Lui, et la perspective de sa «Venue avec tous ses saints» nous affermira dans l’espérance de Son apparition. Avant de commencer le premier chapitre, je désire encore vous faire remarquer que ces Entretiens ont pour but, non pas l’enseignement, mais l’édification. Ils n’ont pas non plus l’intention de répéter ce que de chers serviteurs de Dieu nous ont souvent exposé dans leurs écrits, écrits dont je ne puis trop vous recommander la lecture et l’étude diligente. Cette remarque me fournit l’occasion d’exprimer un désir pour nous tous. Chaque fois que nous lisons la Parole, plaçons-nous en premier lieu, non pas devant l’enseignement des autres, quelque profit que nous en puissions tirer, mais devant l’enseignement de Dieu lui-même par le Saint Esprit. Ce sera le moyen d’apprendre des vérités utiles et profitables pour les jours mêmes que nous traversons, et je vous engage à user constamment de ce moyen; il n’y a de progrès réels dans la vérité, que de cette manière. Estimons très haut les dons qui servent à l’édification du corps de Christ, tout en contrôlant avec soin leur enseignement par les Écritures, et ne nous berçons même pas de l’illusion que Dieu nous révélera de nouveau personnellement, sans tenir compte des enseignements qui ont précédé, les vérités qu’il nous avait fait connaître par d’autres. Une telle prétention ne serait que de l’orgueil spirituel. Mais j’insiste sur ceci: c’est que chacun de nous vive individuellement de la Parole, afin qu’elle soit en nous non une lettre morte, ni une doctrine orthodoxe sans fruit, mais une parole vivante. Ne soyons pas non plus tentés d’étaler, comme provenant de nous, les connaissances que nous avons reçues de nos frères. Il va sans dire que la Parole, dans ses grands traits, présentera à tous ceux qui lui sont véritablement soumis les mêmes vérités, qu’ils n’auraient sans doute pas même entrevues, sans l’action puissante de l’Esprit par des serviteurs privilégiés du Seigneur (et combien sont à plaindre ceux qui ne savent ou ne veulent pas profiter de leur enseignement), mais nous sommes tous appelés à faire sous cette même direction de l’Esprit des découvertes personnelles dans le champ divin et inépuisable de la parole de Dieu.