2 Rois

Chapitre 2

V. 1-12

Ascension d’Élie

L’histoire d’Élie, comme prophète de jugement, se termine au chapitre 1er. Le chapitre 2 nous présente la fin de sa carrière et les faits mystérieux qui accompagnèrent ce grand événement.

Nous rencontrons dans la Parole beaucoup de mystères, des secrets cachés de toute éternité dans le cœur de Dieu, des choses que l’œil n’avait pas vues, ni l’oreille entendues et qui n’étaient pas montées au cœur de l’homme. Ces mystères restaient inconnus dans l’ancienne alliance, mais il n’en est pas un seul qui ne nous soit révélé par l’Esprit de Dieu dans le Nouveau Testament. Et cependant, malgré cette révélation, la Parole est pleine de choses mystérieuses que l’intelligence spirituelle seule découvre. Le Seigneur pourrait, en peu de mots, nous les rendre claires, mais il nous en laisse faire la découverte pour le plus grand profit et la plus grande joie de nos âmes.

Ce n’est que par une étude faite sous la dépendance du Saint Esprit, avec prière, et par une application sérieuse aux choses de Dieu, que nous trouvons la clef de ces énigmes. C’est ainsi que nous apprenons à connaître, sous un fait simple en apparence, un sens caché, semblable au diamant que l’ignorant tient pour une pierre ordinaire, mais qui éblouira par son éclat celui qui s’applique à le tailler. La seconde partie du chap. 1° de l’évangile de Jean, le chap. 21 du même évangile, sont remplis de ces trésors cachés. Il en est de même de notre chapitre; nul autre ne peut guère le surpasser en intérêt, en expériences intimes, en révélations prophétiques, en majestueuse grandeur. C’est qu’en nous présentant Élie et Élisée, il nous parle de Christ et de son Esprit. C’est qu’il est avant tout un chapitre typique.

À plus d’une reprise, comme, par exemple, dans l’histoire de la veuve de Sarepta (comp. Luc 26), Dieu honora le prophète Élie, en se servant de lui pour nous représenter certains caractères isolés de son Bien-aimé, mais le dernier jour de sa carrière prophétique est employé à illustrer la vie, la mort, l’ascension du Messie, et les bénédictions qui devaient en découler pour son peuple. Ce privilège d’Élie est, dans une mesure, celui de tout croyant, car chacun de nous est appelé à reproduire les caractères de Christ dans le monde. S’il est vrai que nous sommes «en Lui» devant Dieu, il est aussi vrai qu’il est «en nous» devant le monde, et que nous sommes appelés à le manifester aux yeux de tous. Si le chrétien est fidèle, il sera une copie qui fera d’emblée reconnaître son modèle. Celui qui ne voit pas dans ce chapitre la vérité dont nous parlons, n’y a, de fait, rien vu. Seulement, nous l’avons dit, tout nous y est présenté sous un jour mystérieux. Ce qui ajoute au mystère, c’est qu’Élie n’y est pas seul. Élisée, son compagnon prophète et son serviteur, ne l’abandonne pas un seul instant, et le voit monter au ciel, puis revient visiter les «fils des prophètes», dont les circonstances remplissent toute la suite de notre histoire.

 

Élie, type de Christ

«Et il arriva que, lorsque l’Éternel fit monter Élie aux cieux dans un tourbillon, Élie et Élisée partirent de Guilgal». Le prophète a quatre étapes à faire avant d’être enlevé au ciel: Guilgal, Béthel, Jéricho et le Jourdain. Au commencement de sa carrière, il avait été envoyé pour ramener à l’Éternel le cœur du peuple. Sa mission, accomplie fidèlement, avait, en fin de compte, totalement échoué. Israël, après un retour momentané, lors de la destruction des prêtres de Baal, ne s’était pas réellement repenti, et les rois avaient persisté dans leur idolâtrie. Jésus, dans sa mission, échoua de la même manière auprès du peuple remonté de la captivité. Le prophète est maintenant envoyé de Dieu, comme Christ dans les évangiles, pour retracer, par la puissance du Saint Esprit, le chemin qu’Israël aurait dû suivre, mais qu’il avait semé d’infidélités et de ruines, en manquant à sa responsabilité. «L’Éternel m’envoie», telles sont, à chaque étape, les paroles d’Élie à son fidèle compagnon (v. 2, 4, 6). Telles sont aussi les paroles du Seigneur dans les évangiles, et surtout dans celui de Jean où il se présente constamment comme envoyé du Père.

Mais, examinons d’abord quel avait été ce chemin pour Israël.

 

L’Éternel, après avoir fait traverser le Jourdain à son peuple, avait roulé de dessus lui l’opprobre d’Égypte par la circoncision de Guilgal, car aucun des fils de ceux qui étaient sortis d’Égypte n’avait été circoncis dans le désert (Jos. 5:5-9). Puis il avait fait tomber devant Israël, Jéricho, forteresse de l’ennemi, condamnant cette ville à l’interdit et à la malédiction, pour introduire à la fin son peuple dans la jouissance des bénédictions promises autrefois à Jacob en Béthel (Gen. 35:9). Israël s’était-il maintenu dans ces bénédictions? En aucune manière. «Toute leur méchanceté», lui dit plus tard le prophète Osée, «est à Guilgal, car là, je les ai haïs; à cause de la méchanceté de leurs actions, je les chasserai de ma maison (Béthel). Je ne les aimerai plus» (Os. 9:15). Et encore: «Venez à Béthel, et péchez!

À Guilgal, multipliez la transgression!» (Amos 4:4). Jéricho, lieu de la malédiction, avait été rebâtie contre l’ordre exprès de l’Éternel, par Hiel de Béthel (1 Rois 16:34). Béthel, lui-même, était devenu, sous Jéroboam, le premier centre de l’idolâtrie (1 Rois 12:29), où les péchés d’Israël s’étaient accumulés.

Élie est appelé à refaire ce chemin, semé de tant de souillures; seulement, sa foi, tout en constatant, à chaque pas, la ruine du peuple, revoit, retrouve les bénédictions premières, instituées de Dieu, et dont il n’a pas abandonné la réalisation. Élie reconnaît Guilgal et Béthel, selon les pensées de Dieu, dans le même esprit qui lui avait fait construire son autel de douze pierres, en face des prophètes de Baal. Il s’y rend comme envoyé, dans la puissance du Saint Esprit, sans être aucunement contaminé par leurs souillures. Il suit fidèlement le chemin qu’Israël aurait dû suivre, et dans lequel il avait misérablement failli, car, s’il avait répondu au dessein de Dieu par un vrai jugement de la chair à Guilgal, il aurait habité avec l’Éternel à Béthel, jouissant de toutes ses promesses. Élie, conduit par la volonté de Dieu, marche seul dans ce chemin, où il n’est que le type d’un plus grand que lui.

En effet, ce que le prophète ne pouvait accomplir qu’en figure, s’est réalisé à la venue du Seigneur. Lorsqu’il entrait en scène, une occasion était encore offerte au peuple juif de retrouver sous Emmanuel les bénédictions perdues. Le baptême de repentance, administré par Jean-Baptiste, cet Élie qui devait venir, devenait alors le Guilgal d’Israël. Il fallait y venir repentant, reconnaissant ses péchés, pour retrouver les bénédictions sous le règne du Messie. Jésus, assimilant, dans son baptême, le Jourdain à Guilgal, vint s’associer aux quelques excellents de la terre qui, par la repentance, devenaient enfants du royaume et héritiers des promesses dont ils avaient perdu l’accès. De cette manière, l’opprobre d’Égypte était comme de nouveau roulé de dessus eux; la chair devait subir la mort, car il était prouvé qu’elle n’avait pu entrer en possession des promesses. L’histoire du peuple dans la chair était terminée, mais un nouvel Israël, le vrai, commençait en Christ. Lui, personnellement, n’avait nul besoin de ce chemin. Il était le Saint, et l’a toujours été, mais il manifestait publiquement au Jourdain, dès le début de son ministère, aussi bien qu’à sa naissance, ou lorsque, comme le vrai Israël, il fut «appelé hors d’Égypte», que la séparation du mal, la sainteté, la justice, étaient son caractère; seulement il s’associait au premier mouvement de l’Esprit, en ceux qui venaient à Jean-Baptiste, reconnaissant leurs péchés.

Mais la nation, dans son ensemble, l’a rejeté.

 

Élie monte de Guilgal à Béthel. Ce fut aussi le chemin de Christ. Ayant, pour point de départ, une entière consécration à Dieu, il aboutissait, nécessairement, à la possession des promesses que le Dieu de Jacob avait faites à Israël (Genèse 28:13-15). Lui seul, Christ, en vertu de sa perfection, était digne d’acquérir toutes les promesses de Dieu. Pendant toute sa vie, il a choisi Béthel, la maison de Dieu, il a pris l’Éternel lui-même, qui cachait sa face au peuple rebelle, pour refuge et pour demeure (Ps. 92). Israël n’aurait jamais dû quitter cet asile. Christ, seul, y est resté. Comme nous l’avons vu, Béthel était devenu, pour Israël, la maison des idoles. Que devait sentir Élie, mais, surtout, qu’a dû sentir le Seigneur en voyant cette demeure sainte, avec les bénédictions qu’elle promettait, souillée par le péché de son peuple?

À Christ seul, à l’homme obéissant, appartenaient donc désormais les promesses. Mais allait-il en jouir? Non. Interrogeons Élie; il n’est pas appelé à rester à Béthel; l’Éternel l’envoie plus loin. Il lui faut abandonner le lieu des promesses pour descendre à Jéricho. C’est là que l’Éternel l’envoie.

 

Israël avait jadis rencontré cet obstacle en montant de Guilgal. Il y avait éprouvé la puissance divine, renversant les murailles dressées par l’ennemi. Dieu avait alors prononcé l’anathème sur cette ville; elle ne devait jamais être rebâtie (Jos. 6:26). Mais, qu’est-ce qu’Israël avait fait de Jéricho? Un homme de Béthel avait réédifié la ville maudite!

Élie y descend sur l’ordre de Dieu. Il faut qu’il suive le chemin d’Israël infidèle et qu’il le constate. Le peuple n’était-il pas comme cet homme de la parabole qui était descendu de Jérusalem à Jéricho pour tomber entre les mains de ces voleurs, les nations, qui le réduisaient au pillage? Christ y descend aussi, mais ce n’est pas, comme Élie, pour en prendre simplement connaissance; c’est pour éprouver, dans son âme, la malédiction prononcée sur le peuple, pour prendre et porter, à sa place, la colère du gouvernement de Dieu contre cette nation infidèle.

 

De Jéricho, Élie est envoyé au Jourdain; il abandonne Israël et Canaan en traversant ce fleuve, type si précieux de la mort. Cette mort, Élie la traverse à pied sec, en vertu de son manteau de prophète et dans la puissance de l’Esprit qu’il possède. Il en fut de même de Christ; mais, ce qu’Élie ne fit pas, Christ goûta la réalité terrible de la mort avant de la vaincre et de sortir en résurrection à l’autre bord. Élie ne la traversait qu’en figure, et sans qu’elle pût l’atteindre; le Seigneur, seul, l’a réalisée, comme terme de sa carrière; il s’est anéanti jusque dans la mort, mais elle n’a pu le retenir. Elle s’est divisée devant la puissance de la vie éternelle qui y était descendue. Ayant vaincu la mort, il a été déclaré Fils de Dieu en puissance, selon l’Esprit de sainteté, par la résurrection des morts (Rom. 1:4).

Élie sort de Canaan, terre de la promesse et héritage d’Israël, sans autre chose que son manteau de prophète. S’il a visité Béthel, il ne s’y est pas arrêté; il n’emporte rien de ce qui pourrait lui appartenir comme homme de Dieu. Il en est de même de Christ, car il fut dit de lui: «Il n’aura rien» (Dan. 9:26). Mais c’est là que commence pour Christ une ère nouvelle. Dieu l’avait envoyé à la mort. Pouvait-il ne pas obéir? Bien au contraire, il dresse résolument sa face pour s’y rendre. Il abandonne Canaan, son héritage et ses droits, mais il sait d’avance que c’est pour monter au ciel, après avoir passé par la mort. Élie le sait aussi, mais il y monte vivant, n’ayant passé que par le simulacre du sépulcre.

La pensée de l’Éternel, qui envoyait son serviteur d’étape en étape, était de l’introduire dans un autre monde. Élie recevait ainsi la récompense d’une vie de dévouement — mêlée, sans doute, de quelque faiblesse humaine — à Celui qui l’avait envoyé; mais Christ reçoit celle d’un dévouement ininterrompu jusqu’au sacrifice de lui-même. C’était aussi, comme nous le verrons en parlant d’Élisée, le point de départ d’une double puissance spirituelle pour le compagnon du prophète.

Hâtons-nous de le faire remarquer. Il ne s’agit pas de trouver, dans toute cette histoire, un type du Sauveur et de son œuvre rédemptrice accomplie à la croix. Le récit typique n’a pas cette œuvre en vue; cela deviendra plus clair, quand, à l’histoire d’Élie, nous aurons ajouté celle d’Élisée. Notre sujet ici, c’est Christ homme de Dieu (quoiqu’il fût bien plus que cela) envoyé de Dieu, prophète, venant à Israël pour rendre témoignage à sa ruine et au jugement qui en est la conséquence (témoignage qui avait commencé par Jean le Baptiseur, cet Élie qui devait venir), mais en même temps aux promesses immuables de Dieu, qui ne pouvaient être acquises que par Christ, un homme sans péché, pour en faire part à son peuple d’Israël restauré.

Il ressort de tout cela que, comme du reste dans tout l’Ancien Testament, il ne faut pas chercher ici la bénédiction proprement dite de l’Église. L’histoire d’Élie et d’Élisée se rapporte uniquement à Israël. Et cependant, l’enlèvement d’Élie, comme celui d’Énoch, nous parlent en type de l’enlèvement des saints, dont l’Église fait partie. On pourrait dire que cet enlèvement est caché mystérieusement dans l’ascension d’Élie1, tandis qu’il est représenté dans celui d’Énoch. Dans le premier cas, Christ est en vue; dans le second, ceux «qui sont de Christ».

1 Apocalypse 12:5 nous présente un exemple analogue.

Faisons remarquer, à ce propos, que deux hommes, Énoch et Élie, sont montés au ciel sans passer par la mort, tandis qu’un seul, Christ, est ressuscité d’entre les morts pour monter au ciel1; c’est pourquoi il est appelé «le premier-né d’entre les morts», précédant les saints dont il est les prémices en résurrection. D’autres morts furent ressuscités avant Christ, mais pour la terre, jamais pour le ciel. Ils étaient sujets à mourir de nouveau, tandis que Christ, ayant été ressuscité d’entre les morts, ne meurt plus; la mort ne domine plus sur lui.

1 Énoch a plus d’un trait de ressemblance avec Élie. Tous deux sont des prophètes de jugement. Énoch marche avec Dieu; Élie se tient devant l’Éternel. Tous deux sont enlevés avant le jugement final dont ils ont rendu témoignage.

 

Élisée serviteur

Nous avons vu, précédemment, que le personnage d’Élie pouvait être considéré sous plus d’un aspect: comme prophète, comme type du précurseur, comme type de Christ. Pour Élisée, il en est de même. Il est d’abord l’image du parfait serviteur.

Dès le jour où, rencontrant Élisée, Élie jeta sur lui son manteau de prophète, le nouveau venu avait suivi et servi fidèlement son maître; aussi, n’était-il connu que pour avoir «versé l’eau sur les mains d’Élie» (1 Rois 19:21; 2 Rois 3:11). Comme il convient au vrai serviteur, jusqu’à son entrée dans le ministère public, il s’efface, et l’on n’entend plus parler de lui. Il possède, cependant, le manteau prophétique qui lui avait été conféré par Élie pour exercer à sa place le jugement sur la terre d’Israël, mais il n’en fera usage qu’après l’enlèvement de son maître, quand il aura reçu, avec une double mesure de l’esprit d’Élie, un second manteau prophétique tombé du ciel, qui le rendra capable d’exercer un ministère de grâce.

Élisée est un bel exemple de chrétien, serviteur de Christ. Là où est son maître, là il sera (Jean 12:26). À Béthel, à Jéricho, les fils des prophètes lui disent: «Sais-tu qu’aujourd’hui l’Éternel va enlever ton maître d’au-dessus de ta tête?» Il répond: «Je le sais, moi aussi, taisez-vous». Sa connaissance ne peut lui être communiquée par les fils des prophètes, car il est prophète lui-même en vertu d’un ordre divin spécial. Mais ce qui le distingue avant tout, c’est qu’il a tout quitté pour suivre son maître, son seul objet, la seule source de bénédiction pour son âme. Sans Élie, Élisée n’est rien, ne veut rien être; Élie est celui sur lequel ses affections se concentrent: «L’Éternel est vivant, et ton âme est vivante, que je ne te laisserai point». Élie lui avait dit: «Reste ici, je te prie, car l’Éternel m’envoie à Béthel», puis «à Jéricho», puis «au Jourdain». «L’Éternel m’envoie»; c’est l’obéissance d’Élie; mais si Élie obéit, Élisée ne doit-il pas le suivre?

Il en est de même pour nous; nous pouvons être certains de suivre le chemin de Dieu en suivant celui de Christ. Élisée n’avait pas reçu d’ordre spécial quant à sa conduite, mais il s’attache à Élie qui l’avait reçu, et qui est pour lui l’homme de Dieu, son représentant.

La foi d’Élisée est éprouvée tout du long. «Reste ici, je te prie», lui dit le prophète. Reste à Guilgal, au lieu du jugement de toi-même, de la chair, où l’opprobre d’Égypte a été roulé de dessus le peuple. Recommence une fois encore l’histoire d’Israël. Non, ce serait recommencer une épreuve irréalisable. Seul, l’envoyé de Dieu peut suivre ce chemin; l’Éternel est vivant, que je m’attacherai à lui. Élisée traverse Guilgal avec Élie, comme nous avec Christ. «Je ne te laisserai point». Le recommencer pour nous-mêmes? Jamais! Notre Guilgal, c’est la croix, la circoncision du Christ. Comme nous, Élisée a trouvé auprès d’Élie tout ce que Guilgal peut lui offrir, et de fait, quand, plus tard, il repasse le Jourdain, Guilgal ne fait plus partie de son itinéraire.

À Béthel, lieu des promesses assurées faites aux pères... reste ici, dit Élie. Tu ne manqueras pas de les obtenir d’un Dieu qui ne peut mentir, puisque tu as passé à Guilgal avec moi. Non, je ne te laisserai point. Si tu ne les reçois pas maintenant, comment les atteindrai-je sans toi? Quand tu les auras obtenues, il sera temps que je demeure à Béthel.

Voici, maintenant, que les fils des prophètes éprouvent sa foi. Irais-tu plus loin, puisque ton maître va t’être enlevé? «Je le sais aussi, taisez-vous». Vous ne pouvez comprendre le ressort qui me fait agir. C’est lui, lui-même. Sa personne est ce qui m’attire et résume tout pour moi. Me séparer un instant de lui, ce serait perdre une bénédiction que je connais faiblement encore, que je pressens avec mon cœur, plus qu’avec mon intelligence, mais que j’aurai sûrement, si je ne l’abandonne pas, car je sais que lui l’atteindra.

Reste à Jéricho, Élisée, dit Élie; moi, je suis envoyé plus loin. Non; pourrai-je jamais ressentir, plus que toi, la malédiction qui plane sur cette cité? Puisque toi, mon seigneur et mon maître, tu n’y remédies pas en ce jour, pourrais-je y remédier moi-même? Il me faudrait, pour cela, une puissance personnelle, et je ne la possède qu’en toi. Tant que je ne l’aurai pas, pourquoi m’arrêterais-je? Taisez-vous, prophètes!

«L’Éternel m’envoie au Jourdain». Ici, plus de mise en demeure de rester. Élie prend Élisée avec lui, le conduit à travers le fleuve de la mort, dans la puissance de l’Esprit auquel elle ne peut résister, dans la puissance triomphante d’une vie qu’elle ne peut engloutir. Un manteau qui appartient à Élie est capable de faire ces choses. Oh! quelle association bénie pour Élisée! «Ils s’en allèrent tous deux». «Eux deux se tinrent auprès du Jourdain». «Ils passèrent eux deux à sec». Élie n’y passe pas pour lui seul, mais pour y faire passer Élisée avec lui. Élisée, cet autre moi d’Élie, va sortir de la mort avec lui puis il reviendra en délivrance pour Israël!

Les fils des prophètes qui avaient annoncé l’enlèvement d’Élie ne jouent pas ici un rôle inutile. En eux, la prophétie est le témoin à distance de la victoire sur la mort, comme elle est aussi, peu après, celui de retour, en grâce pour Israël, d’une double mesure de l’esprit d’Élie qu’Élisée va recevoir. Ils disent: «L’esprit d’Élie repose sur Élisée» (v. 15).

Maintenant, quand eux deux ont passé le Jourdain, Élie dit à Élisée: «Demande ce que je ferai pour toi avant que je sois enlevé d’avec toi». Élisée répond: «Qu’il y ait, je te prie, une double mesure de ton esprit sur moi. Et il dit: Tu as demandé une chose difficile; si tu me vois, quand je serai enlevé d’avec toi, il en sera ainsi pour toi: sinon, cela ne sera pas» (v. 9-10).

Pour qu’Élisée obtînt cette double mesure, il ne suffisait pas que sa foi et son affection pour son maître eussent été mises à l’épreuve; il fallait encore de la vigilance, afin de ne pas perdre de vue le prophète au moment de son départ. «Ils allaient marchant et parlant» (v. 11), en apparence occupés de divers sujets, mais l’œil d’Élisée ne gardait qu’un seul objet dans le champ de sa vision. Il pouvait s’intéresser à toutes les choses que lui communiquait le riche cœur de son maître, mais son œil était simple. Il ne voulait point manquer l’instant solennel. Nous ne sommes pas appelés, comme Élisée, ou comme les premiers disciples, à voir Jésus montant au ciel dans la nuée, mais ne devons-nous pas avoir la même attitude au sujet de sa venue, qu’eux au sujet de son départ? Ne devons-nous pas, si nous l’aimons véritablement, marchant et parlant, dans l’accomplissement de nos devoirs journaliers, l’attendre sans distraction? Car il s’agit de le voir «en un clin d’œil». Oh! que notre attente soit continuelle et vigilante comme celle du serviteur d’Élie!

«Et il arriva, comme ils allaient, marchant et parlant, que voici un char de feu et des chevaux de feu; et ils les séparèrent l’un de l’autre; et Élie monta aux cieux dans un tourbillon. Et Élisée le vit, et s’écria: Mon père! mon père! Char d’Israël et sa cavalerie! Et il ne le vit plus».

Ce char et ces chevaux de feu, ce sont des anges (2 Rois 6:17), répondant, par leur apparence, au caractère d’Élie qui, prophète de la loi, avait agi par le feu du jugement au milieu d’Israël. Il n’en fut point ainsi lors de l’ascension du Sauveur. Un cortège angélique, envoyé pour le servir ou le convoyer dans le ciel, ne lui était point nécessaire. Il y est monté par le pouvoir qui lui était propre, ayant été déclaré Fils de Dieu en puissance par la résurrection. Une nuée, habitation de la gloire divine, le reçut immédiatement et l’emporta de devant les yeux des disciples (Actes 1:9), et notre ascension sera semblable à la sienne (1 Thess. 4:17); mais quand il reviendra, comme Fils de l’homme, pour juger le monde, il sera révélé du ciel «avec les anges de sa puissance en flammes de feu» (2 Thess. 1:7), et, nous-mêmes et tous les saints, les armées du ciel, nous serons accompagnés de myriades d’anges (Apoc. 19:14; Héb. 12:22; Jude 14; Deut. 33:2; Zach. 14:5). Et lorsqu’il reviendra comme Messie, l’Éternel commandera à ses anges qui le porteront sur leurs mains, de peur que son pied ne heurte contre une pierre (Ps. 91:11-12).

Élisée s’écrie: «Mon père!» marquant ainsi qu’il a vu, selon la parole d’Élie, son protecteur monter au ciel, mais il reconnaît aussi en lui le vrai Israël: «Char d’Israël!» Cette exclamation prouve encore une fois combien toute cette scène nous présente en type le Christ, le grand prophète d’Israël et non pas le Sauveur en rapport avec l’Église. C’est comme prophète, vrai Envoyé, vrai Messie, vrai Israël, qu’il est envoyé dans les cieux ici; c’est comme Fils de l’homme et Fils de Dieu, comme Seigneur et Sauveur, qu’il y a été transporté et qu’il en reviendra, pour nous.

Le manteau d’Élie tombe de dessus lui, parce que son serviteur l’a vu montant au ciel. Ce manteau appartient maintenant à Élisée. De même, nous aurons toujours avec nous la puissance de l’Esprit, si nous sommes attachés à Christ et si nos yeux le suivent là-haut.

Élisée déchire ses vêtements en deux pièces. Ils ne lui serviront plus désormais, car, il possède le manteau d’Élie, la double mesure de son esprit. C’est dans cette puissance qu’il va marcher au milieu d’Israël. Puisse-t-il en être de même pour nous! Puissions-nous déchirer notre ancien vêtement après avoir revêtu Christ, pour le présenter, Lui, au monde en témoignage!

 

V. 13-25 — Élisée ou Christ en Esprit

C’est ici que nous voyons se dessiner, d’une manière bien nette, la figure, comme type, du prophète Élisée, car nous avons déjà mentionné, au commencement de ce chapitre, son caractère essentiellement typique. Si Élie, au dernier jour de sa carrière ici-bas, représente Christ comme témoin prophétique en Israël, que représente donc cet Élisée qui lui est si intimement associé, accompagnant son témoignage, passant le fleuve de la mort avec lui, recevant, lors de son ascension, une double mesure de son esprit? Pour être bien compris, commençons par un petit aperçu prophétique.

Pendant la carrière du Messie ici-bas, quelques disciples, constituant un faible résidu juif fidèle, séparé moralement de la nation, persévérèrent jusqu’au bout à suivre Jésus, l’Oint de l’Éternel et l’Envoyé de Dieu, le grand prophète d’Israël. Celui-ci, rejeté par la nation, les associa avec Lui dans les résultats de sa mort et de sa résurrection. Nous ne parlons pas de la place qu’ils occupèrent dans l’Église. Cette dernière n’entre pas en scène dans les récits de l’Ancien Testament, et pourrait, tout au plus, comme nous l’avons dit plus haut, être considérée ici comme cachée mystérieusement dans la personne d’Élie-Christ, montant au ciel. Nous parlons, ici, des disciples juifs, à la tête desquels étaient les douze, constituant alors le vrai résidu d’Israël. Comme tels, ils reçurent de Lui une double mesure de son Esprit, sous forme de miracles et d’actes de puissance, et furent capables d’accomplir, au milieu du peuple, «de plus grandes œuvres» que lui. On vit, à la Pentecôte, se réaliser, au point de vue juif, les choses annoncées par le prophète Joël: Je répandrai de mon Esprit sur mes serviteurs et mes servantes, et ils prophétiseront... Vos fils et vos filles prophétiseront... Sans doute, même à ce moment-là, la puissance d’en haut n’était pas limitée, selon Joël, aux enfants d’Israël, car Dieu dit: «Je répandrai de mon Esprit sur toute chair» (Actes 2:17-19). Quand la prophétie de Joël sera accomplie dans l’avenir, les nations auront part à ce don. Seulement cette prophétie, indiquant la participation des nations au don du Saint Esprit, permettait, le jour de la Pentecôte, d’ouvrir la porte à l’Église de Christ, à l’Église, parenthèse merveilleuse dans l’histoire des voies de Dieu, intervalle pendant lequel une Assemblée céleste se forme ici-bas, corps composé de Juifs et de gentils, et uni avec son Chef ressuscité dans la gloire. Il n’en était pas moins vrai qu’un résidu juif, puissamment doté de l’Esprit prophétique, était révélé à la Pentecôte aux yeux de tout le peuple. Pour en faire partie, il fallait avoir suivi le Messie pendant toute sa carrière sur la terre et l’avoir vu monter au ciel (Actes 1:21, 22). «Si tu vois», dit Élie, «quand je serai enlevé d’avec toi…» Ce résidu, selon la prophétie de Joël, citée en Actes 2, n’avait pas, à ce moment-là, atteint ses destinées finales et son plein développement. Il était, au sens le plus strict du mot, représenté par les douze apôtres. Les Juifs ont rejeté leur témoignage, se privant ainsi des temps de rafraîchissement prédits par le prophète, et Dieu s’est servi de l’incrédulité de la nation et de sa révolte contre le Saint Esprit, pour former l’Église, épouse du second Adam, os de ses os, et chair de sa chair.

Mais la parenthèse de l’Église se fermera, et les temps prophétiques se rouvriront. Le résidu d’Israël, dont les prophètes et les Psaumes nous entretiennent constamment, rentrera sur la scène avec le double de l’esprit prophétique d’Élie, se soudant pour ainsi dire aux disciples juifs qui avaient accompagné le Seigneur dans sa carrière. Notez bien qu’il ne s’agira, pour eux, comme pour Élisée, que de l’esprit d’Élie sur eux, soit en puissance miraculeuse, soit en intelligence prophétique, et non pas en eux, comme pour le chrétien.

Par ce court exposé, nous ne prétendons nullement présenter Élisée le prophète comme un type du résidu. Ce serait comprendre bien imparfaitement l’importance de son rôle. Sans doute, l’Esprit peut se servir de vases, appropriés à son usage comme il se servait d’Élisée après l’ascension d’Élie, mais quel que puisse être le vase, la chose importante est ce qu’il contient. Élisée, c’est l’esprit d’Élie, revenant en double puissance et en grâce pour bénir les fidèles du résidu et pour les rassembler. C’est Christ en Esprit, l’Esprit prophétique de Christ se servant d’instruments, sans doute, mais revenant à la fin des temps vers les fils des prophètes d’abord, c’est-à-dire vers le résidu proprement dit, puis vers ce qui a la foi en Israël quand l’apostasie est à son comble. C’est en faveur de ce résidu qu’Élisée fait des miracles, mais au milieu du peuple, aveuglé par la révolte finale. C’est ainsi que les enfants du royaume que Christ établira sur la terre seront séparés par Lui. Quant aux instruments humains dont l’Esprit prophétique se servira à cet effet, nous ne sommes pas en mesure de les désigner spécialement. Qu’il suffise de dire que si Jean-Baptiste avait été reçu, il aurait été l’Élie qui devait venir; que, dans l’avenir, Élie reviendra et rétablira toutes choses, qu’il y aura deux témoins (symboles de deux corps de témoins) à Jérusalem, agissant dans l’esprit prophétique et dans la puissance d’Élie et de Moïse.

Le témoignage confié à Élisée a, comme nous l’avons déjà fait pressentir, un double caractère, correspondant au double don du manteau d’Élie (1 Rois 19:19; 2 Rois 2:13), un caractère de jugement, semblable à celui que son maître, prophète de la loi, avait exercé ici-bas, jugement que Christ lui-même n’exécutera qu’à l’issue des temps de la grâce de l’Évangile — un caractère de grâce à l’égard de tout ce qui sera fidèle en Israël, pour ramener à ces témoins ceux que touchera leur témoignage, et pour la conversion des gentils.

 

Élisée avait, une première fois, passé le Jourdain à pied sec, en compagnie de son maître, quand celui-ci, frappant les eaux de son manteau, obligea le fleuve de la mort à céder devant sa puissance. Resté seul, Élisée fait de même. «Il se tint sur le bord du Jourdain; et il prit le manteau d’Élie qui était tombé de dessus lui, et frappa les eaux, et dit: où est l’Éternel, le Dieu d’Élie? — Lui aussi frappa les eaux, et elles se divisèrent deçà et delà; et Élisée passa» (v. 13-14). C’est toujours à Christ que l’Esprit rend témoignage. Élisée fait l’expérience du pouvoir du nom d’Élie sur la mort; non pas du sien propre. Il recommence l’histoire d’Israël au lieu où Élie avait passé, non pas au commencement (Guilgal), mais à la fin de sa carrière. Israël avait traversé autrefois le Jourdain, dans la chair, pour aller au devant d’une ruine certaine. Élie l’a traversé, pour monter au ciel, et renvoyer ensuite Élisée dans le pays de la promesse avec son manteau de prophète et une double mesure de son esprit. Élisée traverse le fleuve en vertu du passage d’Élie, au nom d’Élie, avec le manteau d’Élie. «Lui aussi», son représentant par l’Esprit, «frappa les eaux». La mort est impuissante devant la puissance de l’Esprit de vie en Élisée. Par l’Esprit, vainqueur de la mort, ce dernier recommence l’histoire du nouvel Israël. Ce n’est plus un peuple dans la chair qui entre en Canaan pour être finalement rejeté; c’est un homme nouveau, revenant au peuple dans la puissance de l’Esprit de Christ vainqueur de la mort, un homme nouveau venant apporter aux fils des prophètes, puis à la nation, et plus tard aux gentils (Naaman), les fruits de cette victoire en délivrance. Les fils des prophètes reconnaissent ce pouvoir.

Il en sera de même à la fin des temps. L’esprit prophétique reviendra à Israël avec une force toute nouvelle. Il exécutera, sans doute, dans la puissance d’Élie, la vengeance contre les ennemis du peuple, comme les deux témoins de l’Apocalypse. Mais il s’agit ici de grâce bien plus que de jugement; le témoignage sera en grâce pour la bénédiction des fidèles et le rassemblement du résidu tout entier. Les fils des prophètes, éclairés graduellement, reconnaîtront cette puissance et se rassembleront autour d’elle. L’histoire du vrai Israël, ayant son point de départ en Christ, pourra recommencer à la gloire de Dieu.

Les fils des prophètes voient Élisée (v. 15). Ils étaient à Jéricho, le lieu de la malédiction. Ils ne connaissent pas encore l’ascension d’Élie, comme le résidu prophétique de la fin ne connaîtra pas, tout d’abord, la résurrection et l’ascension de Christ. Thomas, dans l’évangile de Jean, représente, en figure, ce résidu. Il a besoin de se convaincre, par la vue, de la résurrection de son Seigneur. Ainsi, les fils des prophètes, d’abord incrédules comme Thomas, vont chercher Élie. Ils voudraient trouver sur la terre celui qui a été enlevé au ciel. C’était peut-être un bon sentiment; en tout cas, cette recherche prouve à la fois leur attachement à Élie et leur ignorance. Le Christ reviendra pour son peuple, mais c’est le diable qui dit: «Voici, il est ici, ou voici, il est là», quand il est encore dans le ciel. Aussi, Élisée, l’esprit prophétique envoyé par Christ, dit: «N’y allez pas», mais il a beaucoup de condescendance pour leur ignorance, car, une seconde fois, Élisée dit: «Envoyez» (v. 16-17). Il faut qu’ils soient convaincus que leurs espérances, en tant que liées à l’ancien ordre de choses en Israël, sont vaines. Les cinquante hommes cherchent trois jours et ne trouvent rien. On ne peut plus trouver le Messie ici-bas. Il est vivant, après avoir, à l’encontre d’Élie, passé en réalité par la mort, pour être le premier-né des morts, ce qu’Élie ne pouvait être. Ces hommes reviennent vers Élisée. Ce n’était pas aux anciens prophètes, ni au résidu prophétique de la fin, mais aux premiers disciples, de voir Christ monter au ciel. Il y aura un témoignage se rattachant au leur, comme ayant reçu la double mesure de son Esprit. Les fils des prophètes, malgré les bonnes intentions de leur cœur, n’agissaient pas selon l’Esprit.

Pendant ce temps de recherches, où la conviction se fait dans l’esprit des fils des prophètes, Élisée habite à Jéricho, dans le lieu de la malédiction (v. 18), mais il est en bénédiction aux hommes de la ville, car il n’a pas uniquement les prophètes en vue. Tandis que le travail a lieu dans le cœur de ces derniers, il y a place pour la bénédiction sur une plus vaste échelle. Le peuple s’adresse à Élisée. Jéricho rebâti sur le lieu du jugement et contre les pensées de Dieu, était bon par son emplacement. Ce n’était pas le choix de Jéricho qui était mauvais, car, à l’entrée du peuple en Canaan, cette cité de l’ennemi était devenue le lieu de la puissance divine et de la victoire. Ce qui était mauvais, c’était ce que les hommes en avaient fait, une cité contraire aux pensées de Dieu, vraie offense à sa volonté. Aussi, le résultat de la désobéissance d’Hiel était que la source alimentant la ville était corrompue et qu’on devait y mourir. En outre, la terre était stérile; aucun fruit n’en pouvait sortir.

Pour qu’une source de vie pût y jaillir, il fallait du sel dans un vase neuf; une vraie mise à part pour Dieu, contenue dans une nouvelle nature. Elle seule pouvait remédier aux conséquences de la corruption amenée par le péché et par la désobéissance du peuple, car la Parole ne parle de ces eaux corrompues qu’après la désobéissance d’Hiel (1 Rois 16:34). Le résidu prophétique seul (le sel dans le vase neuf) pourra remplir cet office, car, comme les douze qui entouraient le Seigneur, il portera, à la fin des temps, ce vrai caractère des enfants du royaume (Matt. 5:13).

Tels sont donc les deux premiers fruits du retour d’une double mesure de l’Esprit prophétique: ceux du peuple qui étaient prophètes deviennent les témoins du fait que le Messie n’est pas dans ce monde et qu’il a été enlevé au ciel. Le peuple s’adresse au représentant de Christ ici-bas, et retrouve la bénédiction par un vrai esprit de sainteté caractérisant le nouvel homme (voyez le caractère du résidu de la fin, dans les Psaumes) et versé où était auparavant une source de mort et de stérilité.

La Parole aura son rôle dans cette œuvre, car la bénédiction est répandue par la parole prophétique: «la parole qu’Élisée avait prononcée» (v. 22). Élisée dit, — quelle grâce pour ces hommes accablés sous les conséquences de la malédiction divine: «J’ai assaini ces eaux; il ne proviendra plus d’ici ni mort ni stérilité» (v. 21). Tel est le résultat définitif du témoignage du Saint Esprit en Israël à la fin des temps. La bénédiction spirituelle remplace toute la misère sous le poids de laquelle une partie de ce pauvre peuple, livré à l’Apostat, était courbée. C’est le grand fait capital représenté en type par l’habitation d’Élisée à Jéricho.

Mais un autre fait ne doit pas être passé sous silence (v. 23-24). Élisée monte à Béthel. De petits garçons, représentant le peuple inintelligent, moqueur et incrédule, sortent de Béthel au moment où le prophète va rencontrer Dieu dans sa maison, dans le lieu de ses immuables promesses. Quelle anomalie! des enfants, créés pour la louange, se moquent de l’homme de Dieu; un âge, caractérisé selon les pensées de Dieu, par la confiance et le respect pour ce qui est au-dessus de lui, outrage le prophète! Au lieu de reconnaître le Dieu des promesses, ils se moquent de son serviteur et le méprisent. «Monte, chauve!» lui crient-ils, parce qu’il porte sur lui les signes de la décrépitude et de la vieillesse (tel le résidu dans les Psaumes) (Ps. 71:9, 18, etc.) et de l’opprobre. Et cependant la loi déclare un tel homme pur et non souillé (Lév. 13:40-41). Ceux dont Dieu devait attendre la simplicité de foi, rejettent le représentant et le témoin du Messie, identifié avec le résidu faible et courbé, et plaisantent sur son apparence. Il semblerait aussi qu’ils se moquent d’Élie, son maître. «Monte, chauve!» disent-ils. Ils ne croient pas à l’enlèvement d’Élie. Une pareille folie n’est pas même bonne pour des enfants! Où est la promesse de son avènement? Le monde n’est-il pas le même, dès aujourd’hui? Ces outrages sont d’autant plus odieux qu’ils s’adressent à l’Esprit de Christ, revenant en grâce, et non pas en jugement, comme Élie. Élisée se tourne en arrière, car il a devant lui les promesses et non le jugement, «et il les maudit au nom de l’Éternel». Ils deviennent la proie d’une puissance inexorable et cruelle qui les saisit et les déchire.

«Et, de là, il se rendit à la montagne de Carmel, d’où il s’en retourna à Samarie» (v. 25). Le peuple apostat n’a pas voulu de Béthel, mais le résidu prophétique, après avoir recouvré les promesses faites à Christ, se retire au Carmel. Il arrive dans «un champ fertile» pour y jouir de la paix et de la communion avec son Dieu. C’est là qu’Élie était monté après le jugement des prêtres de Baal, là qu’Élisée monte après la malédiction des moqueurs. Carmel était pour Élie le lieu de l’intercession; de là, une pluie bienfaisante de bénédictions était descendue sur Israël. «L’Esprit», dit Ésaïe, sera «répandu d’en haut sur nous», et le désert deviendra un champ fertile (un Carmel)... «et la justice habitera le champ fertile; et l’œuvre de la justice sera la paix, et le travail de la justice, repos et sécurité à toujours. Et mon peuple habitera une demeure de paix et des habitations sûres, et des lieux de repos tranquilles» (Ésaïe 32:15-19). Nous arrivons donc ici à la fin du cycle typique, à la bénédiction millénaire.

Le retour d’Élisée à Samarie ramène, dans une mesure, le prophète au milieu des événements de l’histoire.

 

En terminant ce chapitre important, résumons en quelques mots la carrière, close maintenant, d’Élie, et celle d’Élisée dans ce passage.

Élie, le grand prophète de la loi, a rapporté à Dieu cette loi violée, en Horeb. Il juge les prophètes de Baal, il juge Achab et Jézabel, il juge Achazia et ses satellites par le feu du ciel; il désigne Hazaël et Jéhu comme exécuteurs du jugement. Il n’est en cela type de Christ que parce que ce dernier exécutera le jugement, mais après le temps de la grâce. Il est, en revanche, le type du précurseur Jean-Baptiste, le plus grand des prophètes de l’ancienne alliance (Mal. 4:5; Matt. 11:14; Luc 1:17; Matt. 17:10-12).

Élie, prophète rejeté, se tourne vers les nations (veuve de Sarepta), ressuscite leurs morts, envoie la pluie de bénédictions sur Israël. Il représente, en cette qualité, le ministère de grâce apporté par le Seigneur.

Élie refait le chemin d’Israël, comme étant lui-même le vrai Israël, acquiert les promesses, prend en grâce la place que le peuple s’est attirée par son infidélité (Jéricho), passe victorieusement le fleuve de la mort, est enlevé au ciel. C’est le chemin de Christ, serviteur et prophète en Israël.

Élisée, d’abord type du résidu, serviteur de Christ prophète, tel qu’il a marché sur la terre, le suit jusqu’au bout, dans toute sa marche de sainteté et le voit monter au ciel.

Élisée, l’Esprit prophétique de Christ avec le résidu, reçoit la double mesure de l’Esprit de Christ monté au ciel, retrace le chemin de Christ, sauf Guilgal, la circoncision du Christ ayant eu lieu au Jourdain, dans la mort. Son chemin est avant tout un chemin de grâce et de restauration pour les habitants de la cité maudite, sauf le jugement sur les moqueurs de la fin qui font partie du peuple apostat. Les fils des prophètes sont le résidu prophétique, l’élément sain, mais ignorant, du peuple, avant qu’Élisée revienne à eux avec le double de l’esprit d’Élie. Enfin, Élisée habite en paix dans le champ fertile des bénédictions millénaires.