2 Rois

Henri Rossier

Introduction

Le second livre des Rois fait suite au premier, sans aucune interruption. Il peut être utile de remarquer, afin d’éviter au lecteur une conclusion erronée, que cette division en deux livres ne fait pas partie du texte inspiré, qui ne formait à l’origine qu’un livre dans le canon hébraïque. Puisque nous touchons, en passant, à ce sujet, nous ajouterons, pour nos lecteurs, que l’une des grandes divisions de l’Ancien Testament, «les Prophètes», comprenait, outre les livres des prophètes proprement dits, sauf Daniel et les Lamentations, tous les livres historiques, depuis Josué jusqu’aux livres des Rois inclusivement, le livre de Ruth excepté1.

1 L’Ancien Testament comprenait trois grandes divisions: La loi, c’est-à-dire les cinq livres de Moïse; les Prophètes dont nous venons de parler; enfin les Hagiographes ou «écrits sacrés», connus aussi sous le titre de Psaumes (Luc 24:44), et contenant les Psaumes, les Proverbes, Job, le Cantique des Cantiques, Ruth, les Lamentations, l’Ecclésiaste, Esther, Daniel, Esdras, Néhémie, les deux livres des Chroniques.

Ce titre seul, «les Prophètes», nous éclaire sur les auteurs des livres historiques qui nous occupent. Ils étaient dus aux prophètes et portaient leur marque. La soi-disant critique théologique moderne ne doit en rien influer les convictions du chrétien sur ce point. La parole de Dieu seule suffit pour s’expliquer elle-même, et nous apporter l’assurance de son contenu.

C’est ainsi que les actes de David sont écrits dans les paroles de Samuel le voyant, et dans les paroles de Nathan le prophète, et dans celles de Gad le voyant (comp. 1 Chron. 29:29, avec 1 et 2 Samuel); les actes de Salomon, dans les paroles de Nathan le prophète, dans la prophétie d’Akhija, et dans la vision de Jehdo le voyant, touchant Jéroboam, fils de Nebath (comp. 2 Chroniques 9:29, avec 1 Rois); les actes de Roboam, dans les paroles de Shemahia le prophète, et d’Iddo le voyant, dans les registres généalogiques (2 Chron. 12:15); les actes d’Abija, dans les commentaires d’Iddo le prophète (2 Chron. 13:22); ceux de Josaphat, dans les paroles de Jéhu, fils de Hanani, lesquelles sont insérées dans le livre des rois d’Israël (2 Chron. 20:34). Les actes d’Ozias ont été écrits par Ésaïe, fils d’Amots (2 Chron. 26:22); ceux d’Ézéchias, dans la vision d’Ésaïe le prophète (Comp. 2 Chroniques 32:32, avec 2 Rois 18-20, et Ésaïe 36-39). Enfin 2 Rois 24:18-25, correspond à Jérémie 52.

N’est-il pas remarquable que ce soient précisément les livres des Chroniques, si contestés, si attaqués par les rationalistes, qui affirment l’autorité prophétique de nos livres historiques? Or, s’il est vrai que les livres des Rois sont l’œuvre des prophètes, et cela nous suffit, puisque la parole de Dieu ne nous en dit pas davantage sur la manière dont ils ont été composés, nous pouvons nous attendre à y trouver, non pas le simple récit de faits historiques, et une relation parfaitement exacte de ces faits, puisqu’elle est d’origine divine, mais aussi les caractères qui forment la substance de tout écrit prophétique, des exemples des souffrances passées, et des gloires futures de Christ.

C’est ce que nous ont montré surabondamment les livres de Samuel et le premier livre des Rois, dans les personnes de David et de Salomon. Mais cela nous explique aussi pourquoi les prophètes eux-mêmes jouent un rôle prépondérant dans ces livres. Ce fait, comme nous l’avons déjà mentionné autre part, nous frappe dès que nous les abordons. Rien que l’activité d’Élie et d’Élisée, s’étend sur dix-neuf chapitres des Rois, qui en contiennent quarante-sept.

En manière de préface, il est utile d’ajouter encore ici, quelques remarques qui n’ont pas trouvé place dans l’Introduction du premier livre des Rois. Elles portent sur le caractère des prophètes d’Israël, en contraste avec ceux de Juda. En étudiant le premier livre des Rois, nous avons pu constater le caractère du ministère d’Élie, qui était avant tout un ministère de miracles. Nous aurons l’occasion de le remarquer, plus amplement encore, dans la carrière d’Élisée, le second grand prophète d’Israël. L’activité de ces hommes de Dieu consistait beaucoup plus en actes qu’en paroles. Au contraire, celle des prophètes de Juda en diffère du tout au tout. Ils parlent, et ne font que bien rarement un miracle, tel que celui du cadran d’Achaz (Ésaïe 38:8). Ce contraste provient de ce que la profession publique du culte de l’Éternel était encore reconnue en Juda, et subsistait malgré les mélanges idolâtres; il n’était donc pas besoin de miracles pour l’accréditer.

Cela nous conduit à répondre à la question, souvent posée, pourquoi l’on ne voit plus aujourd’hui de miracles dans la chrétienté. La raison est la même. Tant qu’elle n’aura pas été vomie de la bouche du Seigneur, les miracles destinés à affermir le cœur des fidèles, aux prises avec l’apostasie, n’auront pas lieu, ni ceux destinés à revendiquer le caractère du vrai Dieu, devant les hommes qui l’ont abandonné.

Il en était autrement, au commencement de l’histoire de l’Église. De nombreux miracles avaient lieu, soit au milieu des Juifs qui avaient rejeté leur Messie, afin de leur prouver la divinité du Sauveur, soit au milieu des nations idolâtres, pour accréditer la prédication du Dieu qui leur était inconnu. Dieu rendait témoignage avec ses serviteurs, «par des signes et des prodiges, et par divers miracles et distributions de l’Esprit Saint, selon sa propre volonté» (Héb. 2:4).

Le catholicisme prétend aux miracles, comme, dans une mesure aussi, le protestantisme de nos jours, aux dons miraculeux. De fait, ce que le premier nous présente, ce sont de faux miracles, destinés à aveugler les simples, tandis que le second cherche à s’accréditer, par l’apparence d’une puissance divine, quand déjà l’apostasie se fait reconnaître partout dans son sein.

Après l’enlèvement des saints, les miracles du siècle à venir se manifesteront largement, soit parmi les Juifs, soit devant les nations, par le moyen du résidu, comme nous le voyons en Apocalypse 11. L’histoire d’Élisée nous fournira l’occasion de considérer ce sujet en type. Mais, dans le même temps, le pays d’Israël, du peuple apostat sous l’Antichrist, et le monde entier, seront le théâtre de miracles de mensonges opérés par le faux prophète, dernier instrument de Satan, pour séduire les hommes qui habitent sur la terre (Apoc. 13:13-15).

Nous nous bornerons à ces quelques remarques préliminaires, qui trouveront une ample confirmation dans la partie des Écritures que nous désirons étudier sous le regard du Seigneur, et avec le secours de son Saint Esprit.