2 Pierre

Chapitre 2

Or il y a eu aussi de faux prophètes parmi le peuple, comme aussi il y aura parmi vous de faux docteurs qui introduiront furtivement des sectes de perdition, reniant aussi le Maître qui les a achetés, faisant venir sur eux-mêmes une prompte destruction; et plusieurs suivront leurs excès: et à cause d’eux la voie de la vérité sera blasphémée; et, par cupidité, ils feront trafic de vous avec des paroles artificieuses; mais leur jugement, dès longtemps, ne demeure pas oisif, et leur destruction ne sommeille pas. (v. 1-3)

La seconde partie de l’épître que nous abordons avec ce chapitre, traite, comme nous l’avons déjà remarqué, du gouvernement du monde chrétien en opposition avec le gouvernement de la maison de Dieu, présenté dans la première épître.

En contraste avec les «saints hommes de Dieu» dont il vient de parler, l’apôtre annonce qu’il y aura parmi les chrétiens de faux docteurs, comme il y eut jadis de faux prophètes parmi le peuple juif. Pour en donner un exemple, il suffit de mentionner l’histoire de 1 Rois 22. Nous ne citons pas Balaam qui, d’une part ne faisait pas partie du peuple, et d’autre part n’est pas appelé un faux prophète, mais un prophète.

À ces faux prophètes, l’apôtre oppose les faux docteurs des débuts du christianisme se présentant au milieu des fidèles et introduisant furtivement des «sectes de perdition». Ces sectes de perdition pullulent aujourd’hui dans la chrétienté professante, comme elles firent autrefois leurs ravages parmi les chrétiens sortis du judaïsme. Leur caractère était de s’attaquer à la personne même du Sauveur. Ils reniaient Christ, le Maître qui les avait achetés (non pas rachetés) et avait étendu sa puissance sur eux pour prendre possession d’eux comme faisant partie de son peuple. Ces gens-là seraient voués à une «prompte destruction». Je ne doute pas qu’après le départ des apôtres les choses ne se soient passées ainsi au milieu de ces juifs professant le christianisme. Il se trouvait parmi eux des docteurs, portant le nom de chrétiens, qui reniaient Christ comme étant Fils de Dieu; leur nombre a-t-il diminué aujourd’hui? Le grand point, c’est que leur jugement comme corrompant la vérité ne se fera pas attendre.

 

Car, si Dieu n’a pas épargné les anges qui ont péché, mais, les ayant précipités dans l’abîme, les a livrés pour être gardés dans des chaînes d’obscurité pour le jugement; — et s’il n’a pas épargné l’ancien monde, mais a préservé Noé, lui huitième, prédicateur de justice, faisant venir le déluge sur un monde d’impies; — et si, réduisant en cendres les villes de Sodome et de Gomorrhe, il les a condamnées par une totale subversion, les établissant pour être un exemple à ceux qui vivraient dans l’impiété... (v. 4-6)

Tout ce passage fait ressortir la justice du gouvernement de Dieu envers les méchants. Il commence par les anges qui n’ont pas gardé leur origine (comp. Gen. 6:2 et Jude v. 6); il la montre ensuite lors du déluge, dont il a déjà parlé dans sa première épître (3:20). Noé était un «prédicateur de justice», en contraste avec le monde impie; il annonçait la justice de Dieu en jugement. Le troisième exemple nous le voyons en Sodome et Gomorrhe, dont Dieu fait un exemple pour ceux qui vivent dans l’impiété. De ces trois exemples, deux, les anges et les hommes, n’ont pas «gardé leur origine», le troisième, lors du déluge, comprend la méchanceté incurable de l’homme et l’impiété qui ne tient aucun compte des relations de l’homme avec Dieu.

Et s’il a délivré le juste Lot, accablé par la conduite débauchée de ces hommes pervers, (car ce juste qui habitait parmi eux, les voyant et les entendant, tourmentait de jour en jour son âme juste à cause de leurs actions iniques), — (v. 7-8)

L’Esprit cite ici le cas de Lot, l’appelant le juste Lot qui tourmentait son âme juste. Dieu tient compte de la justice que sa grâce avait donnée à Lot et qui prime toute autre chose, alors même que ce juste ait dû porter ici-bas, jusqu’au bout, le jugement terrible de son entraînement vers le monde, — et de la convoitise des yeux qui lui fit préférer les choses visibles à la communion secrète avec le Seigneur.

 

Le Seigneur sait délivrer de la tentation les hommes pieux, et réserver les injustes pour le jour du jugement, pour être punis. (v. 9)

L’apôtre insiste sur le cas de Lot, parce que, à travers tous ses tristes manquements, il tenait compte de la sainteté de Dieu qu’il connaissait, tandis que les injustes sont réservés pour le jugement. N’oublions pas que si Abraham et Lot ont été amenés, par la grâce de Dieu, par la foi, au même résultat, celui d’attendre avec certitude une meilleure patrie qui ne fera jamais défaut à ceux qui ont cru, il n’y a cependant aucune comparaison possible entre ces deux hommes quant à la jouissance des choses célestes. Abraham se tenait sur la montagne avec l’Éternel, jouissant d’une communion ininterrompue avec lui, capable d’intercéder pour les pécheurs et de venir en aide à ses frères. Abraham avait l’oreille de Dieu, si j’ose m’exprimer ainsi. Lot, sans communion avec le Seigneur, «tourmentait de jour en jour son âme juste» à cause des actions iniques des hommes qui l’entouraient.

De pareils exemples n’appartiennent pas seulement aux temps d’autrefois; nous les voyons se répéter continuellement dans les jours que nous traversons. Une vie occupée des intérêts de la terre, alors même que l’on a la conscience d’appartenir au Seigneur, imprime à la piété un cachet de souffrance. L’âme est plus occupée du tort fait au Seigneur par l’incrédulité ambiante que des privilèges merveilleux dont elle pourrait jouir en vivant dans un milieu qu’elle sait lui appartenir en propre et qui va devenir pour elle «le royaume éternel de notre Seigneur Jésus Christ». D’un côté l’âme tourmentée chaque jour par la vue du mal, de l’autre côté l’âme élevée par la foi au-dessus de cette atmosphère empoisonnée, et jouissant de l’avant-goût des choses éternelles, tels sont les traits qui caractérisent aussi bien les chrétiens d’aujourd’hui que ceux du temps de l’apôtre Pierre.

 

Mais spécialement ceux qui suivent la chair dans la convoitise de l’impureté et qui méprisent la domination. Gens audacieux, adonnés à leur sens, ils ne tremblent pas en injuriant les dignités, tandis que les anges, plus grands en force et en puissance, ne portent pas contre elles de jugement injurieux devant le Seigneur. Mais ceux-ci, comme des bêtes sans raison, purement animales, nées pour être prises et détruites, parlant injurieusement dans les choses qu’ils ignorent, périront aussi dans leur propre corruption, recevant la récompense de l’iniquité. (v. 10-13a)

L’apôtre résume sous deux chefs les causes du jugement de ces hommes: 1° Ils suivent la chair dans la convoitise de l’impureté. Or combien ce fait est fréquent et, dirai-je, journalier, dans les rapports religieux entre les hommes; 2° ils méprisent la domination et ne tremblent pas en injuriant les dignités. C’est ce dernier point sur lequel (v. 11-12) l’apôtre insiste maintenant. Jude, parlant d’un temps postérieur, dit les mêmes choses et, en plusieurs cas, dans les mêmes termes.1 Il est remarquable de voir avec quelle indignation la corruption de la fin est stigmatisée dans ces deux épîtres. Il semble même que ces deux choses: la corruption morale et le mépris de l’autorité sont haïes de Dieu au même degré. Ce dernier point n’est-il pas ce qu’on trouve aujourd’hui dans les états qui, comme la Russie, devancent pour ainsi dire la décomposition morale des derniers jours?

1 Ne pensant pas revenir sur ce sujet, nous renvoyons le lecteur au traité intitulé: «L’Épître de Jude ou les derniers jours de la Chrétienté» par H. R.

Ceux-ci, dit l’apôtre, «périront dans leur propre corruption». Quel sort! Porter, jusque dans les tourments d’au-delà, la corruption dans laquelle on s’était vautré et qui s’attache, avec tous ses dégoûts et toute son horreur, à la chair ressuscitée, à travers les temps éternels, où seul subsistera l’amer et éternel dégoût de toutes les choses que l’on avait trouvées désirables sur la terre!

 

Estimant plaisir les voluptés d’un jour; — des taches et des souillures, s’abandonnant aux délices de leurs propres tromperies tout en faisant des festins avec vous; ayant les yeux pleins d’adultère, et ne cessant jamais de pécher; amorçant les âmes mal affermies, ayant le cœur exercé à la cupidité, enfants de malédiction. (v. 13b, 14)

Ils avaient estimé plaisir les voluptés d’un jour; que sera leur réveil pour l’éternité quand il n’y aura plus de voluptés à goûter et que tout ce qu’on aura désiré et poursuivi, vous fera horreur! Avec cela ces hommes font des festins avec les croyants et trouvent leurs délices à les tromper, apportant, dans le commerce avec eux, leurs yeux pleins d’adultère et amorçant les âmes mal affermies qu’ils réussissent à induire en tentation.

 

Ayant laissé le droit chemin, ils se sont égarés, ayant suivi le chemin de Balaam, fils de Bosor, qui aima le salaire d’iniquité; mais il fut repris de sa propre désobéissance: une bête de somme muette, parlant d’une voix d’homme, réprima la folie du prophète. (v. 15-16)

Leur chemin est l’abandon du droit chemin; ils se sont égarés. Tel était Balaam, fils de Bosor. Il est dit de lui, non qu’il fût un faux prophète, mais un prophète atteint de folie. Ce qui le caractérisait, c’est 1° qu’il aima le salaire d’iniquité; 2° qu’il marcha dans la désobéissance, 3° que sa folie fut réprimée avec une voix d’homme par une bête de somme muette.

 

Ce sont des fontaines sans eau et des nuages poussés par la tempête, des gens à qui l’obscurité des ténèbres est réservée pour toujours; car, en prononçant d’orgueilleux discours de vanité, ils amorcent par les convoitises de la chair, par leurs impudicités, ceux qui avaient depuis peu échappé à ceux qui vivent dans l’erreur; — leur promettant la liberté, eux qui sont esclaves de la corruption; car on est esclave de celui par qui on est vaincu. (v. 17-19)

Qu’y a-t-il de plus inutile que des fontaines sans eau? de plus décevant que des nuages, poussés par la tempête qui les disperse et les anéantit? Quel sort plus terrible que d’être plongé pour toujours dans l’obscurité des ténèbres? Le verset 18 nous parle de l’action de ces hommes sur ceux qui avaient depuis peu échappé à ceux qui vivent dans l’erreur. Ce n’est pas à des croyants expérimentés que ces gens s’adressent, sachant qu’ils y perdraient leurs peines, mais aux novices, en sorte que, tentés par les convoitises, ils succombent. Les convoitises de la chair, les impudicités jouent un très grand rôle dans les séductions de ces hommes impies. Ils promettent la liberté à ceux qu’ils séduisent, tandis qu’eux-mêmes sont esclaves de la corruption qui les a vaincus et asservis!

 

Car, si, après avoir échappé aux souillures du monde par la connaissance du Seigneur et Sauveur Jésus Christ, étant de nouveau enlacés, ils sont vaincus par elles, leur dernière condition est pire que la première; car il leur eût mieux valu n’avoir pas connu la voie de la justice, que de se détourner, après l’avoir connue, du saint commandement qui leur avait été donné; mais ce que dit le proverbe véritable leur est arrivé: Le chien est retourné à ce qu’il avait vomi lui-même, et la truie lavée, à se vautrer au bourbier. (v. 21-22)

Ces paroles s’adressent à ceux qui, parmi ces chrétiens juifs, avaient eu, comme en Héb. 6:4-6, la connaissance du Seigneur et Sauveur Jésus Christ et avaient, par ce fait, échappé aux souillures du monde. Rien, en effet, n’exerce une influence plus bénie sur l’âme attirée vers la vérité, que de se trouver en contact, même extérieur, avec Celui qui représente la pureté parfaite. Ils échappent de cette manière, ne fût-ce que momentanément, à l’influence de la corruption ambiante. Les choses excellentes, telles que la «participation à l’Esprit Saint» ne leur sont point étrangères, mais ensuite ils retombent sous un joug dont ils n’avaient été délivrés que d’intention, et leur dernière condition est pire que celle où, enlacés par ces souillures, ils étaient encore ignorants de la purification. Il leur eût mieux valu n’avoir pas connu un chemin dont le péché est absent (chemin que connaissent les rachetés de Jésus Christ) que de se détourner après avoir connu la voie du «saint commandement»: «Soyez saints, car moi je suis saint».

Il y avait donc eu, chez ces disciples, la connaissance de la sainteté en quittant l’impureté, il y avait eu un commandement qui les mettait à l’abri, une obéissance momentanée et la jouissance qu’elle apporte à l’âme, puis ils avaient prêté l’oreille au mal et au péché, croyant obtenir ainsi la liberté, et étaient redevenus esclaves de l’impureté plus qu’auparavant. Leur sort était pire. Leur état naturel n’avait pas été changé par la connaissance et même la jouissance de choses meilleures. Il en est de même du chien retournant à son vomissement, ou de la truie trouvant plus de délices à se vautrer dans le bourbier, qu’à être lavée de ses souillures.

Tout cela soulève une sainte indignation chez l’apôtre, quand il compare toute cette souillure, à caractère essentiellement judaïque, avec le prix, l’éclat, la sainteté pratique que l’œuvre du Seigneur et Sauveur Jésus Christ apportait aux croyants. Jude applique ces mêmes vérités aux nations; mais, chez l’un comme chez l’autre, l’horreur du mal va croissant à mesure que se dessinent les temps de la fin.