1 Timothée

Henri Rossier

Introduction

Avant d’entreprendre une étude détaillée de cette épître, il nous semble utile de rappeler en quelques mots ce qu’est l’Église (ou l’Assemblée) telle que l’épître aux Éphésiens et quelques autres passages nous la présentent, et ce qu’est cette même Assemblée dans les trois épîtres (1, 2 Timothée et Tite) appelées avec plus ou moins de raison les «épîtres pastorales».

L’épître aux Éphésiens nous présente l’Assemblée sous tous ses aspects, sauf un; les trois épîtres en question sous le seul aspect qui manque dans l’épître aux Éphésiens. Voici comment l’Assemblée nous est présentée dans cette dernière:

1° Elle est, avant tout, le Corps de Christ sur la terre (1:23), composé de tous les croyants vivants, formés en unité. Cette unité abolit toute distinction entre Juifs et Gentils et forme un ensemble indissolublement lié par le Saint Esprit avec Christ, Tête glorifiée de son corps, dans le ciel. C’est un «mystère» dont l’apôtre Paul seul est l’administrateur. Malgré la ruine actuelle de l’Assemblée, nous pouvons encore, et ne fussions-nous que deux ou trois, manifester cette unité à la table du Seigneur, selon 1 Cor. 10:17; immense privilège pour ceux qui en ont compris la portée!

2° L’Église est l’Épouse de Christ (5:24-27). Le Seigneur s’en occupe pour la purifier par la Parole, pendant sa marche ici-bas, avant de la recueillir auprès de Lui dans la gloire. Ici encore, malgré la ruine de l’Église, quiconque réalise, comme une chose actuelle, l’amour sans bornes de Christ par lequel il s’est livré lui-même pour son Épouse, comprendra, dans les fibres les plus intimes de son cœur, qu’il en fait partie, en jouira comme d’une réalité profonde qui s’adresse à ses affections, et s’écriera avec elle, dans la puissance du Saint Esprit qui l’anime: «Viens, Seigneur Jésus!» (Apoc. 22:17).

3° L’Assemblée est un temple saint que le Seigneur lui-même édifie sur le fondement des apôtres et prophètes et dont Jésus Christ lui-même est la maîtresse pierre du coin, un édifice en croissance jusqu’à ce que son divin architecte y ait ajouté la dernière pierre. Ainsi, construite par Lui, cette maison de Dieu est un édifice parfait (Éph. 2:19-21).

La même vérité nous est présentée en Matt. 16:16-18. C’est sur la confession de Christ, déclaré, par sa résurrection, Fils du Dieu vivant, que le Seigneur bâtit son Assemblée. Pierre est une des pierres de cet édifice contre lequel les portes du hadès ne peuvent rien. Ici encore l’œuvre toute entière dépend de Christ seul et Satan lui-même est impuissant pour la détruire. En 1 Pierre 2:5, nous trouvons quelque chose d’analogue. Christ y est la pierre vivante, rejetée des hommes, mais choisie et précieuse aux yeux de Dieu. Nous nous approchons de lui comme des pierres vivantes et sommes édifiés sur lui comme une maison spirituelle. Qu’il y ait des instruments pour apporter ces pierres ne fait aucun doute, mais ici la Parole, faisant abstraction de toute instrumentalité humaine, nous montre que l’édifice n’est composé que de pierres vivantes.

4° Nous sommes édifiés ensemble dans le Seigneur pour être une habitation de Dieu par l’Esprit (Éph. 2:22). Il y a donc dans ce monde une chose telle qu’un lieu où Dieu lui-même habite par son Esprit. Ici, de nouveau, rien n’est laissé à la responsabilité de l’homme. Ce n’est pas lui qui édifie, c’est Dieu lui-même qui veut avoir une habitation ici-bas. Ce grand fait s’est réalisé par l’effusion du Saint Esprit à la Pentecôte et a été complété par l’introduction des Gentils dans l’Assemblée chrétienne.

 

Tels sont les divers aspects offerts jusqu’ici par l’Assemblée. C’est Dieu lui-même qui fait l’ouvrage, aussi n’existe-t-il proprement pas de différence entre ce qui constitue le corps, l’Épouse, l’édifice, ou la maison. Tous, lors de leur formation, sont composés des mêmes éléments. L’œuvre qui les réunit en un est parfaite, parce qu’elle est divine.

Mais il est vrai aussi que Dieu confie l’édification de sa maison dans ce monde à la responsabilité de ceux qui en font partie. L’ouvrage de l’homme y entre alors pour une part; et c’est ce que nous présente d’une manière évidente le troisième chapitre de la première épître aux Corinthiens. Paul avait posé, comme un sage architecte, le fondement qui est Christ, et personne ne peut poser d’autre fondement que celui-là. Chacun avait à voir comment il édifierait sur ce fondement. Dieu avait d’abord, comme pour toute création, fait tout cela fort bon, mais le moment vient où il confie son œuvre à l’homme. Comment ce dernier va-t-il s’acquitter de son travail? En dépit de ce qui pourra arriver, Dieu continue son œuvre et l’achèvera; mais, confiée à l’homme, il est prouvé que, si certains ouvriers sont de bons ouvriers, faisant de bon ouvrage, d’autres, hélas! tout en étant de bons ouvriers, font de mauvais ouvrage, et qu’enfin une troisième classe est composée de mauvais ouvriers qui corrompent et détruisent le temple de Dieu.

L’œuvre des ouvriers peut consister dans l’introduction de bonnes ou mauvaises personnes, de bonnes ou mauvaises doctrines. Il reste cependant toujours vrai que, même considéré sous cet aspect, l’édifice n’en est pas moins le temple de Dieu, la maison de Dieu. Il en était ainsi du temple de Jérusalem quand le Seigneur disait: «Il est écrit: Ma maison est une maison de prière; mais vous, vous en avez fait une caverne de voleurs» (Luc 19:46). Cependant, comme telle, elle n’avait pas cessé d’être appelée la maison de Dieu. Cette maison est au fond toujours l’ouvrage de Christ: malgré les éléments impurs que l’homme y a introduits; malgré les mauvais matériaux qui la déparent, le fondement en a été posé «par un sage architecte», l’apôtre Paul, qui n’a pas manqué à sa tâche. Aussi, quelle que soit sa corruption, cette maison subsiste aussi longtemps que Dieu y habite par son Esprit. Mais il arrivera un moment où elle ne contiendra plus de bons matériaux, lorsque l’Esprit remontera au ciel avec l’Épouse, et que le Seigneur vomira de sa bouche, comme une chose dégoûtante, ce qui avait porté son nom.

Toutefois n’oublions pas qu’appartenir à la maison de Dieu, même responsable, ici-bas, est un immense privilège. Quelle que soit la condition morale de cette maison, elle reste un lieu où Dieu habite par son Esprit. On ne trouve pas ce lieu partout dans le monde, Dieu n’habitant par son Esprit ni dans le Mahométisme, ni même dans le Judaïsme. C’est dans ce lieu-là qu’on rencontre la vie unie à la profession chrétienne; mais, hélas! aussi la profession chrétienne sans la vie, devenant pour ceux qui n’ont que la profession la cause même de leur condamnation. C’est là que l’on trouve, d’autre part, l’Esprit et ses manifestations diverses, la vérité, la parole inspirée, l’Évangile du salut, le témoignage. En séparant la profession de la vie, Satan a fait une œuvre de destruction. Cette œuvre néfaste, basée sur la mondanité qui s’est introduite dans l’Église, et accompagnée de fausses doctrines et de légalisme, a commencé de bonne heure, du temps des apôtres, comme nous le voyons dans les Épîtres et dans les Actes. N’est-il pas frappant que ces choses soient annoncées aux anciens d’Éphèse, assemblée où les vérités les plus élevées du christianisme avaient été proclamées et appréciées (Actes 20:29-30) et que ce soit encore à Éphèse que Timothée ait à les réprimer? (1 Tim. 1:3). En 2 Tim., le mal progressant, la maison de Dieu est devenue une grande maison contenant des vases à déshonneur dont il faut se purifier, car le chrétien ne peut sortir de la maison elle-même.

C’est donc sur le terrain de la maison de Dieu responsable, que nous introduisent les épîtres à Timothée et celle à Tite; seulement, dans la première épître à Timothée nous trouvons encore la maison de Dieu, comme «Assemblée du Dieu vivant, colonne et soutien de la vérité»; les chrétiens responsables de son ordre et de son fonctionnement; le mal existant et cherchant à se faire valoir dans l’Assemblée; une digue mise par le Saint Esprit à son débordement, par l’activité du fidèle Timothée, délégué de l’apôtre. En 2 Tim., nous trouvons une grande maison avec un mélange profondément attristant de vases à honneur et à déshonneur, mais en même temps, chose infiniment consolante, un chemin révélé pour le jour actuel, jour de ruine irrémédiable, au milieu de ces décombres; un chemin dans lequel le Seigneur peut être glorifié par les fidèles comme aux plus beaux jours de l’édification de la maison de Dieu.

Il est évident que les épîtres à Timothée ne nous transportent pas, comme celle aux Éphésiens, dans les lieux célestes. Il s’agit ici d’un témoignage rendu au Seigneur sur la terre, et caractérisé par l’ordre et la discipline selon Dieu, ordre que les anges sont appelés à contempler, de manière à voir le Dieu invisible dans l’assemblée de ceux qu’il a sauvés.