1 Samuel

Chapitre 3

Suivons encore, dans ce chapitre, le parallèle entre Éli et Samuel. Le premier continue dans le chemin du déclin, le second va grandissant, jusqu’à ce que tout Israël apprenne que l’Éternel l’a établi prophète.

Au v. 1, Samuel est caractérisé de la même manière qu’au commencement de sa carrière: «Le jeune garçon Samuel servait l’Éternel devant Éli» (Conf. 2:11). Il ne s’agit pas d’une gradation dans ce passage: l’Esprit de Dieu pose ici de nouveau la base de ce qui va suivre.

Le service de Samuel avait eu pour conséquence, au chap. 2, de lui confier certains attributs de la sacrificature qui allait être ôtée à Éli. En un temps de ruine, les fonctions de la maison de Dieu ne sont pas aussi définies qu’en des temps prospères. Il en est de même aujourd’hui des dons dans l’Église. Tous les membres de Christ ne remplissant plus les fonctions qui leur étaient assignées, le Seigneur confie souvent à un seul ce que, dans l’état normal, il aurait réparti entre plusieurs. Je ne parle nullement ici du principe clérical qui prétend accumuler sur la tête d’un homme des dons acquis par des études et confirmés par des examens.

Dans notre chapitre, le service de Samuel le conduit à la prophétie. C’est par le service qu’on s’acquiert un bon degré (1 Tim. 3:13). Si nous faisons comme Samuel qui ne sortait pour ainsi dire pas du sanctuaire, Dieu nous confiera d’autres services. Lorsque, comme Samuel, on sert l’Éternel dès sa jeunesse et que l’on grandit en sa présence, on peut être employé utilement ensuite en faveur de son peuple.

Cependant il manquait encore au développement spirituel de Samuel deux choses sans lesquelles il ne peut y avoir de témoignage public: «Samuel ne connaissait pas encore l’Éternel, et la parole de l’Éternel ne lui avait pas encore été révélée» (v. 7). Il s’agit ici de la connaissance personnelle du Seigneur, car Samuel lui appartenait, le servait et l’adorait dès son enfance, mais il n’avait pas encore rencontré l’Éternel face à face. Il peut arriver dans notre carrière chrétienne que nous jouissions de l’œuvre accomplie à la croix pour nous, sans connaître le Seigneur personnellement. Connaître le salut et l’auteur du salut sont deux choses. Or il n’y a pas de témoignage puissant pour qui ne connaît pas la personne de Christ. Le secret par lequel les Corinthiens pouvaient être une lettre de Christ, connue et lue de tous les hommes, était la contemplation de la gloire du Seigneur à face découverte.

«Et la parole de l’Éternel ne lui avait pas encore été révélée». Souvent, aux temps de ruine, la révélation des pensées de Dieu est entravée par l’ennemi. Aussi est-il dit, au v. 1: «La parole de l’Éternel était rare en ces jours-là: la vision n’était pas répandue». Mais pour être entravée, la Parole n’était pas arrêtée, car la grâce pourvoit aux besoins de chaque époque, et, chose très consolante, c’est souvent aux jours les plus sombres du déclin, que Dieu donne le plus de lumières nouvelles pour guider et encourager les siens. En un temps où la vision n’était pas répandue, Dieu suscite le premier prophète proprement dit en Israël. Par l’infidélité de la sacrificature, les moyens ordinaires établis de Dieu pour s’approcher de Lui, allaient être perdus, mais la grâce de Dieu ne peut laisser son peuple sans secours et sans moyen de communiquer avec Lui. Il donne Samuel, c’est-à-dire la prophétie par laquelle, en grâce souveraine, il s’approche de l’homme et lui fait connaître sa pensée. Samuel est le premier de cette longue lignée de prophètes qui transmettent la parole de Dieu à un peuple que son infidélité aurait, sans cela, laissé sans ressources (Actes 3:24; 2 Chron. 35:18; Jér. 15:1).

Dieu se révèle donc personnellement à Samuel et fait de lui le dépositaire de sa parole. Ce jeune garçon est élevé à la dignité d’ami de Dieu et, comme il le fit pour l’homme d’expérience et de foi qu’était Abraham, Dieu ne lui cache rien de ce qu’il allait faire. Jusque-là l’enseignement d’Éli éclairait Samuel sur la manière d’entrer en communication avec Dieu (v. 9), maintenant il est en rapport direct avec l’Éternel qui lui confie ses secrets. Samuel se montre fidèle à l’égard de ce dépôt et, comme Paul jadis aux Éphésiens (Actes 20:20), il ne cache rien à Éli des choses qui lui sont profitables. Pauvre Éli! mis de côté et obligé de recevoir les pensées de Dieu par la bouche d’un jeune garçon! Quelle humiliation pour ce vieillard, dont le chemin va descendant, tandis que celui de son élève atteint en montant des régions que les pas du souverain sacrificateur n’ont jamais abordées!

Au chap. 1, ce dernier manquait de discernement spirituel; au chap. 2, de courage moral pour se séparer du mal; ici, ses yeux sont troublés et il ne peut voir, et cependant la lumière de Dieu «n’était pas éteinte», image frappante de son état moral. Et de plus, ce conducteur des simples, se montre paresseux à comprendre. Ce n’est qu’au troisième appel qu’«il s’aperçut que l’Éternel avait appelé le jeune garçon». Oui, «paresseux à écouter», voilà ce qu’il était devenu. Samuel était simplement ignorant, ce qui valait mille fois mieux. Quand il y a de la piété, Dieu remédie à l’ignorance. Si l’enfant nouveau-né «désire ardemment le pur lait intellectuel», il ne lui est pas refusé. Ici-bas nous connaissons et ne connaîtrons jamais qu’en partie. Cela ne constitue pas notre responsabilité; mais il s’agit de croître: «Afin que vous croissiez par lui» (1 Pierre 2:3), et ce dont nous sommes responsables, c’est de rechercher, dans ce but, la nourriture spirituelle.

Nous trouvons ici un caractère de l’affaiblissement spirituel d’Éli, qui n’est pas mentionné dans les deux premiers chapitres: «À cause de l’iniquité qu’il connaît, parce que ses fils se sont avilis et qu’il ne les a pas retenus» (v. 13). Éli connaissait le mal, mais il avait l’autorité pour le réprimer chez ses fils, et il n’en avait pas usé1. À quoi servait-il qu’elle lui eût été confiée de Dieu? Combien de fois l’affaiblissement spirituel du chef de famille ne provient-il pas de sa lâcheté quand il fallait maintenir l’ordre et la discipline dans le milieu où son autorité devait s’exercer? C’est une grande source de ruine que celle-là. Sans doute, comme Lot, Éli «affligeait son âme juste à cause de la conduite de ces misérables», mais, comme lui, il montrait un triste oubli de ce qui était dû à la sainteté de l’Éternel.

1 Comparez à ce sujet, Deut. 21:18, etc.

Samuel était saint dans toute sa conduite. Dieu lui confie une révélation; il en administre fidèlement le dépôt; c’est le moyen d’en recevoir une nouvelle. Aussi nous est-il dit: Samuel grandissait; grandissait toujours (2:21, 26; 3:19). Son développement spirituel suivait une marche graduellement ascendante. «Et l’Éternel était avec lui, et il ne laissa tomber à terre aucune de ses paroles». Ainsi toutes les paroles de Samuel étaient gardées par Celui qui l’assistait. Samuel était ainsi l’organe de Dieu pour exprimer sa pensée et parlait «comme ses oracles», parce que Dieu était avec lui pour le garder. Il acquiert ainsi la renommée de prophète en présence de tout Israël. Une révélation en attire une autre: l’Éternel continua de lui apparaître à Silo et de se révéler à lui par sa parole (v. 21). C’est ainsi que Samuel grandissait à la fois dans la connaissance personnelle du Seigneur et dans celle de sa parole révélée.

En ce qui concerne Éli, combien il est consolant de voir, à la fin de notre chapitre, l’humble soumission de ce vieillard au jugement qu’il avait mérité. «C’est l’Éternel; qu’il fasse ce qui est bon à ses yeux» (v. 18). La volonté de Dieu est bonne et son âme s’incline. Que Dieu nous donne l’esprit d’Éli en présence de Sa discipline, l’humiliation qui précède le relèvement, un cœur brisé qui ne se dresse pas en face de la volonté de Dieu pour Lui résister, mais l’accepte avec toutes ses conséquences, parce qu’elle est «la volonté de Dieu, bonne, agréable et parfaite».